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29-06-2011
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Société
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Ecologie : faut-il parier sur les stars ?

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Ecologie : faut-il parier sur les stars ?
(Crédit photo : Niko - Niviere - Le Floch - Sipa)
 
Hypocrisie générale ? Pas en avant salutaire ? Doit-on se réjouir quand les people passent au vert ?
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ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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« Le réchauffement planétaire s’intensifie, alors c’est maintenant qu’il faut s’impliquer. C’est très bien vu de le faire tout de suite. » En 2009, le film Brüno de Sacha Baron Cohen met en scène une star de la mode autrichienne en quête de « grande cause » à défendre. Le Darfour ? Déjà pris par George Clooney. Le sida ? C’est Bono. Le changement climatique ? Tout le monde s’y met. Du coup, Brüno se branche sur le Moyen-Orient. La scène dure deux minutes mais elle en dit long sur les combats des VIP. Or, aujourd’hui, la cause du changement climatique cartonne au box-office. En témoigne la mobilisation lors du Sommet onusien de Copenhague en 2009 où s’enchaînaient chansons et prises de parole définitives.

Le must des potins verts

Depuis 2007, le site Ecorazzi collecte le nec plus ultra du potin vert et on assiste à un déferlement lourdingue de communiqués sur l’engagement pro-animaux du chanteur pour ados Justin Bieber, la bague de mariage made in Scotland de Kate et William ou le régime végétalien de Natalie Portman. « Au début, on s’est dit que si des personnalités s’engageaient, elles avaient intérêt à le faire en connaissance de cause, c’est-à-dire en appliquant à leur vie personnelle les préceptes qu’elles défendaient publiquement », explique Rebecca Carter, cofondatrice du site. Mais la vie de star n’est-elle pas incompatible avec la préservation de la planète ? « Non, ce serait réducteur de penser ça. Désormais, la mode bio et les hybrides sont “ in ”, et les célébrités aident à répandre ce message en verdissant leurs vies, renchérit l’autre cofondateur, Michael d’Estries. En mettant les projecteurs sur leurs efforts, on espère amener le message écologique auprès du grand public. »

Et ça marche ? Quel est l’impact d’une star sur le comportement de ses fans ? Ou sur les ventes du produit eco-friendly qu’elle utilise ? « Impossible à mesurer », assure Jean-Marc Lehu, professeur de communication à la Sorbonne. Côté marques, en tout cas, on se frotte les mains. Ainsi, Toyota quand elle a sorti la Prius au début des années 2000. C’était la première hybride au monde et bien que particulièrement moche, elle est instantanément devenue la voiture au volant de laquelle il fallait arpenter Hollywood Boulevard.

En France, la marque n’a guère eu besoin de faire de pub : elle a simplement arrosé des « grands ambassadeurs », offrant quelques voitures à Marion Cotillard, Guillaume Canet ou Thierry Lhermitte. Sans oublier les scientifiques (Joël de Rosnay, Pierre-Gilles de Gennes), les sportifs (Alain Bernard) ou les VIP de l’écologie (Yann Arthus-Bertrand).

Mais revenons à la question : une star bio, n’est-ce pas un oxymore ? Serait-on en pleine dissonance cognitive, comme dirait l’autre ? « Leur métier, c’est de feindre. C’est tout », rappelle Jean-Marc Lehu. « Quels que soient les efforts qu’ils font, vous aurez toujours un doute. » Souvenez-vous, à la fin des années 1990, les mannequins stars posaient dans le plus simple appareil pour l’association de défense des animaux PETA et contre le port de fourrure. Dix ans plus tard, les mêmes tops participaient à un shooting pour la marque de vison Blackglama !

« En s’engageant, la star a-t-elle changé ses process ? Dans une scène, un acteur a-t-il prescrit un écogeste ? En gros, il faudrait labelliser les people, entre people écolo et people pipeau ! », s’amuse Alice Audouin, spécialiste du développement durable chez Havas. Chiche ? A quand la police des « green people » ? Elle aurait fort à faire. Cas d’école, les Trophées de l’écologie, organisés en juin à Paris. Sponsorisé par des limousines, l’événement ressemble à un monstre de greenwashing propre à semer la confusion dans les esprits. On y trouve le patron du WWF, la navigatrice Maud Fontenoy ou l’animateur Stéphane Bern, et on y récompense l’audacieux concept d’« écologie plaisir ».

« Modèle de surconsommation »

Etre une star n’est-il pas antinomique avec les notions de sobriété et de simplicité ? « Leur problème, c’est que les stars projettent l’idée suivante : pour être quelqu’un d’intéressant, il faut avoir beaucoup d’argent. Or, comme tous ceux qui gagnent énormément d’argent, elles véhiculent un modèle culturel de surconsommation », argue Hervé Kempf, journaliste au Monde et auteur de Comment les riches détruisent la planète. Habiter dans des « mansions » bardées de panneaux solaires ne changerait donc rien au schmilblick. « C’est très bien si les stars mangent bio et roulent en vélo mais cela ne suffit pas. C’est leur mode de vie qu’elles doivent transformer. » Mais le pire, c’est qu’elles inspirent les masses. Même quand elles sont sincèrement préoccupées par la préservation de l’environnement. « DiCaprio est sans doute quelqu’un de bien mais s’il gagne plusieurs millions de dollars par film, il continue de projeter un modèle incompatible avec l’impérieuse nécessité de réduire la consommation matérielle », poursuit Hervé Kempf.

« C’est difficile pour les stars, assure Sébastien Kopp, cofondateur des baskets bio Veja. Elles évoluent dans un système où tout est à portée de main. Les marques leur offrent sans cesse des produits dont elles doivent changer tous les jours. » Prisonnières des flux d’informations, elles ne sont plus autorisées à briser l’image qu’elles ont créée. « Etre people aujourd’hui, c’est une astreinte, il faut être raccord 24 heures sur 24 », précise Jean-Marc Lehu.

Une armée de coachs

Et qui leur a dit de s’engouffrer dans le filon vert ? L’air du temps ! Certains y viennent de leur propre chef, mais une majorité est conseillée par une armée de coachs. Chez Artmédia, la principale agence de stars françaises, on confirme qu’« avant, vous mettiez en avant la famille, désormais vous insistez aussi sur l’origine bio de vos légumes ». Autre stratégie, on laisse gentiment le voile se soulever et on feint l’évidence. « L’écologie ne doit pas forcément être revendiquée. On capitalise en silence et on récupère à terme. » Comme l’ont fait Bixente Lizarazu et Marion Cotillard. Leurs engagements respectifs étaient antérieurs à leur célébrité interstellaire, ce qui ajoute à la sincérité de leur démarche.

« Je crois à leur capacité de prescription quand ils sont sur le terrain », précise Alice Audouin. « Surfeurs, alpinistes, navigateurs : ils sont témoins de la modification du climat et de la dégradation de la nature. C’est en cela qu’ils apparaissent sincères. Quand leur notoriété leur permet d’être légitimement entendus. » Pour la spécialiste de la com, la cohérence, c’est autre chose : « La plus grande star peut avoir 200 paires de pompes et vouloir lutter contre la pauvreté dans le monde. »

« Ce qui est intéressant, c’est l’évolution, assure Sébastien Kopp. Il y a quinze ans Schwarzenegger roulait en Hummer, aujourd’hui, il le fait en hybride. Dans le fond, cela raconte bien l’évolution de la société. » Ce que ces VIP apportent, avant toute chose, c’est la dissémination du dossier dans la sphère publique. La preuve, on en parle. —

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Journaliste errant dans les sujets environnementaux depuis treize ans. A Libération, mais de plus en plus ailleurs, s’essayant à d’autres modes d’écriture (Arte, France Inter, Terra of course, ...). Il y a deux ans, elle a donné naissance (avec Eric Blanchet) à Bridget Kyoto, un double déjanté qui offre chaque semaine une Minute nécessaire sur Internet.

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  • IL faut rester sérieux si nous voulons êtres pris au sérieux. Une star peut très bien dire qu’il soutien l’écologie mais elle le fait personnellement et non pour en faire sa pub. Il en est de même pour une firme qui au surplus doit se comporter en conséquence. L’écologie est dans un tournant très important vu les dangers qui pèsent sur la planète.

    30.12 à 17h51 - Répondre - Alerter
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