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25-05-2012
Mots clés
Emploi
Solidarité
France

Travailler ce lundi aide-t-il vraiment les vieux ?

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Travailler ce lundi aide-t-il vraiment les vieux ?
(Crédit photo : Ed Yourdon - flickr)
 
Instaurée à l'origine le lundi de Pentecôte, la journée de solidarité contribue au financement de la dépendance. Depuis sa création, son principe fait polémique, comme l'affectation des fonds récoltés.
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Vieillesse rime peut-être avec sagesse, mais va aussi de plus en plus de pair avec dépendance. D’après les projections de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), la France comptera 1 200 000 personnes en perte d’autonomie (personnes âgées et handicapées qui ne sont plus capables de vivre sans aide extérieure) en 2030, soit 400 000 de plus qu’aujourd’hui. La raison ? Le vieillissement de la population et l’allongement de l’espérance de vie, qui fait qu’un certain nombre d’entre nous soufflera ses cent printemps.

A ces âges honorables, tous les papis mamies ne sont plus très fringants. Aujourd’hui, on estime que 20% des plus de 85 ans sont en perte d’autonomie. Ces personnes doivent être soutenues dans leurs gestes quotidiens par une ou plusieurs aides à domicile. A défaut, elles doivent quitter leur maison et trouver une place en Ehpad, établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes.

Une prise en charge coûteuse

Mais tout cela coûte cher, très cher. Actuellement, on estime à 22 milliards d’euros par an les dépenses consacrées à la dépendance, concentrées sur les plus de 85 ans. Avec le vieillissement, des projections tablent sur un besoin accru de 10 milliards d’euros par an dans les quinze ans.

Les recherches de nouveaux financements ont abouti, en 2004 (après la canicule de 2003 qui a fait près de 15 000 morts et qui avait mis au jour les insuffisances de l’accompagnement des personnes âgées en France) à la création d’une journée de solidarité par le gouvernement Raffarin.

« La journée de solidarité, qui consiste en une journée de travail supplémentaire, est destinée au financement d’actions en faveur de l’autonomie des personnes âgées ou handicapées. Cette journée ne donne en principe pas lieu à rémunération supplémentaire », précise le site du ministère du Travail.

Tout travail mérite salaire... sauf ce jour-là

Les salariés (les professions libérales sont dispensées de cette mesure) travaillent donc très officiellement gratuitement sept heures par an, selon des modalités fixées par ou avec leur employeur. Et pas nécessairement le lundi de Pentecôte, comme cela était censé être le cas à l’origine (voir encadré).

« Le lundi de Pentecôte, journée de solidarité ? Tout le monde l’a oublié », confirme à sa manière Henri Sterdyniak, directeur du département économie de la mondialisation de l’Observatoire français des conjonctures économiques.

En contrepartie de cette journée non payée, les employeurs, publics et privés, versent une contribution de 0,3% de la masse salariale. « Ce montant correspond au surcroît de valeur ajoutée d’un jour de travail », peut-on lire sur le site de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA).

C’est par l’intermédiaire de la CNSA que le produit de la « contribution de solidarité pour l’autonomie » (le fruit de la journée de solidarité) est affecté chaque année au financement des dispositifs individuels (l’allocation personnalisée d’autonomie ou APA) et collectifs (financement des établissements) de la perte d’autonomie.

Un dispositif qui évite le recours aux assurances privées

Henri Sterdyniak salue l’originalité du dispositif visant à faire porter le poids du financement de la dépendance sur les employés, sans que cela ne coûte à leur patron. Cette mesure pourrait servir de base à la reconnaissance, courant 2013 d’après l’économiste, de la dépendance comme cinquième champ de la protection sociale, aux côtés des branches maladie, famille, accidents du travail et retraites.

Il voit également en ce dispositif le moyen d’éviter le recours aux assurances privées pour financer sa possible perte d’autonomie future. Cependant, il estime qu’« en situation de chômage et de manque de demande, il n’est pas pertinent d’exiger des salariés qu’ils travaillent davantage. Le but serait plutôt de faire travailler plus de gens ».

Personnes âgées et handicapées : à chacun sa part

Si la journée de solidarité a permis de récolter 2,33 milliards d’euros l’an dernier, et plus de 15 milliards d’euros entre 2005 et 2011, on est encore loin des 10 milliards supplémentaires à trouver chaque année pour faire face aux besoins.

La somme recueillie est divisée en deux parties non égales. 60%, soit 1,4 milliard d’euros, sont revenus en 2011 aux personnes âgées : 38% pour le financement des établissements et services, 20% (soit 466 millions d’euros) pour l’allocation personnalisée d’autonomie, distribuée par les conseils généraux et 2% pour un plan d’aide à l’investissement dans les structures accueillant des personnes âgées.

Les 40% restants - 933 millions d’euros - ont été utilisés pour subvenir aux besoins des personnes handicapées (prestation de compensation du handicap et financement des établissements d’accueil).

Une solidarité qui fait polémique sur la forme, pas sur le fond

Comme chaque année, la polémique autour du principe de cette journée ou l’utilisation des fonds récoltés a refait surface. Pour l’AD-PA, l’association des directeurs au service des personnes âgées, près de 2,5 milliards d’euros depuis 2005, dont 230 millions d’euros en 2011, « n’ont pas été dépensés comme prévu ». « Ils ont été repris des budgets de la CNSA par l’Etat » qui les a affectés au colmatage du trou de la Sécu, explique l’association dans un communiqué. « Parallèlement, on a obligé les établissements et services à domicile à diminuer leur nombre de salariés en leur retirant 120 millions d’euros », poursuit-elle.

En avril, le gouvernement de François Fillon avait reconnu que près de 225 millions d’euros de crédits destinés aux personnes âgées n’avaient pas été dépensés en 2011. Un excédent qu’il expliquait par des « retards dans l’installation de places nouvelles » d’accueil.

Des fonds détournés, dont les personnes dépendantes auraient besoin

« Pourquoi ces fonds n’ont-ils pas servi, alors que le montant de l’APA (en moyenne 482 euros mensuels versés à 1,2 million de personnes dépendantes, ndlr) est nettement insuffisant face aux coûts croissants des aides à domicile et de l’accueil en Ehpad, qui est de 2 200 euros par mois en moyenne ? C’est bien plus que le montant moyen de la retraite. Vous avez donc aujourd’hui des personnes qui sont obligées de se démunir de leurs biens et de dilapider l’héritage qu’elles comptaient laisser pour financer leur perte d’autonomie, alors qu’il reste des sous dans les caisses. C’est grotesque ! », tempête Joëlle Le Gall, présidente de la Fnapaef, la Fédération nationale des associations de personnes âgées et de leurs familles.

Une « corvée »

De son côté, la CFTC a écrit au ministre du Travail Michel Sapin pour dénoncer une mesure « injuste vis-à-vis des salariés et de leur famille ». Le syndicat s’y redit favorable au « principe de solidarité nationale pour la prise en charge des personnes dépendantes », en prélevant par exemple 0,3% du salaire tous les mois. Mais « obliger des salariés à travailler sans contrepartie de rémunération porte un nom dans notre pays, c’est la corvée ». Et de souligner « des aberrations économiques et sociales », comme le fait de contraindre des salariés régulièrement placés en chômage technique (comme dans le secteur de l’automobile) à venir travailler gratuitement une journée. La CFTC rappelle au passage que François Hollande et Jean-Marc Ayrault, alors tous deux députés, lui avaient fait part de leur opposition à cette journée de solidarité...

Pour Charlotte Brun, secrétaire nationale du Parti socialiste aux personnes âgées, handicap et dépendance, « la journée de solidarité est insatisfaisante par de nombreux aspects, notamment celui du détournement des recettes, et il y a une attente très forte du secteur pour des mesures claires et fortes, qui ne se résument pas à cette simple journée ». Elle rappelle l’engagement de campagne de François Hollande de « faire évoluer, avec les partenaires, la prise en charge solidaire de la perte d’autonomie » et rejette toute idée de création d’une deuxième journée de solidarité, comme cela avait été un temps avancé par le gouvernement Fillon.

Michèle Delaunay, la nouvelle ministre déléguée aux personnes âgées et à la dépendance, doit dessiner les grandes lignes de sa politique de prise en charge de la dépendance dans les semaines qui viennent.


Un jour fixé « à la carte »

La date de cette journée de solidarité est normalement déterminée par un accord collectif de travail. Initialement, elle était fixée au lundi de Pentecôte. Mais une loi du 16 avril 2008 a mis fin à cette règle. Aujourd’hui, les salariés peuvent travailler n’importe quel jour férié normalement chômé dans l’entreprise (y compris le lundi de Pentecôte), à l’exception du 1er mai. Ils peuvent aussi voir leur nombre de RTT amputé d’une journée ou encore travailler 7 heures de plus, réparties sur plusieurs jours de travail au cours de l’année. Désormais, la plupart des accords d’entreprise prévoient la suppression d’un jour de RTT.

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  • Je pense sincèrement que cela peut être une bonne chose pour les personnes âgées non ?
    Quand bien même il s’agirait d’un état et une façon de voir les choses pour le travail cela peut etre bon pour le senior en ehpad

    30.04 à 18h07 - Répondre - Alerter
  • C’est bon de partager des montmes pareils, on est tous le0 dans le meame but et c’est plus facile. Je me souviens de jours d’e9te9 dans l’Allier. Ce n’e9tait pas les pompiers et le sauvetage de vies humaines. C’e9tait pour surveiller les nidifications de sternes pour la LPO. Grande tente au camping sur les bords de Loire et partage de la surveillance, des heures dans la nature, avec une lunette sur pied, compter les oiseaux, inviter les passants ou les vacanciers en canoe9 e0 venir voir les oiseaux de loin, et leur demander de ne pas marcher sur les bancs de graviers de9couverts dans le lit de la Loire car les sternes font leur nid sur le sol, et avec le mime9tisme, on ne voit pas les nids ni les oeufs .Partage des repas . balades Merci Olivier d’avoir re9veille9 ces souvenirs !

    9.07 à 05h16 - Répondre - Alerter
  • Je ne suis pas d’accord sur votre analyse qui vise à dénoncer une journée de travail on payée. Le jour férié est chômé et payé. Si vous travaillez ce jour-là, vous êtes payé plus et c’est ce surcroît de rémunération que vous "offrez". En prélevant 0.3% des salaires comme le veut le gouvernement actuel, le résultat au final sera le même en terme de récolte des fonds mais il sera bien différent pour le salarié ! Son pouvoir d’achat va diminuer de 0.3% ! Alors qu’avec la formule actuelle, il ne perd pas 1 centime de son salaire. Quant à porter plainte pour esclavagisme d’état, on croit rêver !! Vous devriez ouvrir les yeux sur le monde qui nous entoure et son évolution. A ceux qui veulent les avantages sans aucun inconvénient : vous êtes dangereux. Notre modèle de société engendre de nouveaux coûts : soit on les assume, soit on lâche certains avantages. Mais nous n’aurons pas les 2, c’est plus qu’évident.

    29.05 à 18h33 - Répondre - Alerter
  • La droite a simplement profité de l’émotion de la canicule de 2003 pour attaquer la 5e semaine de congés payés.

    Quand vous travaillez dans une entreprise où il n’y a pas de RTT, qui choisit le lundi de Pentecôte pour la journée de solidarité, il faut sacrifier l’une des 25 journées de congés payés de l’année pour garder le bénéfice de cette journée qui est officiellement fériée en France.

    On peut voir les choses de deux manières :
    - depuis cette loi, certains jours ne sont plus fériés pour tous => inégalité devant la loi
    - depuis cette loi, le code du travail ne prévoit plus 25 mais 24 journées de congé par an minimum

    Malheureusement il n’y a pas grand monde dans les élites médiatiques et économiques qui soit directement concerné par cette réduction des congés payés annuels, et donc on a le droit à des discours de classe du genre "personne ne se rappelle qu’on est censé travailler un jour de plus".

    Il faudrait penser à s’intéresser au sort des autres au moins pendant une journée... n’est pas cela, la solidarité ?

    28.05 à 11h59 - Répondre - Alerter
  • Est-ce qu’il ne serait pas possible de porter plainte auprès du Tribunal des Droits de l’Homme pour esclavagisme d’État ? En effet, faire travailler quelqu’un sans le payer, c’est de l’esclavagisme, ni plus ni moins. Prétexter la solidarité alors que notre système capitaliste est entièrement fondé sur l’exploitation des plus faibles par les plus riches est d’une hypocrisie extrême. Un système économique sain n’aurait absolument pas besoin de cela.

    28.05 à 10h28 - Répondre - Alerter
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