Cyril Di Méo, La Face cachée de la décroissance, Une réelle solution face à la crise écologique ? L’Harmattan, 202 pages, 17,50 euros.
Un mot d’abord des accusés. Pour ceux qui n’ont pas lu Terra Ecomica n° 27, les décroissants sont ceux qui prônent une réduction généralisée du train de vie des Occidentaux : moins de consommation, moins de voyages, moins d’objets, moins de production... Non pour le plaisir de se livrer aux tourments de l’ascèse, mais pour sauver notre planète, menacée d’agonie par la surconsommation des pays riches. Radical, difficile à généraliser (l’abstinence n’étant pas la position sexuelle la plus populaire...), mais a priori efficace. Pas pour Cyril Di Méo. On ne taxera pourtant pas ce jeune prof d’économie d’anti-écologisme primaire : c’est un élu Vert d’Aix-en-Provence. Sa Face cachée de la décroissance en est d’autant plus intéressante et constructive.
Nos amis va-nu-pieds
Que reproche-t-il aux décroissants ? Un anti-humanisme mal recuit, qui ne verrait pas grand inconvénient, au fond, à ce que disparaissent les hommes - cette sale engeance, avide et pollueuse, qui fait du mal aux petits oiseaux. Dis comme ça, ça a l’air brutal, mais, selon l’auteur, derrière le discours de la décroissance se cache un malthusianisme de mauvais aloi. A cela s’ajoute un anti-scientisme primaire, doublé d’une vénération totalement artificielle pour les "sagesses ancestrales" et autres "traditions primitives" que la "Terre mère" recèlerait en son sein. Ce mode de vie "authentique" constituerait une sorte d’âge d’or que nos amis va-nu-pieds (Africains, Indiens...) auraient eu la bonne idée de conserver contre le méchant capitalisme. C’est dans les pages où il épingle ce tissu de clichés - très occidental - que Cyril Di Méo se montre le plus convaincant.Il l’est (un peu) moins quand il crie "au secours !" dès qu’un zeste de spiritualité est ajouté à la tambouille écologiste. En quoi les croyances et la foi sont-elles contraires au combat politique ? Pourquoi l’écologie ne pourrait-elle être respectable que dans un espace strictement laïcisé ? Croire en "autre chose de supérieur" est-il très différent que de croire en une philosophie, alors même que l’auteur revendique une vision de l’écologie "dépendante des représentations sociales" ? Reste que l’érudite Face cachée de la décroissance, si elle exige une attention soutenue, est portée par une saine envie de débat. Courageux.
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