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8-06-2006
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Politique
Monde

Nous sommes tous libéraux

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Galvaudé, dénaturé, vidé de son sens : le terme "libéral" a perdu son âme. Terra Economica ressort son dictionnaire de la pensée économique. Et remet les pendules à l'heure.
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"En France, le mot ’libéral’ est devenu une insulte synonyme d’obscénité morale et idéologique", se désole Alain Laurent, historien du libéralisme désabusé. A tort ou à raison ? Avant de se forger une opinion, encore faut-il savoir de quoi on parle. Au commencement était le libéralisme modéré, version XVIIIe siècle finissant et première moitié du suivant.

En ce temps-là, "le libéral se battait pour la primauté de l’individu dans les domaines politique et économique, tout en s’opposant à l’extension du champ d’intervention de l’Etat, analyse Alain Laurent. Mais aucun des fondateurs du libéralisme classique n’était favorable à une disparition de l’Etat." Eh oui, contrairement à une légende tenace, Adam Smith n’a jamais fait l’apologie du travail des enfants.

Ronald et Margaret

"L’économiste écossais était un moraliste soucieux du bien public, à mille lieues de l’intégrisme libéral qu’on lui prête trop souvent", recadre l’universitaire Henri Bourguinat. Au point de glisser une sentence prémonitoire dans son œuvre maîtresse, Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, parue en 1776 : "Il n’est pas très déraisonnable que les riches contribuent aux dépenses de l’Etat non seulement à proportion de leur revenu, mais encore quelque chose au-delà de cette proportion." Plaider pour un impôt progressif sur le revenu treize ans avant le déclenchement de la Révolution française, il fallait oser. Seulement voilà. Depuis "la main invisible" de Mister Smith, l’eau a coulé sous les ponts.

D’une révolution à l’autre, une nouvelle vague libérale portée par Margaret Thatcher et Ronald Reagan submerge les Etats-Unis et la Grande-Bretagne au début des années 1980. Avant de recouvrir le reste de la planète à la vitesse d’un cheval au galop. Incapables de résorber l’explosion du sous-emploi dans les années 1970, les politiques de relance keynésienne laissent la place aux nouvelles recettes libérales, réputées plus efficaces.

Tout dans le même sac

"L’idéologie libérale prétend régler le problème du chômage par le seul jeu du marché, ce qui passe par un démantèlement de l’Etat-Providence créé au lendemain de la Seconde Guerre mondiale", stigmatise Michel Husson, chercheur à l’Institut de recherches économiques et sociales. Mais ce libéralisme-là n’a plus grand-chose à voir avec celui des grands anciens. "Le néo-libéralisme constitue un dévoiement des valeurs libérales, assure Jacques Généreux, professeur à Sciences Po [1]. Selon un usage fréquent, nous employons le terme "néo-libéral", et non pas "libéral", pour éviter la confusion entre l’apologie contemporaine du marché et le libéralisme politique qui promeut à la fois l’autonomie de la personne et la recherche du bien commun."

Attention toutefois à ne pas mettre tous les libéraux dans le même sac, prévient Henri Bourguinat. "Un Milton Friedman, libéral pur et dur opposé à toute intervention de l’Etat, n’a pas grand-chose à voir avec les économistes de l’école de Fribourg, favorables au maintien du rôle de la puissance publique."

Néo, ultra et ex-libéraux

N’en déplaise à certains, libéral ne rime donc pas forcément avec "ultra". Hormis Margaret Thatcher et Augusto Pinochet, inconditionnels de Friedmann et de ses disciples de l’Ecole de Chicago, l’ultra-libéralisme n’a guère fait d’adeptes. George Bush junior lui-même n’hésite pas à soutenir massivement les secteurs économiques en difficulté. Où en serait l’aéronautique US depuis le 11 septembre si le gouvernement néo-conservateur n’avait pas injecté des centaines de millions de dollars pour sauver de la faillite les grandes compagnies aériennes ?

Idem dans l’autre sens pour ceux qu’on qualifie de sociaux-libéraux : les ex-socialistes façon Tony Blair, ralliés à l’économie de marché au nom du pragmatisme. "Comme le dit un proverbe chinois, peu importe la couleur du chat, pourvu qu’il attrape des souris", persifle Michel Husson. Peu importent aussi les conséquences sociales ? Enfin, - pourquoi faire simple - n’oublions pas qu’aux Etats-Unis, le terme liberal désigne... les partis de gauche. Ne serions nous finalement pas tous des libéraux ?

[1] Les vraies lois de l’économie, Jacques Généreux, éd. du Seuil, 2004, 364 pp.

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  • Il ne faut pas confondre Georges et Milton, avant dernier paragraphe.
    Il fallait peur-être aussi insister sur les origines philosophiques du libéralisme.
    J.C.D.

    10.08 à 15h07 - Répondre - Alerter
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