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6-12-2012
Mots clés
Logement
France

Reloger les pauvres, plus rentable que les laisser à la rue ?

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Reloger les pauvres, plus rentable que les laisser à la rue ?
(Crédit photo : Ludo29880 - flickr)
 
Maintenir des milliers de personnes dans des situations d'hébergement provisoire est coûteux. Leur fournir une solution de logement durable pourrait s'avérer rentable à moyen terme, et bénéfique à la société tout entière.
Le Baromètre de cet article
ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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Inverser la logique. Voilà ce que le gouvernement va être invité à faire les 10 et 11 décembre, à l’occasion de la conférence contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale qu’il organise. Dans l’un des sept rapports préparatoires à cette conférence, Christophe Robert, délégué général adjoint de la Fondation Abbé Pierre, et Alain Régnier, délégué interministériel à l’hébergement et à l’accès au logement, exhortent les pouvoirs publics à ne plus considérer l’hébergement comme « une soupape, un amortisseur de crise ».

Dans le document plaidant pour un « choc de solidarité » qu’ils ont remis lundi 3 décembre à Cécile Duflot, la ministre du Logement, ils incitent au contraire à considérer l’accès au logement et le maintien dans le logement – à condition que celui-ci offre des conditions de vie décentes – comme la solution à valoriser. Car, en plus d’être probablement la moins coûteuse, sur le long terme c’est celle qui offre le plus de stabilité à une population très précarisée.

Un système d’hébergement qui ne tourne plus rond

A l’approche de l’hiver, les limites du système d’hébergement actuel deviennent patentes. Et le nombre de places en centres ne suffit pas à couvrir les besoins des quelque 133 000 personnes sans domicile fixe (estimations de l’Insee). Dans son sixième « baromètre 115 » sur la prise en charge des personnes à la rue qu’elle vient de publier, la Fnars, fédération d’associations de solidarité, alerte contre une saturation du dispositif d’hébergement encore plus criante que les années précédentes - crise et pauvreté croissante obligent.

Alors que la demande a crû de 37% entre novembre 2011 et novembre 2012, ce sont aujourd’hui plus des trois-quarts des demandes de places dans un centre d’hébergement qui sont rejetées, dans les 37 départements observés. A la fois parce qu’il manque des places, mais aussi, comme l’explique Christophe Robert « parce que le secteur de l’hébergement est l’héritier d’une période où les personnes en situation d’exclusion étaient surtout des hommes seuls ».

Or, le visage de la pauvreté a changé : le nombre de familles, dont beaucoup sont monoparentales, en quête d’un toit a explosé. La Fnars a relevé une hausse de 60% des demandes d’hébergement de leur part en un an. Mais les centres d’hébergement ne sont pas adaptés pour accueillir des ménages avec enfants, majoritairement redirigés vers des hôtels. Une solution bien plus coûteuse (85 euros la nuit en moyenne) et qui rend l’accompagnement social malaisé.

La nouvelle logique : le « logement d’abord », et pour tous

D’où le besoin d’inverser la logique. Plutôt que de dépenser toujours plus de moyens, année après année, pour des solutions d’hébergement insatisfaisantes et qui maintiennent les populations précaires dans du provisoire à prix prohibitif pour la collectivité, il faut « mettre les personnes les plus en difficultés dans des logements, et leur permettre de bénéficier du même accompagnement social que lorsqu’elles étaient hébergées », recommande Christophe Robert.

Avec, pour le propriétaire des lieux, la garantie que le loyer sera payé et le bien correctement entretenu, grâce aux systèmes d’intermédiation locative ou de location solidaire (voir notre article sur le sujet ici), censés également prévenir les expulsions en cas de loyers impayés. « L’intermédiation locative, qui permet de maintenir une personne dans son logement (si elle rencontre des difficultés pour payer son loyer, ndlr) ne représente pas un coût supérieur à son hébergement suite à l’expulsion de son domicile », expose Christophe Robert.

Loger plus de monde implique bien sûr de réquisitionner les logements vides mais aussi d’en construire de nouveaux. Ce qui représente un investissement conséquent. Alain Régnier ne le nie pas. Mais, dans une vidéo disponible sur le site du ministère du Logement, il estime que « ces dépenses complémentaires sont à considérer à moyen et long terme comme une source de croissance dans toutes les dimensions du développement durable pour notre pays ». « Plus on fait reculer l’exclusion, plus on a une société harmonieuse. C’est un bénéfice pour tous. »

Calculer aussi les conséquences sanitaires et sociales du non-logement

Parce que l’impact du non-logement s’étend bien au-delà des murs des structures d’hébergement, c’est le coût global du maintien dans des situations de précarité qu’il faut considérer, et notamment ses conséquences sanitaires et sociales. Lorsque l’on ne sait pas où dormir le soir, la santé n’est pas une priorité. Or, le retard des soins entraîne une prise en charge plus lourde par le système de santé, et donc un coût plus important pour la collectivité. Plus difficiles à calculer sont l’impact de l’hébergement ou du mal-logement sur l’échec scolaire d’enfants ballottés, ou les conséquences sur le bien-être et la vie familiale. « Il faut aussi penser aux coûts liés aux accidents domestiques, dus par exemple à un réseau électrique défectueux », explique Didier Gélot, secrétaire général de l’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale.

Cette structure a prévu, au premier semestre 2013, de lancer un appel d’offres pour qu’une étude évaluant le vrai coût du mal-logement – dans lequel le non-logement sera inclus – soit réalisée. Pour effectuer de tels calculs, qui à ce jour n’existent pas en France, les chercheurs devront s’inspirer de modèles développés en Grande-Bretagne ou aux Etats-Unis. « Le but est bien de s’interroger sur le coût global de la prise en charge des personnes sans domicile (à la rue ou bénéficiant d’un hébergement, ndlr) ou mal-logées comparativement au coût d’un relogement direct dans de bonnes conditions », explique Didier Gélot.

« Il y a la théorie, et puis il y a la réalité », tempère Olga Trostiansky, conseillère de Paris chargée de la solidarité, de la famille et de la lutte contre l’exclusion. « La réalité c’est que, à Paris, on a impulsé une politique très volontariste de construction de logements sociaux. Mais qu’on dépense aussi toujours plus d’argent dans la lutte contre l’exclusion et dans l’hébergement. Car on ne va pas affecter l’ensemble des logements uniquement à ceux qui sont dans la rue. Il nous faut instaurer de la mixité ! », explique-t-elle. Elle avance par ailleurs que, bon nombre de bénéficiaires des centres d’hébergement d’urgence étant sans papiers, l’accès au logement social leur est, de fait, impossible.

Une situation complexe que François Hollande prendra peut-être en compte lors de son annonce, début 2013, d’un plan quinquennal de lutte contre la pauvreté et les exclusions.

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  • on en conclue donc que les 130 000 logement HLM vides en région parisienne en 2010 ont trouvé preneurs ??
    http://www.liberation.fr/societe/01...
    _

    14.12 à 22h34 - Répondre - Alerter
  • Et si on arrêtait de laisser entrer 200.000 pauvres tous les ans et qu’on s’occupait de ceux qui sont déjà là ?

    8.12 à 16h48 - Répondre - Alerter
    • Et si les commentateurs amateurs développaient leurs idées ? Il y a en effet là un embryon d’idée, du genre assez nauséabond à mon goût, car regarder le contenu du compte en banque des gens qui entrent dans un pays pour leur laisser le droit de passage, ça porte un nom, ça définit un type de politique que personnellement je refuse complètement. Si on veut la solidarité mais seulement pour les riches, on crée simplement une poudrière un peu plus grosse que celle que nous avons déjà. Alors, plutôt que d’opposer des pauvres les uns aux autres, si on s’occupait de savoir ce qu’est la richesse, qui la crée, qui l’utilise, comment, et comment la répartir mieux ? Des comptes somme toute assez simples... et qui éviteraient de se poser des questions à deux balles pour économiser des bouts de chandelle quand il y a tant de richesse(s) dans un pays comme la France, sans parler de l’Europe...

      9.12 à 17h38 - Répondre - Alerter
      • Quand comprendrez-vous que cela n’a pas de fin et que votre belle générosité s’arrête aux moyens de votre pays, qui n’en peut plus et n’arrive pas à suivre.

        9.12 à 19h17 - Répondre - Alerter
        • Bibopeuloula, you’re a baby, si vous me permettez. Votre question ne rime à rien, croyez-vous que des gens prêts à risquer leur vie en traversant la mer sur une barcasse (ou un continent dans le double fond d’un camion) puissent être arrêtés ainsi ? Rehausser les murs de la "forteresse Europe" n’aura qu’un effet tout provisoire et beaucoup de dommages "collatéraux". Je n’ai pas de solutions toutes prêtes, mais ce que vous proposiez ne va pas dans un sens qui ira mieux.

          10.12 à 16h03 - Répondre - Alerter
          • Cela doit évidemment s’accompagner d’un renfort des aides aux pays concernés. Je dis bien renfort car nous donnons déjà beaucoup. Il faut aussi pouvoir s’assurer que l’argent donné est bien utilisé, mais là vous allez me dire que je fais de l’ingérence post-coloniale sans doute.
            Votre solution toute prête est de couler le donateur, c’est mieux ?

            10.12 à 18h50 - Répondre - Alerter
        • De quoi parlez-vous exactement quand vous dites "donne beaucoup", ou "n’en peut plus" ? Des chiffres SVP. J’en ai d’autres à proposer pour trouver des ressources...

          10.12 à 22h51 - Répondre - Alerter
  • On est peut-etre pas obligés de construire des logements modernes et couteux...meme le social doit prendre une direction alternative,ecologique,soutenable économiquement et durable.Vive la yourte !...

    7.12 à 20h20 - Répondre - Alerter
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