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23-11-2006
Mots clés
Consommation
France
Monde

Il faut sauver le soldat yaourt !

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Les trains rouleraient-ils plus vite s'ils chantaient la Marseillaise ? Oui, jurent les partisans du patriotisme économique.
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Juillet 2005. La rumeur d’une offre publique d’achat du géant états-unien Pepsico (Pepsi Cola, Tropicana, Gatorade etc.) sur Danone, le roi du yaourt français, enfle au fil de l’été. L’heure est grave. Au point que le Premier ministre Dominique de Villepin monte en première ligne au nom du "patriotisme économique".

Depuis cette histoire, le moindre orteil étranger posé dans l‘Hexagone suscite une levée de bouclier. L’indien Mittal veut avaler Arcelor ? Il faut sauver la sidérurgie européenne, entonnent les gouvernements belge, luxembourgeois et surtout français. Thierry Breton, le ministre de l’économie, en rajoute sur le mode : "moi vivant, le parti de l’étranger ne passera pas". Vaines envolées, puisque Mittal et Arcelor ont fini par fusionner... avec la bénédiction de Matignon et de l’Elysée.

Pas touche aux bijoux de famille

Février 2006 : l’italien Enel dévoile son plan d’absorption de Suez et fait dégainer le gouvernement français. Gaz de France est sommé en haut lieu de voler au secours de son concurrent privé. Le Premier ministre prend même symboliquement par la main les pédégés de GDF et de Suez face aux caméras de télé. "Pas touche au domaine de l’énergie !"

Dernière bouffée patriotique en date, la SNCF et la région Ile-de-France confient au canadien Bombardier la fabrication de 172 rames pour son réseau francilien. Le champion national Alstom voit filer un contrat de 1,85 milliard d’euros. La SNCF a beau arguer du prix 10 % moins cher des Nord-Américains, rien n’y fait. Elle est soupçonnée de brader l’intérêt national.

Stop ! "Comme disait Romain Gary, le patriotisme c’est l’amour des siens, le nationalisme c’est la haine des autres", proteste le député UMP du Tarn, Bernard Carayon. Lui, l’inventeur du concept de patriotisme économique [1] récuse vigoureusement l’étiquette de franchouillard. "Il n’y a qu’en France qu’on se pose la question de savoir si l’on doit défendre nos grandes entreprises. Chinois et Américains n’ont pas ces pudeurs, ils y vont franchement."

L’universitaire Olivier Pastré, auteur d’un livre sur le "patriotisme économique efficace" [2], cite deux cas qui montrent l’étendue du savoir-faire made in USA en la matière. D’abord, le refus opposé au premier opérateur portuaire mondial, originaire de Dubaï, de racheter neuf ports américains. Et puis le blocage du rachat du pétrolier Unocal par le chinois Cnooc. "Ces deux exemples rappellent que les Etats-Unis ont le patriotisme à fleur de peau dès lors qu’on titille leurs secteurs jugés stratégiques."

Reste à justifier le caractère "stratégique" du yaourt pour l’économie française. "Tout sauf évident", ironise Olivier Pastré. Défense, aéronautique civile, énergie, pharmacie : pour Bernard Carayon, les marchés stratégiques sont ceux qui ne relèvent pas strictement des critères de performance et de rentabilité de l’économie de marché. "Si les prix des médicaments étaient fixés en fonction de la seule loi de l’offre et de la demande, cela favoriserait automatiquement une poignée de multinationales étrangères avec des conséquences dramatiques sur les comptes de la Sécurité sociale", assure le député.

Colbert exhumé du formol

Peut-être, mais en quel nom le français Sanofi-Aventis, n°3 mondial derrière l’états-unien Pfizer et le britannique Glaxo Smithkline, se soucierait-t-il davantage du portefeuille des assurés sociaux les plus modestes que ses concurrents anglo-saxons ? "On prétend défendre des intérêts nationaux alors que le capital n’a jamais été aussi mobile et transnational. Ne confondons pas l’intérêt particulier des actionnaires d’Alstom, par exemple, avec celui des consommateurs", objecte l’économiste Pascal Salin. Au-delà des controverses idéologiques, Olivier Pastré en appelle aux mannes de Colbert, dont il vante la méthode. "Le grand argentier de Louis XIV avait compris la nécessité d’un Etat fort pour impulser et créer les conditions d’une politique industrielle efficace", assure l’universitaire, pour qui la France ne fait pas le poids face au tandem sino-américain. Il plaide ainsi pour la formation d’un "noyau dur institutionnel" détenant 40 % du capital des grandes entreprises.

En clair, l’Etat créerait une "instance publique" à partir d’organismes finan-ciers existants (Caisse des dépôts, Fonds de réserve des retraites). Dotée d’une centaine de milliards d’euros, elle pourrait renforcer et garantir l’indépendance des grandes sociétés françaises via des recapitalisations massives. Tout en parant au plus pressé en cas de coup dur. Sur le modèle de la "nationalisation temporaire" d’Alstom, sauvée in extremis de la faillite en 2004 par le gouvernement.

[1] Le patriotisme économique, Ed. du Rocher, 2006.

[2] La méthode Colbert ou le patriotisme économique efficace, Ed. Perrin, 2006.

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