Paris et Rome ont tranché : à situation d’urgence, mesure d’urgence. Nicolas Sarkozy et Silvio Berlusconi ont donc officiellement demandé à Bruxelles de rétablir temporairement les contrôles aux frontières intérieures de l’espace Schengen (1). L’objectif : tenter de contrer l’afflux de migrants en provenance de Tunisie par des mesures d’exception. En filigrane, la France manifeste par cette requête sa volonté de répondre au supposé laxisme de l’Italie, coupable de jouer les morceaux de gruyère le long de ses frontières.
Le code des frontières de Schengen répond en partie à la demande. Il stipule en effet qu’« en cas de menace grave pour l’ordre public et la sécurité intérieure, un pays de l’UE peut exceptionnellement réintroduire le contrôle à ses frontières intérieures pour une période limitée de maximum trente jours ». On laissera chacun juger du caractère de gravité de la situation au sud de l’Europe. Du reste, Bruxelles rendra sa copie le 4 mai prochain.
Mais au delà de cette appréciation, au delà de la querelle anecdotique de voisinage entre Paris et Rome, c’est bien la cohabitation géographique, économique, philosophique même de deux mondes – l’Afrique et l’Europe - qui pose question. La vision d’un vieux continent recroquevillé sur lui même, refusant l’asile et jaloux de ses ressources qu’il fait transiter des quatre coins du globe pour son seul confort, est impossible à justifier.
La demande franco-italienne a finalement un mérite. Elle augure des grands et difficiles débats de civilisation qui nous attendent. L’Europe peut certes édifier plus haut ses murs et cacher ainsi les flots de réfugiés économiques, politiques et climatiques que nos propres systèmes génèrent. La question est jusqu’à quand ?
(1) La convention de Schengen est effective depuis 1995. Elle établit que les contrôles des individus sont supprimés à l’intérieur de l’espace Schengen (22 pays de l’Union européenne), et qu’ils sont renforcés aux frontières extérieures.
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