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Par Corto Fajal
4-05-2011

Nicolas Hulot ou la fin de mon orphelinat

Avec la candidature de Nicolas Hulot, ce n'est pas l'écologie politique et ses représentants qui s'invitent dans la campagne présidentielle mais l'Environnement, la Biodiversité, la Nature, avec qui l'Homme devra réapprendre à composer et s'asseoir humblement autour d'une même table de négociation. Il va enfin être possible de retrouver dans nos discours, nos objectifs, nos ambitions une place plus juste parmi le reste du monde... du moins je l'espère.

J’attendais depuis longtemps ce candidat : je désespérais d’entendre un discours politique où les enjeux environnementaux ne sont pas un argument de joute verbale mais sont le sujet central autour duquel désormais nous devons penser l’organisation de nos sociétés.

La problématique environnementale n’est pas un effet de mode, un discours de postures, elle n’appartient à aucun courant politique, elle est une réalité aux conséquences effrayantes si on l’ignore à l’échelle tant locale que de l’humanité, elle est le sujet préalable à tous les autres qu’il devient urgent de s’approprier chaque jour dans nos quotidiens, nos pratiques, nos valeurs, nos économies, dans nos manières de penser, de consommer, de s’amuser, de se soigner, de produire.

Elle implique que nous nous organisions désormais à travers des modèles qui lui sont compatibles et non pas comme c’est trop souvent le cas en s’obstinant à l’intégrer dans les modèles existants qui ont montré leurs limites. C’est une histoire de vision.

D’ailleurs, Nicolas Hulot ne s’y trompe pas, il ne parle pas de programmes, d’idées ou de projets mais bien de vision. Cette vision politique dont nous manquons depuis des années. Quelle vision avons nous du monde dans lequel nous voulons vivre aujourd’hui, du monde que nous voulons pour nos enfants, quelles valeurs voulons nous porter dans nos quotidiens. Comment trouver l’apaisement de nos esprits tourmentés par les démons du monde moderne qui nous pousse toujours plus en avant tandis que le sentiment d’insatisfaction et une culpabilité grandissante rongent peu à peu nos esprits. Au fond on sent bien que quelque chose ne tourne plus rond, mais il est si difficile de savoir vers où se tourner tant les sujets d’indignation s’accumulent pour ne plus former qu’un agglomérat confus dont on ne sait plus que faire : un agglomérat où même la simple dimension humaine a tendance à s’effriter au profit d’obscurs desseins qui nous dépassent et qui graduellement se déshumanisent.

Avec la vision portée par la candidature de Nicolas Hulot, nos aspirations de changements entrevoient enfin une voie politique à suivre, un choix de société apte à apaiser nos tourments : Autour de moi, les « orphelins politiques » sont nombreux depuis longtemps : insatisfaits , dégoutés, écoeurés, nous nous sommes détournés de nos représentants tant ils semblent s’être éloignés de ce qui nous préoccupe et de l’essentiel. Leurs discours ne nous atteignent plus. Même lorsqu’ils parlent de nos emplois, de l’amélioration de notre pouvoir d’achat, de la protection du consommateur, de l’éducation de nos enfants, nous avons l’impression qu’ils nous parlent d’autres choses, que d’autres intérêts et motivations sont à l’oeuvre : nous ne les croyons plus (ce qui explique probablement le succès grandissant des extrêmes politiques, religieux et sectaires ou les défections massives lorsqu’il s’agit d’exercer notre devoir de citoyen). Cette nouvelle vision participe à combler le vide qui sépare nos élites de nos réalités quotidiennes.

Dans les projets qui naîtront, nous avons chacun un rôle à jouer, il est important d’entrée de jeu de se demander, non pas « qu’est ce que ce candidat propose pour améliorer mon existence, ma vie et mon quotidien » mais plutôt, qu’est ce que moi, je peux apporter comme idées et projets à cette vision, en quoi puis-je contribuer à cette perspective d’un élan nouveau ? Quelle place je souhaite y occuper ? Quel acteur puis-je être ?

Le temps de l’expertise est terminé. Le discours « de l’expert » devenu dominant étouffe toute prise de conscience individuelle, toute capacité à ressentir par nous même, érode notre capacité à observer ce qui nous entoure et à en tirer des conclusions : nous nous sommes habitués à attendre la validation de l’expert jusque dans les décisions les plus intimes de notre vie privée. La dictature de la pseudo expertise nous a déresponsabilisé, nous a ôté toute capacité à faire des choix de société par nous mêmes : il est fondamental de redonner du sens à nos actes, notre travail, notre place dans notre environnement, nos engagements, nos convictions, nos décisions, nos modes de vie, nos choix de consommation et de production.

Les savoirs sont cloisonnés, séparés. Les compétences, les responsabilités sont diluées, nous interdisant toute perspectives d’une vision globale, condamnant à l’échec tout initiative. Cette culture de l’expertise exacerbe le sentiment d’impuissance, l’incompréhension des uns vis à vis des autres, provoque des malentendus et cultive le mensonge à une échelle devenue mondiale. Cela favorise l’émergence de contre-pouvoir aux motivations incompatibles avec le bien être de l’humanité. Cette segmentation en domaines relevant du champ de l’expertise nous dépossède de notre libre arbitre, on ne discerne plus que finalement tout est interconnecté.

Faut-il une catastrophe nucléaire pour nous le rappeler ? La politique, notre économie, la géographie, la géologie, la qualité de nos sols , de notre alimentation, de l’air que l’on respire, de notre travail, de nos conditions de travail, de l’eau des océans, de nos ressources... tout cela est finalement liés par un discret fil d’Ariane que nous avons tricoté au nom d’un idéal qui a pour nom Capitalisme, Libéralisme, Démocratie et et qui peu à peu s’est perverti sur l’autel des travers humains.

Dans son costume de candidat à l’élection présidentielle, Nicolas Hulot porte l’espoir d’un changement, d’une révolution qui peut se construire avec notre collaboration... Dans la situation actuelle, ce changement est de toute façon inéluctable, nous avons juste le choix : le porter ensemble, ou le subir malgré nous : ceux que nous avons négligés hier, l’Environnement, la Nature et la Biodiversité se rebiffent de plus en plus fort et nous aurions tort de croire que la Révolution est le privilège unique des hommes.

A ceux qui voient dans la manière de faire acte de candidature hors du cercle de sa famille politique naturelle, tout en les enjoignant à le rejoindre, une attitude méprisante et snob, je réponds au contraire : quelle finesse !!! Nicolas Hulot se place d’emblée hors de la mêlée humaine et des logiques d’appareils politiques, qui si elles font les choux gras des médias, grignotent notre conviction à croire que nos représentants puissent être efficients.

Nicolas Hulot n’est pas moins légitime à être candidat que la plupart des autres déclarés ou en passe de l’être et qui depuis des années sont passés maîtres dans l’art d’assumer avec cynisme et indécence leurs paradoxes tout en croyant encore que nous sommes dupes. Si l’on va au delà encore, vivre avec ses contradictions, ses compromis par rapport à ce que l’on pense et ses désirs, n’est pas l’apanage des hommes politiques : c’est devenu dans le monde ou nous vivons presqu’une seconde nature pour chacun d’entre nous : cela nous rend il moins intègre pour autant ?

J’entend, je lis et j’écoute ça et là, les critiques, les doutes, l’ironie et les railleries qui s’élèvent contre la légitimité du costume de candidat que Nicolas Hulot a finalement décidé de porter, pointant ses incohérences et sa compromission avec l’univers de l’argent : il me semble que personne aujourd’hui n’est exempt dans sa vie de compromis avec un modèle de société qui ne nous convient plus. Qui peut prétendre aujourd’hui, à part certains choix de vie marginaux et certains extrémistes, vivre en harmonie totale avec ses propres convictions au travail, dans sa consommation, dans ses loisirs ? Je n’ose même pas imaginer que vous puissiez être nombreux à lever le doigt.

Si nos âmes ont su rester pures et intègres, nos actes ont pris l’habitude de s’adapter, de s’accommoder, de composer avec un quotidien qui est devenu pesant, chèr, injuste, agressif, tentateur. Cette attitude de compromission est devenue une seconde nature pour supporter un monde aux règles qui ne nous apportent plus satisfaction.

En agissant ainsi, nous avons repoussé graduellement toujours plus loin les limites, alimentant une bulle dans laquelle nous nous complaisons, dans laquelle l’inacceptable se justifie, dans lequel le cynisme et l’indécence se sentent à l’aise. Tout cela déborde désormais jusqu’à nos pas de portes de manière si massive que nous peinons à faire face : l’indécence des prix, le cynisme des discours, l’indécence des mensonges, l’indécence des compromissions du pouvoir, l’indécence des doubles discours, l’indécence de nos situations précaires, l’indécence de la déshumanisation de nos relations, le cynisme de nos élites qui sont déconnectées du monde réel, l’indécence de la spéculation. Comme les marchés financiers construisent régulièrement leurs bulles, notre société construit la sienne et il y a fort à parier à ce rythme, qu’elle suivra le même chemin que toutes les bulles financières jusqu’alors.

Je trouve le procès en légitimité qui émerge ça et là injustifié : la légitimité de Nicolas Hulot ne piétine en aucune manière celle des autres et nous avons trop besoin d’un candidat qui incarne cette nouvelle vision : le monde doit changer, changer sa manière de penser, changer ses pratiques, ses motivations, ses objectifs, ses équilibres en déséquilibre grandissant..... si cela peut faire peur et résonne comme la promesse d’un grand saut vers l’inconnu, il me semble que c’est la seule alternative possible à la course en avant irrémédiable qui est la nôtre dans les modèles de sociétés que nous avons adoptés.

A l’heure actuelle, aucun parti politique n’a montré de réelles convictions à inverser ou modifier cette course en avant, empêtrés qu’ils sont dans des logiques clientélistes, des lourdeurs d’appareils, de lobbying, d’intérêts divers et surtout prisonniers d’une manière de penser qui s’est peu à peu corrompue pour oublier les valeurs essentielles.

Nicolas Hulot vient d’ailleurs. Il n’appartient pas à la sphère politique : ne lui faisons pas l’injure d’utiliser les mêmes critiques et les même méthodes pour le déstabiliser que ce que nous ne supportons plus de nos représentants : nous attendons du changement depuis tellement longtemps que lorsqu’il se pointe, sachons le reconnaître et ne scions pas la branche sur laquelle nous souhaitons nous asseoir.

Le sens de sa candidature, le message qu’il porte dépasse de loin sa simple personne, ayons l’intelligence de l’admettre. Je suis attristé de voir avec quel acharnement certaines personnalités que je respecte et que j’aime écouter se sont lancés dans une campagne de destruction et de dénigrement qui ne leur ressemblent pas.

J’entend beaucoup parler des sources qui financent la Fondation dont il est à l’origine : mais peu décrivent le nombre d’actions, d’évènements d’initiatives qui ont vu le jour grâce à son label et sa participation financière. Gageons que les bénéficiaires de ce coup de pouce déclencheur n’ont jamais souligné le paradoxe de la provenance de ces fonds : la Fondation étant considéré comme un écran suffisamment crédible, à l’image suffisamment authentique et positive pour donner à nombre de projets l’illusion respectable de s’exonérer d’un financement aux origines discutables.

Enfin voilà, j’ai trouvé mon candidat.... il y a d’autres personnalités que j’aime beaucoup, issus d’autres partis, ou du même : Eva Joly et son image incorruptible, Arnaud Montebourg et son inflexibilité, Rama Yade et ses idéaux, José Bové, et bien d’autres.... je rêverais de les voir prendre ensemble en main notre pays, notre avenir, et qui sait ? servir d’exemple au reste du monde, comme nous l’avons déjà fait dans le passé. Nous vivons une époque qui transcende les clivages politiques, où nous avons besoin d’hommes et de femmes qui proposent une vision et non des compromis d’appareils, nous n’avons plus besoin de serviteurs de lobbyings et d’intérêts : même si on les compte sur les doigts de la main, ils sont là présents.... une utopie ?

Si nous savons adhérer à cette vision proposée par la candidature de Nicolas Hulot et suivre d’une certaine manière la « voie » comme Edgar Morin le suggère dans son dernier livre ; il ne fait aucun doute que le costume de candidat pourra être troqué contre celui de président : une condition indispensable à la fin de mon orphelinat politique, une perspective passionnante qui ouvre à tous les espoirs, une lumière au bout du tunnel, une flamme pour l’Homme, l’Environnement, la Biodiversité et la Nature qu’il nous faudra tous ensemble alimenter et faire grandir afin de la partager avec le reste de l’humanité,

Il y a trop longtemps que je fais partie des sans famille, orphelins politiques, trop d’années que je vote par défaut et désespère de le faire par conviction. A défaut d’une famille politique, j’ai trouvé mon candidat : reste à construire une famille autour de la vision qu’il propose.

COMMENTAIRES ( 3 )
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  • Je crois que Nicolas Hulot est un véritable écologiste, qu’il connaît bien son sujet et qu’il éprouve une véritable tendresse pour la Terre. En cela il est très supérieur aux verts qui ne font que de la politique et dont la dernière réflexion sérieuse en matière d’écologie (à quelques exceptions individuelles près quand même) remonte à bien longtemps.
    Sans doute s’est il fourvoyé en s’alliant avec ce parti qui ne partage en rien ses analyses. Mais ce n’est pas grave, il est toujours là pour nous apporter ses réflexions.
    Seul petit reproche de ma part, qu’il ne mette pas la question de la surpopulation en tête des problèmes écologiques d’aujourd’hui. Là-dessus par contre, je suis un peu sévère. Si l’on ne s’occupe pas de cela, le reste de nos efforts ne sert à rien et la prudence de Nicolas Hulot sur le sujet me gêne un peu.

    31.07 à 12h09 - Répondre - Alerter
  • Je veux bien croire qu’il soit un homme d’en bas, un homme qui peut à la fois accompagner et défendre le citoyen lambda, comme la collectivité ou bien l’industrie, avec un impact fort sur l’écologie sociale, sur l’environnement, sur les valeurs, mais pour ce faire, qu’il prenne le temps de venir le voir ce monde d’en bas, qu’il vienne l écouter, qu’il vienne saisir les actions déjà en place et qui fonctionnes à petite échelle, mais qui ont la force d’exister et qui sont accompagnées par de nombreuses personnes.. qu’il vienne prendre toute la mesure de ce que veut dire "ensemble", et surtout qu’il vienne faire lui même l’analyse des solutions que propose ce monde du bas, ce monde qui ne demande qu’à croire, qu’à reconstruire, qu’à respecter, qu’à avancer....

    7.05 à 17h56 - Répondre - Alerter
    • Wowsers ! Looking at work by artists with chops as imevpssire as his, I always feel so small and silly.It’s odd, though, that I don’t viscerally respond to the works ; my excitement is generally related to his technique and drawing. This is certainly the sort of stuff that a lot of high art folks would deem illustration in the perjorative sense, and I take issue with that, but few of these images breathe, as I feel they would be in the hands of someone like Caravaggio, who seems to be an inspiration for this artist.But maybe that’s just me suffering from pretension ?

      9.07 à 06h41 - Répondre - Alerter
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