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25-09-2014
Mots clés
Transports
Automobile
France

Frédéric Mazzella, le covoiturage dans le siège du conducteur

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Frédéric Mazzella, le covoiturage dans le siège du conducteur
(Crédit photo : frédéric stucin pour « terra eco »)
 
Il y a moins de dix ans, cet inventeur compulsif lançait Covoiturage.fr, l’ancêtre de Blablacar. Aujourd’hui, la boîte est en plein boom et vient de procéder à une levée de fonds record. Tout sauf un hasard pour son patron, qui pilote l’aventure en businessman avisé.
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ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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Fermez les yeux. Imaginez une start-up dans la Silicon Valley, au tournant des années 2000. Vous voyez le baby-foot, la borne d’arcade, l’open space où l’on s’interpelle dans toutes les langues ? La cuisine avec des canapés et des coussins aux imprimés « superhéros » ? Vous êtes en réalité quinze ans plus tard, au siège de Blablacar, dans le IXe arrondissement de Paris. Il ne manque au cliché ni la déco flashy, ni les stickers qui décrivent les valeurs du lieu : « fun and serious » (« drôle et sérieux »), « learn, fail, succeed » (« apprends, échoue, réussis »), « the member is the boss » (« l’usager est le boss »). Ni, surtout, le jeune patron, affable et que tous tutoient. Frédéric Mazzella a un visage poupin, une chemise sage et des phrases sincères, mais répétées interview après interview. Le début de l’aventure, il le déroule comme dans l’onglet du site de Blablacar « Notre success story » : en forme d’épiphanie.

Noël 2003, le jeune ingénieur habite Paris et est attendu chez ses parents, en Vendée, mais les trains sont complets. « Il en restait un à 5 h 13 à Montparnasse, sur un strapontin, à 110 euros : le truc que personne ne veut », s’amuse le pédégé. En désespoir de cause, il appelle sa sœur, qui habite à Rouen et l’attrape au vol. « Sur la route, je me suis rendu compte que toutes les voitures étaient vides. Je me suis dit : “ Si je donne 20 ou 30 euros au gars d’à côté avec sa voiture vide, ça va l’intéresser. ” Après j’ai relié ça au fait que je faisais déjà du covoiturage quand j’étais aux Etats-Unis… » Ajoutez une connaissance pointue des technologies issues du Net acquise outre-Atlantique, et la saga Covoiturage.fr – qui deviendra Blablacar en 2013 – peut commencer.

Dix ans après, le bébé se porte bien : il est le leader incontesté du secteur en France – avec ses 10 millions de membres –, comme en Europe. L’entreprise de 130 salariés a levé 73 millions d’euros au début du mois de juillet. Et Frédéric Mazzella compte continuer à étendre sa toile : après l’Allemagne, la Russie et la Pologne, l’Inde et le Brésil s’annoncent à la prochaine bretelle, à coups de rachats des acteurs locaux du covoiturage.

Trip-hop pour les « Inrocks »

Régulièrement, les utilisateurs de la première heure se plaignent de l’esprit perdu de Blablacar ou de son passage au payant, en 2012. Il y a là un malentendu. Frédéric Mazzella n’a jamais été un hippie, dont la créature serait tombée entre les mains de grands méchants financiers. Il se souvient qu’étudiant la gratuité de l’auto-stop le gênait. Il ne sait pas s’il est un « patron social », ni même ce que c’est vraiment…

Son parcours, c’est celui d’un inventeur-ingénieur-entrepreneur très doué. Enfant, il joue au touche-à-tout et au Géo Trouvetou. Sur sa liste d’inventions, on trouve une tapette à souris qui épargne les bestioles et un parapluie sans les mains. Des trouvailles envoyées à Science & Vie Junior, mais jamais publiées, car « les idées n’étaient pas assez bonnes », dit-il. Musicien, il quitte la Vendée pour Paris, à 16 ans, pour rejoindre le Conservatoire de piano. Il entre en prépa au lycée Henri-IV, puis à l’Ecole normale supérieure, en physique. Il propose deux de ses compositions trip-hop au concours de jeunes talents des Inrockuptibles. Une fois parmi les 50 finalistes, il se promet de laisser tomber les maths s’il fait partie des 20 gagnants. C’est un échec. Or, pour Frédéric Mazzella, on juge de la qualité d’un projet à sa réussite.

Après l’université de Stanford, aux Etats-Unis, c’est à la Nasa qu’il met à l’épreuve son besoin de connaissances. « Le jeu, c’est de se fixer un objectif suffisamment lointain pour qu’il nous occupe plusieurs années. Et entre les deux, il faut être créatif. » De retour en France, il lui faut créer son entreprise. « Des idées, j’en ai eu 25 ! » Il cite un système de lettres de réclamation contre les compagnies aériennes en cas de surbooking sans compensation, un accélérateur de roues d’avion pour économiser la gomme des pneus, un projet de cabine à UV intégrée aux ordis des secrétaires ! Le point commun avec le covoiturage ? Il est soudain hésitant. « Peut-être le gaspillage de temps, d’énergie, d’argent. » Frédéric Mazzella a senti le bon filon. Lui-même n’a pas d’auto et covoiture, mais en un sens le service novateur qu’il propose le dépasse. L’« alteréconomie », très peu pour lui. Les bénéfices écologiques de Blablacar ? Il s’en réjouit, mais ce n’est pas ce que l’entreprise met en avant.

Social et portefeuille

Il vante plutôt l’aspect social du covoiturage : « Quand on discute pendant des heures avec des gens qui ne sont pas dans nos cercles familiaux, amicaux ou professionnels – hors de ces cercles, on ne rencontre plus grand monde –, on se rend compte que Thierry, prof de maths, est super sympa. » Mais ne peut s’empêcher d’insister sur le portefeuille : « Ça permet de faire des économies massives. » Ce bourreau de travail, Antonin Léonard, cofondateur de Ouishare, think tank sur la consommation collaborative, le côtoie depuis trois ans. « Il sait exactement où il va, il a une vision et des convictions. » Il attire cependant l’attention sur le futur de Blablacar. « Il n’y a pas 50 issues possibles : ou l’entreprise est rachetée ou il y a une introduction en Bourse. Nous, on plaide pour un rachat par les utilisateurs. » Où Frédéric Mazzella sera-t-il dans cinq ans ? Il botte en touche. « J’ai dix options. Plus la boîte grandit, plus j’ai de pistes à explorer. » En attendant, il a trouvé sa place dans le trafic. —

En dates

1976 Naissance à Nantes (Loire-Atlantique)

1992 Quitte la Vendée pour Paris, pour entrer au Conservatoire de piano

2004 Imagine Covoiturage.fr

Avril 2011 Covoiturage.fr dépasse le million de membres en France

Juillet 2014 Blablacar lève 100 millions de dollars (73 millions d’euros)

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  • En même temps on va pas lui demander de s’appauvrir, en France les gens n’aiment pas les personnes qui réussissent et puis pour l’histoire des pneus citée plus haut, je pense que blablacar a une assurance pour ça.

    21.05 à 13h49 - Répondre - Alerter
  • Pour nous c’est un vrai exemple d’inspiration dans l’univers des start-up et entreprises.
    Certes on peut ne pas être toujours d’accord sur certaines idées, mais il faut reconnaitre que les entrepreneurs font bouger les lignes dans la société. Si on veut voir évoluer les choses, il faudra des investisseurs. N’en déplaise à certains ...

    8.12 à 12h07 - Répondre - Alerter
  • Bonjour,
    Je pense qu’a partir du moment ou il fera payer le service, il risque d’être obligé de partager les responsabilité en cas d’accident. imaginons un instant qu’un chauffeur bla bla car n’ai pas installé les pneus hiver obligatoire et qu’il ai un accident, le bénéficiaire de la "location" pourrait très bien se retourner contre lui.

    15.10 à 16h17 - Répondre - Alerter
  • Il se moque du monde ! Les gens vont payer car il a mit en place une plateforme sur internet pour faciliter les échanges et on va payer pour ça ! Il y a d’autres moyens de trouver du covoiturage, c’est du mépris de dire qu’il n’est pas un patron social mais que le social on l’a dans le contact avec les autres, débile ! Mon mari est chauffeur privé à nice et les clients ne paient que la course, ils ne vont pas payer en plus la plateforme sur laquelle ils réservent !!

    23.06 à 07h59 - Répondre - Alerter
  • Lire en complément les deux articles suivants dont les liens Internet sont indiqués sur la page BlaBlaCar publiée sur Wikipédia.

    ↑ Blablacar, le covoiturage tué par la finance et l’appât du gain, Mediapart, 20 juin 2014
    ↑ Covoiturage : Le vrai visage du PDG de Blablacar décrypté dans une interview, Mediapart, 11 juillet 2014

    12.09 à 07h56 - Répondre - Alerter
  • Quel est son business modèle ? pas d’outil de production, pas d’employé ? c’est le conducteur de la voiture qui assume l’outil et l’employé c’est le passager et il paye de surcroît ... est ce encore de l’économie collaborative ?

    10.09 à 10h03 - Répondre - Alerter
  • Vous n’aviez pas été racheté par la SNCF ?

    9.09 à 14h39 - Répondre - Alerter
  • Les précédents articles de ce site sur Blablacar m’avaient semblé incompréhensible. Ils étaient totalement à charge. Et surtout, il y avait un écart étonnant entre la description faite par vos journalistes et ce que j’ai vécu moi-même en tant utilisatrice sur des trajets ponctuels en 2015 (conductrice). Votre grande critique était alors (et reste apparemment) que le service serait "payant". Sans plus de nuance ni d’explication. Or je n’avais pas remarqué que moi ou les covoitureurs qui m’ont accompagnée avions versé quoi que ce soit à Blablacar pour l’utilisation du service...

    Et voilà que vous adoptez aujourd’hui un ton très gentil voire louangeur. Plus trace des accusations de dévoyer l’esprit de partage ou de tuer les autres sites de covoiturage, notamment. Vu votre virulence passée, un peu de distance à l’égard de ce monsieur aurait rendu le revirement moins brutal !

    9.09 à 14h12 - Répondre - Alerter
  • J’ai toujours rempli ma voiture d’auto-stoppeurs, gratuitement bien sûr. Tout n’est pas marchandise, tout n’est pas fric. Le promoteur de Covoiturage.fr devenu BlaBlaCar achète-t-il l’amour, l’amitié, la solidarité, et j’en passe ? Peut-être…

    Les stoppeurs se font rares depuis quelques années, principalement grâce à des choses comme BlaBlaCar qui s’immiscent dans un processus où l’on n’avait pas besoin d’eux. Très "tendance", s’insérer dans une relation où l’on est à l’origine inutile et en rackettant les partenaires. Un peu arnaque, non ?

    5.06 à 22h27 - Répondre - Alerter
  • Un peu moins de promo. Renseignez-vous auprès des clients

    26.05 à 00h35 - Répondre - Alerter
  • n’y aurait il rien d’intéressant à entendre dans les échanges entre ces gens qui ne se connaissent pas ?

    25.04 à 15h12 - Répondre - Alerter
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