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Mini REACH, maxi lobbying

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Le Parlement européen vient d'adopter la directive REACH sur le contrôle des produits chimiques. Le lobby sort grand vainqueur.
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C’est une affaire de molécules. Dissimulées dans la formule de fabrication de la moquette, du shampooing, du produit à vaisselle ou du coupe-vent, elles sont parfois toxiques. La directive REACH (Enregistrement, évaluation et autorisation de substances chimiques) va permettre d’étudier ces composants et de réglementer leur utilisation, histoire de préserver l’environnement et la santé publique. Au total : 30 000 petites molécules plus ou moins voraces vont ainsi passer au "scanner". Il aura fallu quatre ans d’empoignades entre acteurs publics et privés, tous amateurs et grands connaisseurs du "lobbying".

Lâché de lest

Il y eut, d’abord, les pressions politiques venues de France, d’Angleterre et d’Allemagne. Le trio a freiné des quatre fers les travaux de l’UE, afin de protéger son industrie chimique, affolée à l’idée d’être pénalisée "face à la concurrence des Etats-Unis, de la Chine ou de l’Inde" [1]. L’équipe de Bush y est aussi allée de son influence. Selon un rapport du démocrate Henry Waxman, l’administration américaine a fait "œuvre d’ingérence dans les affaires européennes". Les relais de ce petit jeu furent l’American Chamber of Commerce et l’American Chemistry Council, deux puissants groupes de pression travaillant notamment pour le compte des géants Procter & Gamble, BASF et Exxon Mobil.

Le Cefic (Conseil européen des fédérations de l’industrie chimique) a lui aussi joué des épaules. Selon cet organisme, les contrôles imposés par REACH, aux frais des industriels, vont "ruiner" ces derniers. 670.000 salariés, sur 1,7 million que compte la chimie européenne, seraient menacés. Et le Cefic d’annoncer l’addition : REACH coûterait plus de 50 milliards d’euros aux industriels dans les dix ans à venir. Problème : ce chiffre est jugé totalement fantaisiste par l’EEB (Bureau européen de l’environnement) qui table sur une facture de 636 millions d’euros par an. Soit 0,1% du chiffre d’affaires annuel des industriels implantés en Europe.

Frédéric Flamant, chercheur à l’Inra (Institut national de la recherche agronomique) et auteur d’une tribune pour défendre REACH, estime qu’il s’en est fallu d’un cheveu pour que les lobbies ne "sabotent le projet". Du reste, s’ils n’y sont pas parvenus, les industriels ont tout de même décroché une concession de taille : l’allègement des tests toxicologiques pour les substances produites à moins de 100 tonnes par an. Les associations de protection de l’environnement - elles aussi lobbyistes à leurs heures - n’ont pas tout perdu. Ainsi, les autorisations d’utiliser des substances chimiques ne seront désormais délivrées que pour une durée de cinq ans. Résultat : les industriels seront incités à développer des produits de substitution, une sorte de "chimie verte", innovatrice et potentiellement créatrice d’emplois.

Objectif : santé publique

Au terme de ce match entre professionnels de l’influence, il reste un nom - REACH - désormais mieux connu des Européens. Mais aussi un texte, qui ménage la chèvre et le chou. "La législation précédente était plus sévère sur les nouvelles substances que le système REACH", regrette Yannick Vicaire chargé de la campagne "Toxiques" à Greenpeace France. De fait, REACH laisse de côté des petites bébêtes comme les intermédiaires de synthèse ou les polymères (matériaux à base de pétrole utilisés dans le textile par exemple), qui auraient des effets cancérigènes, et dont un rapport sénatorial sur l’amiante a demandé l’interdiction (26 octobre 2005).

En France, les cancers, dus en partie aux substances chimiques, ont augmenté de 1,5% par an entre 1980 et 2000, et de 63% sur 20 ans, d’après l’Inserm [2]. La Commission européenne estime que Reach permettrait d’éviter de 2200 à 4400 cas de cancer chaque année en Europe et d’économiser 30 milliards d’euros en dépenses de santé d’ici à 30 ans. Mais la partie n’est pas finie pour REACH. Un conseil extraordinaire des ministres européens de l’Industrie se tiendra le 19 décembre, afin de tenter d’obtenir un accord. Rendez-vous dans quelques jours pour la prolongation.


REACH : le mode d’emploi

Le projet de directive REACH, censé être appliqué à partir de 2007, vise à instaurer sur une durée de 11 ans un système d’enregistrement de 30 000 substances (sur les 100 000 existantes) fabriquées ou importées dans l’UE en quantité supérieure à une tonne par an. Le tout sera géré par une agence basée à Helsinki (Finlande). Les substances chimiques produites à plus de 100 tonnes par an devront être enregistrées durant les trois premières années, tout comme les molécules cancérigènes et celles perturbant la reproduction. Les 20 000 substances à moins de 100 tonnes par an ne nécessiteront que des informations allégées.

[1] Union des industries chimiques françaises

[2] Etat des lieux du cancer en France (Bulletin du 21/10/03) - Institut de veille sanitaire

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