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11-03-2004
Mots clés
Social
France

Travailler, sans toit (suite)

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Reportage photographique à l’association la Mie de pain : Pierre-Emmanuel Rastoin

Un transformateur EDF en guise de toit

...Puisqu’il n’avait pas vraiment le choix, François, petit bout d’homme tombé dans la misère il y a huit ans à cause d’une rupture sentimentale, a fait de longs séjours dans la rue, au Samu social, dans des hôtels meublés. Au final, il trouve plus commode d’aller dans un centre d’hébergement d’urgence. Lambert, lui, préfère squatter un "transfo EDF" désaffecté à Villejuif, au sud de Paris. Sauf quand il fait trop froid, comme ce soir. Dans ce cas-là, c’est la Mie de pain. "Un enfer, explique Lambert, à tel point que des fois, je ressors avant 21 heures." Pour autant, ce vieux briscard qui a déjà refusé plusieurs offres d’embauches - pour "rester libre" - ne remue pas ciel et terre pour trouver une solution. "Pas le temps." Et puis, il a sa routine. Le linge qu’il lave au Lavo’matic le dimanche. Et ses petits plaisirs au quotidien comme les courses hippiques, dans lesquelles il laisse entre 700 et 900 euros chaque mois. Sa vraie priorité, c’est de ne pas retomber dans l’alcool.

On ne vit que pour le soir d’après

Cette résignation est difficile à comprendre d’un esprit cartésien. Elle est pourtant courante. "Quand une personne dort dans un centre d’urgence, elle ne vit plus que pour être logée le soir d’après", explique Marcel Champenois, travailleur social de l’association de réinsertion le Radeau. Devenu une priorité, se loger au quotidien évacue toute possibilité de construction d’un projet à long terme. "L’urgence appelle l’urgence", conclut Marcel Champenois. François a vécu cet engrenage : "Quand tu tombes dans la rue, les deux trois premiers mois, tu te mets des murges." Pour tenir. La rue devient alors un vice, confie François qui, il y a quelques années, a décidé sur un coup de tête de lâcher son hôtel meublé. Il ressentait le besoin de "retrouver la zone et les gars". Parfois, l’incapacité des SDF à trouver ou à garder un logement s’explique par leur simple incapacité à gérer les contraintes du quotidien (loyers, linge, alimentation) en plus de celles qu’implique leur travail, précise Xavier Emmanuelli, président du Samu social.

François reste propre et ça se voit

Travailleur, à la rue. Pour que le paradoxe tienne, pour garder son emploi coûte que coûte, il faut s’organiser. Le quotidien des travailleurs SDF est fait de bouts de ficelles. La priorité de François, c’est de rester propre, et ça se voit. "Dans une entreprise, la première chose que fait le patron, c’est de regarder vos chaussures, vos habits, vos ongles." Il entrepose ses quelques vêtements dans une consigne de la gare Montparnasse, se fait verser son salaire sur un compte de la Poste et ne parle jamais de ses problèmes au boulot. Au rayon viande de son supermarché, personne ne sait que le soir, François ne regarde pas TF1 depuis son canapé. "Je n’ai pas envie d’en parler avec les collègues. Y en a un au boulot qui est aussi en difficulté, mais on en cause pas. Je ne suis pas un pleurnicheur."

Le week-end, c’est la chambre d’hôtel

Parfois, le samedi soir notamment, il casque "250 balles" pour une chambre d’hôtel, histoire de dormir un peu plus tard. Dominique, un autre SDF, qui gagne 1200 euros en travaillant à plein temps dans la cuisine d’un restaurant de banlieue, fait la même chose. Depuis que "la mamie", propriétaire du studio qu’il habitait, y a mis "quelqu’un de la famille", il fréquente des hôtels. "Mais pour 150 balles, t’as un truc merdique, sans chauffage et avec des cafards." Une chambre potable, c’est 40 euros. "Faites le compte. Je ne peux y aller tous les jours. J’y vais le week-end pour me laver peinard." Le reste du temps, c’est la rue. Pour Gilbert Lagounel du Secours catholique, ce phénomène des travailleurs SDF n’est pas inexorable, mais le fruit d’un choix sociétal, la conséquence de la priorité donnée, quel qu’en soit le prix, à la lutte contre le chômage et à la "flexibilisation" de l’emploi. "Les emplois précaires ne permettent pas de construire une vie, insiste-t-il. Le patronat ne nous entend pas alors qu’il faut qu’on protège le statut des travailleurs précaires. C’est une vraie question de société. Si le travail est important dans l’organisation de notre société, alors il doit être digne et protecteur."

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