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29-01-2009

Mike Davis « Privilégier l’espace public et le recyclage »

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Le sociologue américain arpente les villes depuis quarante ans. Aujourd’hui, alors qu’elles sont devenues moteurs dans le réchauffement climatique, il appelle à une révolution urbaine globale.
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Ethnologue et historien, Mike Davis est né aux Etats-Unis en 1946. Il travaille sur les problèmes d’urbanisme et d’environnement depuis les années 1980. L’auteur de City of Quartz, l’ouvrage qui l’a rendu célèbre en 1990, fait le point sur l’état du monde : élections américaines, écologie, villes du futur, projections énergétiques… Nous l’avons rencontré dans ses quartiers de San Diego en Californie.

Obama est désormais le président de la première puissance mondiale. Est-ce l’homme de la situation ?

Je ne pense pas qu’il puisse faire de miracles. Lors de la campagne, aucun des deux candidats n’a répondu aux inquiétudes de la population américaine  : que va-t-il advenir des emplois ? A quel point la crise peut-elle s’aggraver ? Quelles sont les mesures d’urgence à envisager ? Obama n’a pas parlé des faiblesses du système économique comme les conséquences des faillites bancaires sur le crédit, le déclin des constructeurs automobiles, l’effondrement des finances publiques ou l’ébranlement financier de General Electric.

Son programme comporte toutefois des avancées sociales et environnementales.

Obama propose de relancer l’utilisation du charbon dans l’industrie via une technologie « propre », le nucléaire et l’armement, mais il élude la guerre contre la pauvreté. Peut-être s’agit-il d’une tactique politique qui évoluera avec le temps. C’est un homme modéré et prudent. Mais une partie de son cabinet est composée de républicains purs et durs. Et je crains que, sous leur pression, il ne doive tailler dans les budgets pour réduire la dette nationale.

Prenons un peu de hauteur, quel est votre point de vue sur l’état écologique de la planète ?

Le monde que nous avons habité pendant les 12 000 dernières années a disparu. La Commission de stratigraphie de la Société géologique de Londres, qui mesure l’échelle des époques, l’a enfin admis. Nous sommes sortis de l’holocène, période stable et propice à l’agriculture, pour entrer dans l’anthropocène, caractérisée par la modification significative du paysage par l’homme. Cela entraîne l’acidification des océans, la destruction du milieu naturel et une énorme production de déchets en tous genres. L’anthropocène se caractérisera par la tendance au réchauffement et par une forte instabilité environnementale.

Quel sera, selon vous, l’impact des nouveaux programmes d’économies d’énergie et d’énergies propres ?

Les efforts mondiaux pour réduire les émissions de gaz à effet de serre vont lentement être mis au placard. En revanche, nous allons accélérer les investissements d’adaptation sélective destinés aux passagers de première classe de la Terre. Nous nous dirigeons vers un oasis vert de prospérité, isolé et maintenu à l’écart d’une planète malade. Regardez autour de vous ! Partout, les énergies propres sont mises de côté. Les Italiens et la Pologne augmentent leurs émissions. Les Allemands veulent accroître leur seuil de pollution et viennent d’ouvrir quatre nouvelles usines à charbon. La Chine en ouvre deux nouvelles par semaine. Au cours de la prochaine génération, il est prévu que la consommation totale de carburants fossiles progresse d’au moins 55 %. Les accords de Kyoto n’ont rien donné. Et grâce à Bush, nous avons perdu dix ans.

Vous n’êtes décidément pas optimiste. Comment agir alors ?

Les villes sont les causes principales du réchauffement planétaire. Plus d’1 milliard de personnes vivent actuellement dans des taudis. Et leur nombre devrait doubler d’ici à 2030. Avec l’explosion démographique, la population urbaine va s’accroître de 3 milliards d’individus dans les quarante prochaines années, dont 90 % vivront dans des pays pauvres et des bidonvilles. La question est donc de savoir si nous sommes en mesure de construire des villes capables de réduire au maximum leur consommation énergétique. Aujourd’hui, les « villes vertes » sont trop focalisées sur le design ou la technologie. L’important n’est pas de savoir si une ville scandinave ou une villa de star laisse une empreinte écologique nulle. La seule manière de résoudre la quadrature du cercle entre

les limites de notre habitat et un cadre de vie décent, consiste à privilégier l’espace public, l’économie et le recyclage. Voilà les clés !

C’est-à-dire ?

Il faut d’urgence restaurer les espaces publics. Pour cela, nous n’avons d’autre choix que de multiplier les infrastructures comme les bibliothèques, les stades, les jardins ou les théâtres. Il faut transférer les technologies écologiques vers le Tiers Monde et les adapter aux réalités de chaque pays. Vous savez, dans les villes pauvres, les gens ont l’habitude de construire leur habitation eux-mêmes. Il faut les aider à adapter leur habitat à ce nouvel environnement en s’inspirant de l’architecture traditionnelle dont nous avons beaucoup à apprendre.

Vous dites qu’il faut revoir radicalement notre rapport à la consommation. Prôneriez-vous un retour à la bougie ?

La consommation effrénée est une addiction mortelle. Elle nous pousse à nous débarrasser de déchets considérables dont nous ne savons que faire et à polluer tragiquement notre environnement. Je me souviens de l’après-guerre et des périodes de pénurie. Il y avait tout un mouvement, baptisé « la consommation rationnelle », fondé sur le recyclage et l’économie. Prendre des autostoppeurs était presque devenu un devoir civique tant l’essence était rare. On cultivait son bout de jardin. J’aimerais croire que la crise que nous traversons nous ramènera vers ce modèle.


Bibliographie

- Exploration du destin urbain et social de Los Angeles (La Découverte,1990).

- Plongée dans de nouvelles formes de pauvreté urbaine et massive (La Découverte, 2006).

- Visite guidée des enclaves pour riches fortunes (Les Prairies ordinaires,2008).

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