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28-02-2008
Mots clés
Développement Durable

Voyage au coeur d’un fantasme citadin

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L’écoquartier Vauban de Fribourg est cité comme modèle dans toute l’Europe. Il attire chaque année des milliers de curieux en mal d’inspiration. Dont une écrasante majorité de Français.
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Le quartier Vauban de Fribourg a été construit sur le site d’anciennes casernes. (Crédit : AFP)

« Aujourd’hui, il n’y a plus besoin d’être écolo pour s’intéresser au développement durable ! » Appareil photo autour du cou, carnet de notes à la main et regard à l’affût, André avance d’un pas décidé dans les rues sans voiture de l’écoquartier Vauban. « Avec le Grenelle de l’environnement et Nicolas Hulot à la télé, tout le monde se sent concerné. » André siège au conseil municipal d’une petite commune, tout près d’Annemasse (Haute-Savoie). « Mais vous ne citez pas mon nom hein ? Il y a les élections au mois de mars… » Arrivé en car le matin même avec une soixantaine d’autres élus de l’agglomération savoyarde, il est impatient de voir « ce qui se fait ici et ce qu’on pourrait importer chez nous ».

Panneaux solaires, toits végétalisés et ruelles où le piéton est roi : la visite s’annonce exotique. Guidé par une habitante, un premier groupe se faufile dans « la cité solaire », un ensemble de maisons « passives » érigées en 2000. Grâce à l’orientation plein sud, à l’isolation et au triple vitrage, les habitations profitent à plein des apports « passifs » que sont le soleil et les sources internes (appareils électroménagers, chaleur humaine, etc.) « Je vis ici depuis sept mois et je n’ai allumé le chauffage qu’à cinq reprises. Et encore pas plus de deux heures à chaque fois », raconte Elsa Gheziel. Pour renforcer l’inertie thermique, le plancher et les murs stockent la chaleur. « Même après cinq jours sans soleil, il fait encore chaud à l’intérieur », poursuit la guide. Autre innovation : un système de ventilation à double flux qui renouvelle l’air toutes les deux heures. « On évite ainsi les pertes de chaleur puisqu’il n’est plus nécessaire d’aérer les pièces, détaille Elsa Gheziel. Et l’impact sur la santé est appréciable car l’air qui entre est filtré. Quand j’habitais à Paris, j’étais sous Ventoline à cause de mon asthme. Ici je n’ai plus besoin de médicaments. » Au final, ces logements ne consomment pas plus de 15 kWh/m2 par an pour le chauffage contre 200 ou 300 dans une construction standard.

Bien plus qu’un panneau solaire

Les visiteurs sont émerveillés : « En France, on s’efforce de conserver un habitat traditionnel, avance un élu. Du coup, on s’interdit d’innover. » Les immenses toits entièrement recouverts de cellules photovoltaïques attirent l’attention du groupe. « Certaines maisons produisent ici davantage d’électricité qu’elles n’en consomment », rapporte Elsa Gheziel. Une performance, compte tenu de l’ensoleillement tout relatif de la ville : 1 800 heures par an, contre 2 700 sur l’arc méditerranéen français par exemple. Le surplus d’énergie est ensuite revendu sur le réseau local à un tarif avantageux. Un peu à l’écart du groupe, Frédéric Delhommeau reste mesuré. « Depuis deux ans, on sent une réelle volonté de bien faire chez les élus, explique ce chargé de mission auprès de l’ONG Prioriterre qui s’occupe de développement durable en Savoie. Mais leur engagement se limite souvent aux panneaux solaires. On essaye de leur faire comprendre qu’il existe d’autres pistes, mais ça n’est pas toujours évident. »

Illustration quelques centaines de mètres plus loin, devant l’école primaire du quartier : « Ici l’eau de pluie est récupérée et alimente la chasse d’eau des toilettes », explique la guide. Stupeur parmi les visiteurs : « La Dass – la Direction des affaires sanitaires et sociales – ne nous laisserait jamais faire ça », répliquent plusieurs élus en secouant la tête d’un air dépité. A Fribourg aussi, les autorités sanitaires ont refusé de valider l’initiative. Mais les responsables politiques locaux sont passés outre. « Les Français attendent trop de l’Etat. Ils pensent que le préfet ou le Président peuvent régler les problèmes, déplore t-il. Je pense qu’ils doivent faire preuve individuellement de plus de courage s’ils veulent changer les choses. »

Il faut dire qu’à Vauban les habitants ont depuis longtemps pris leur destin en main. Sur ce terrain d’une quarantaine d’hectares occupé par l’armée française jusqu’en 1992, les maisons se sont construites sans promoteur immobilier. A la place, les futurs propriétaires ont monté des Baugruppe, des sortes de coopératives de construction. « Les futurs copropriétaires se sont regroupés et ont discuté ensemble pendant un an afin de réaliser le projet selon leurs voeux, rapporte Elsa Gheziel. C’était une expérience très intense, certains couples n’y ont d’ailleurs pas résisté… » Réunis en association, les habitants ont aussi pesé de tout leur poids sur la planification urbanistique. Résultat : un îlot dessiné selon les arbres existants, des espaces verts omniprésents et des groupes de petits immeubles de toutes les tailles et de toutes les couleurs.

Vitesse ultra-limitée

Les habitants – plus de 4 000 – ont également réussi à s’imposer des règles parfois très contraignantes : 70 % des rues sont ainsi interdites à la circulation. Les voitures doivent rester dans l’un des deux garages situés à l’entrée du quartier. Surcoût pour le propriétaire  : 17 500 euros. Ailleurs, la vitesse est limitée à 30 km/h mais les ruelles en forme de « U » évitent la circulation de transit. Venus découvrir la lune, les visiteurs ont soudainement l’impression d’être face à des extraterrestres. La guide parle « projet citoyen », « rêve écologique ». Les élus répondent « plan d’occupation des sols », « contraintes administratives » ou « unité architecturale  ». Le fossé culturel paraît énorme. Voire insurmontable. « Les maisons ne sont pas alignées et sont trop différentes les unes des autres… ça donne un côté brouillon », regrette le président d’un syndicat de communes. « La sociologie de ce quartier est particulière, analyse un autre élu. Il faut voir ce que les gens accepteraient dans ma ville. »

Quartier aux allures de cité utopique, Vauban a pourtant échoué sur le front de la mixité sociale. La quasi-totalité des habitants sont des cadres moyens ou supérieurs. Et si les enfants semblent omniprésents, les personnes âgées restent introuvables. « Beaucoup d’entre elles n’avaient pas l’énergie de s’engager dans un Baugruppe », explique Elsa Gheziel. Après plusieurs heures de visite, les Français ressortent avec une impression contrastée : « C’est le pays des bisounours, un quartier sans problème en dehors de la réalité, commente un visiteur. On peut s’inspirer de quelques idées mais on ne pourra pas reproduire la même chose chez nous ». —

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