publicité
haut
Accueil du site > Actu > Société > Vivre autrement

Vivre autrement

Taille texte
{#TITRE,#URL_ARTICLE,#INTRODUCTION}
Vivre autrement
(Crédits photos : Léa Crespi pour « Terra eco »)
 
Alimentation, déplacements, loisirs : avec « Terra eco », on reprend tout de zéro. Voilà l’été du changement. Et aujourd’hui, c’est facile grâce à la consommation collaborative. Tondeuse, voiture, maison : le partage n’est plus une mode, c’est une épidémie ! Suivez-nous et découvrez le guide du nouveau départ.
Le Baromètre de cet article
ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
SUR LE MÊME SUJET

Dans le train qui file vers Nantes, Emile, 10 ans, reste bouche bée devant une petite photographie jaunie. « Mais pourquoi vous ne montiez pas ensemble dans les voitures ? » Retrouvé la veille, en plein déménagement, le cliché est vieux de vingt-deux ans. Il montre une ribambelle d’autos à un seul occupant, à l’arrêt, à l’entrée de Lille (Nord), un lundi matin de mars 2000. Un « embouteillage ». Le mot vous était presque devenu étranger. Vous jetez, tout penaud : « Ben, parce que personne ne faisait ça avant ! » Pas convaincu, le fiston recommence à jouer avec ses figurines, celles qu’il a fabriquées avec Luc, le fils de votre voisin. En tentant de calculer le temps de votre vie perdu dans ces bouchons, un sentiment d’absurdité vous gagne et vous ramène deux décennies en arrière. Vous aviez pris cette photo depuis votre bureau, avec votre appareil dernier cri. Un boîtier que vous avez jeté depuis : à l’époque, les fabricants ne fournissaient pas de notice pour réparer soi-même. Il fallait une garantie, puis envoyer l’objet en panne par courrier… Un parcours du combattant !

Des inconnus dans votre Titine

Vous possédiez alors votre propre voiture. Elle vous avait coûté un bras – trois mois de salaire – mais elle vous remplissait de fierté. Un sourire vous échappe au souvenir de ce voyage avec vos amis, pendant l’été 2002, où vous aviez préféré conduire seul jusqu’à Budapest, en Hongrie, plutôt que de laisser le volant… Dire qu’aujourd’hui, vous ne prenez plus la route que dans des voitures en libre-service ! Les paysages défilent sous vos yeux et les souvenirs remontent. C’est à l’époque qu’est né le covoiturage. En France et en Allemagne, les premières plateformes permettaient à Monsieur et Madame Tout-le-monde de partager l’auto d’un inconnu sans lever le pouce pendant des heures au bord de la route. Aujourd’hui, les livres d’histoire retiennent que c’est via l’automobile – pourtant symbole de la consommation individuelle effrénée au siècle précédent – qu’a débuté la « révolution du partage ». La jolie formule ne correspond pas vraiment à votre quotidien de l’époque. Certes, vous échangiez – illégalement – de la musique en peer to peer, mais l’idée de faire grimper des inconnus dans votre titine ne vous effleurait même pas l’esprit. Vous utilisiez Wikipedia, l’encyclopédie collaborative en ligne créée en 2001, mais il vous a fallu plusieurs années avant d’acheter votre nourriture en circuit court dans une Amap, une Association pour le maintien d’une agriculture paysanne, dont le concept est pourtant né la même année. Et il a fallu une grève des transports à Paris, en 2009, pour que vous enfourchiez un vélo en libre-service. Vous aviez fait les premiers pas de côté, sans vraiment vous en rendre compte.

Farfelu et révolutionnaire

Et puis est arrivée « la grande crise ». Les prix de l’énergie ont d’abord grimpé brusquement, en 2007, bloquant la croissance du PIB (produit intérieur brut), le principal indicateur de richesse de l’époque. Dans la foulée, la plus grave crise économique de l’histoire frappait les Etats-Unis, puis le monde. L’endettement des pays occidentaux grimpait à vue d’œil, alors même que les voyants environnementaux étaient au rouge. Il fallait changer de modèle : les solutions sont venues « d’en bas ». Dès 2012, on estime qu’entre 3 et 4 millions de Français covoituraient. Vous avez rejoint leurs rangs cet été-là, pour rendre visite à votre oncle Bernard. Des centaines de sites de partage émergeaient dans le monde entier, permettant de louer, voire de troquer ou de donner n’importe quel bien, de la scie sauteuse inutilisée à la maison inoccupée. En 2012 toujours, la plateforme américaine Airbnb fêtait la millionième location d’appartement entre particuliers réalisée depuis sa création, en 2008, tandis que plus de 270 000 Français s’alimentaient déjà via les 1 600 Amap du pays.

Bientôt, d’autres sites ont proposé de partager son jardin, son parking ou même sa machine à laver, de cofinancer des projets, d’échanger des idées, des savoirs, des services… Ces initiatives, parfois farfelues, étaient révolutionnaires. Certes, votre grand-père n’avait pas attendu Internet pour distribuer ses potirons à ses voisins, les bibliothèques permettaient depuis des lustres de partager des bouquins et, bien avant cela, les Amérindiens pratiquaient le troc et le don dans les cérémonies du potlatch (1). Mais, désormais, la Toile avait rendu possible l’échange entre des gens qui ne se connaissaient pas. Les communautés locales qui se formaient ainsi étaient pleines du nouveau carburant de l’économie : la confiance. Très vite, elles n’ont plus eu besoin du Web pour prospérer. Les projets d’habitat groupé, rêvés dans les années 1960, sont revenus au goût du jour. En 2017, 24 % des Allemands, et 7 % des Français vivaient en habitat partagé. Un an plus tard, le monde atteignait le « pic des objets », le peak stuff. Le nombre de biens matériels possédés par Européen cessait brutalement de croître. La quantité d’objets achetés s’effondrait même, à la suite du boom de l’« autofabrication » permise par les imprimantes 3D.

Depuis, les objets sont pensés pour durer et avoir plusieurs vies. Sinon ? Ils ne sont plus achetés, tout simplement. Un changement qui vous a offert votre nouveau job : expert en durabilité des produits. Votre voisin d’en face porte d’ailleurs le coup de maître de votre boîte sur les oreilles : un casque audio réparable à l’infini. Les communautés locales ont peu à peu créé leurs propres activités, notamment grâce à leurs monnaies aux noms fleuris : le sol-violette, le sol alpin, l’occitan… Ces monnaies complémentaires pesaient même 12 % du PIB en France en 2019. Impossible de savoir si cette part a augmenté depuis : dépassé, cet indice n’est plus utilisé aujourd’hui ! Mais vous pourriez parier que tous les passagers de votre voiture ont une monnaie alternative dans les poches. En voyant votre fils échanger son jouet avec sa voisine de banquette, vous vous dites que l’essayiste américain Jeremy Rifkin s’était trompé en annonçant, dans L’Age de l’accès (Pocket, 2000), que « d’ici à 2025, l’idée même de propriété paraîtra singulièrement dépassée, voire complètement démodée ». Nous sommes en 2022 et la société a au moins trois ans d’avance sur cette prédiction.

Une famille cobaye volontaire

Dring, dring, dring, on se réveille ! Trêve de rêverie. C’est pas demain la veille que tout changera comme ça. Et pourtant… ces solutions existent. Partout dans le monde, des milliers de gens les expérimentent. Et si on essayait, nous aussi ? A Terra eco, nous avons lancé ce défi, et une famille de Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme), les Proix, l’a relevé. Elle va devenir le cobaye volontaire et le témoin de cette transition dans les semaines qui viennent, en suivant le petit guide que nous avons concocté. En route ! —

(1) Ce rituel a notamment été étudié dans « Essai sur le don » (PUF, 2007), de l’anthropologue Marcel Mauss.


SOMMAIRE

PRATIQUE Notre mode d’emploi pour changer de vie De 2012 à 2017, idées, conseils et défis pour dire adieu aux bouchons, devenir locavore, apprendre à partager ou encore découvrir le système D.
ENTRETIEN « Dans les temps de crise, on est amenés à inventer de nouvelles solutions » Rompre le cercle vicieux de la croissance soutenue par la dette, miser sur la transition écologique... Face à la crise, voilà les idées enthousiastes du philosophe Patrick Viveret.
EN SAVOIR PLUS Vivre autrement : la bibliographie Livres, films et sites Internet pour faire un pas de côté.
Faites réagir vos proches, diffusez l'info !
Vous aimez Terra eco ? Abonnez-vous à la Newsletter

Non, nous n’avons pas à « sauver la planète ». Elle s’en sort très bien toute seule. C’est nous qui avons besoin d’elle pour nous en sortir.

4 commentaires
TOUS LES COMMENTAIRES
COMMENTAIRES SÉLECTIONNÉS
RÉPONSES DE LA RÉDACTION
Trier par : Plus récents | Plus anciens
Affichage : Voir tout | Réduire les discussions
  • Super partage et super article en plus de ça !
    Je dois dire que je suis vraiment séduis par cette histoire et cette logique de vie. Mais pour être vraiment honnête, je ne sais pas pourquoi mais je ne sais pas si je serais pret à faire le "grand pas".
    En tout cas merci pour ce beau partage qui m’a permis de voir les choses sous un angle différent l’espace d’un instant.

    Carl de Formation Excel Strasbourg

    18.04 à 16h56 - Répondre - Alerter
  • Queeny : Vivre autrement

    Le partage et l’achat en commun est très pratiqué dans certains pays. Cela a d’autant plus de sens lorsque les outils achetés sont de très bonne facture : l’outil a une durée de vie longue, permet un usage confortable et donne un résultat de qualité (c’est particulièrement valable pour tout ce qui est perceuses and co.).
    J’aime beaucoup cette philosophie qui est aux antipodes de l’obsolescence programmée (ressource sur le sujet : http://www.arte.tv/fr/3714422,CmC=3... ).

    Queeny, rédac pour un site de régime hyperprotéiné en ligne.

    20.08 à 15h17 - Répondre - Alerter
  • Casqueuse : Vivre autrement

    Article très intéressant, sauf que ce n’est qu’un rêve mais il faut y croire...

    Pour la petite anecdote, je viens de casser le cable de mon casque audio. Je suis allée chez Darty pour l’envoyer en SAV (pensant naïvement qu’un simple câble pouvait être reconnecté ou changé). On me répond que ce type de prestation n’est pas proposé en SAV. Bon.
    J’essaie la FNAC, même réponse. Je me permets de lancer un "le développement durable a encore du souci à se faire" pour recevoir en retour un "tout à fait Madame"...

    Evidemment pas de notice dans l’emballage pour réparer soi-même et des enchevêtrements de circuits imprimés ou autresprises à l’intérieur du casque. Trop risqué pour mes petites mains, qui n’ont pas eu raison de cette panne, je suis bonne pour en racheter un...

    9.08 à 10h32 - Répondre - Alerter
  • Emmanuel DUDRET : Vivre autrement

    bah ouais, c’est cool, sauf que si je veux creuser le sujet sur TE, je tombe sur la douane de l’abonnement... Vous m’échangez un accès temporaire contre un article de mon cru (attention tout de même, j’ai une vilaine propension pamphlétaire !) ?

    2.07 à 18h05 - Répondre - Alerter
PUBLIER UN COMMENTAIRE

Un message, un commentaire ?

  • Se connecter
  • Créer un compte

publicité
1
publicité
2
    Terra eco
    Terra eco
publicité
3
SPIP | squelette | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
publicité
bas