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Aigle (presque) droit dans ses bottes

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Aigle (presque) droit dans ses bottes
 
Le fabricant a enfilé ses plus belles bottes en caoutchouc pour promouvoir son image environnementale. Il réalise ses modèles en France, mais reste flou sur l’origine de son hévéa.
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Oubliez les longues jambes de Betty Page galbées dans leurs bas pétrolés. Le temps est venu de réconcilier glamour et nature. La fille in, c’est la fille aux boues nylon ! Voici le message de la dernière campagne de publicité d’Aigle pour ses bottes en caoutchouc.

Stratégie

Puisque même les stars en portent pour faire leur shopping, Aigle, qui fabrique des bottes depuis cent cinquante ans, surfe sur la vague. Le visuel a été publié dans une trentaine de magazines féminins, depuis le mois de septembre, saison pluvieuse oblige. « Avec cette prise de vue en studio, on utilise les codes de la mode. La gadoue, ludique, devient féminine », décrypte Florence Bellisson, directrice de création à Euro-RSCG, qui a orchestré la campagne. L’agence est aussi à l’origine du slogan de la marque : « Pour la réintroduction de l’homme dans la nature ». « Notre philosophie part du constat que ces deux entités se sont éloignées et qu’il faut les reconnecter », précise Marie-Andrée Jézéquel, directrice de la communication chez Aigle.

Justement, la fashion victime se demande jusqu’où elle va se reconnecter en dépensant ses deniers. « 30 % de notre gamme sportswear est en coton ou laine bio ou bien en polyester recyclé », précise Marie-Andrée Jézéquel. Vertueux, mais pas totalement. L’ensemble de la confection est sous-traitée dans des pays de l’Est, en Turquie et en Asie. Et nos bottes de starlette ? C’est mieux : 80 % des modèles vendus sont fabriqués quasi artisanalement à l’usine de Châtellerault, dans la Vienne. Chaque année, 750 tonnes de caoutchouc naturel y débarquent afin de confectionner les 700 000 paires de bottes, représentant environ 25 % du chiffre d’affaires de la société.

Cas d’école

Ça se corse quand on se penche sur le caoutchouc. D’où vient-il ? « D’Asie et d’Afrique, en fonction du marché », répond-on, en invoquant le secret industriel dans un secteur « très concurrentiel ». Sous couvert d’anonymat, l’intermédiaire basé aux Pays-Bas, qui traite 180 000 tonnes de caoutchouc par an et fournit, entre autres, Aigle, précise : « Les usiniers auprès desquels nous nous fournissons ont tous des chartes de bonne conduite et nous n’avons jamais vu d’enfants au travail dans les plantations », explique-t-il. Quant à connaître le revenu moyen des travailleurs des exploitations concernées, cela « relève des affaires internes des entreprises ». « Ces sociétés d’investissement, propriétaires des plantations, sont cotées en Bourse et présentent, de ce fait, des garanties », invoque-t-il pour finir. Des promesses insuffisantes pour les ONG qui dénoncent des cas d’expropriation de communautés locales, notamment au Cambodge, au profit de certaines sociétés qui plantent des hévéas.

Dans l’ignorance des noms des fournisseurs d’Aigle, les questions demeurent. Dommage, car cette filière – une vingtaine de pays cultivateurs et 10 millions d’hectares d’hévéas dans le monde – est cruciale. Elle fait vivre 30 millions de personnes. « 80 % du caoutchouc naturel est récolté par de petits paysans à la tête de 2 hectares en moyenne, ce qui leur apporte un revenu régulier », explique Jérôme Sainte-Beuve, spécialiste de l’hévéa au Cirad (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement). En outre, les plantations d’hévéas ne seraient plus à l’origine du déboisement de forêts primaires, contrairement aux palmiers à huile. Mieux : les chercheurs du Cirad militent pour la reconnaissance de cet arbre comme puits de carbone. « Non seulement il capte du CO2 par photosynthèse, mais en plus, il produit un polymère, le latex », développe Jérôme Sainte-Beuve. La production d’une tonne de caoutchouc synthétique – à base de pétrole – émet 10 tonnes de CO2, alors qu’un arbre fabriquant une tonne de caoutchouc naturel en fixe 7 !

Verdict

Une seule solution pour que nos bottes vertes puissent fouler une gadoue responsable : passer au commerce équitable. Aigle affirme s’y intéresser sérieusement, mais attend que la qualité exigée du caoutchouc soit au rendez-vous. C’est encore loin ? —

L’AVIS DE L’EXPERT : 3/5

Stéphanie Gentilhomme, fondatrice de l’agence RendezVous RP et du collectif Publicitaires Eco-Socio-Innovants. « Le message manque d’une prise de risque sur le développement durable, alors qu’Aigle est une entreprise faisant de réels efforts. Elle aurait pu mieux faire en parlant, par exemple, de la durée et de la fin de vie de ses bottes en caoutchouc. Mais il faut reconnaître que les marques traditionnelles sont désavantagées par rapport à celles qui, aujourd’hui, construisent leur histoire sur le développement durable. C’est toute leur démarche industrielle qui doit être repensée. »

Photo : DR

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