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Victoire des sushis sur le thon
jeudi, 18 mars 2010
/ Hélène Duvigneau
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Les 150 États réunis à Doha pour la Cites, la conférence des espèces menacées, ont fini par trancher en faveur du "thon rouge as usual". Il continuera donc à être commercialisé comme si de rien n’était. Une victoire pour la "diplomatie du thon" japonaise.
Les rayons "thon" des supermarchés japonais ont encore de l’avenir : le Thunnus Thynnus, ou thon rouge atlantique, continuera à finir sa vie dans les sushis. Jeudi, les pays parties de la CITES, la Convention internationale sur le commerce des espèces sauvages menacées, ont finalement voté en grande majorité, (68 voix contre 20) contre l’inscription du thon rouge sur l’Annexe I de la CITES.
Cette dernière laissant le soin à l’ICCAT [1], qui gère la pêche en Atlantique et Méditerranée, de réfléchir sur le question. Pourtant, ladite ICCAT n’a pas brillé d’efficacité ces dernières années pour lutter contre la pêche illégale.
Peu importe, semble-t-il, pour les représentants japonais, arrivés en force à Doha, et qui n’ont cessé de marteler que "la CITES n’est pas le bon outil pour gérer les stocks de thon. Seule l’ICCAT peut décréter une suspension de la pêche et des exportations."
Avant le vote, ils répétaient aussi que le thon rouge n’est ni un lion, ni un tigre, ni encore moins un panda. Si l’espèce n’est pas menacée d’extinction, pourquoi diable, selon eux, aller l’inscrire à l’Annexe I de la CITES (Convention sur le commerce international des espèces sauvages menacées) qui interdirait son commerce au niveau mondial ?
Aiguisant leur argumentaire, jouant sur les pertes économiques qu’entraînerait une telle décision pour les pays méditerranéens, les délégués japonais ont réussi leur coup. Ils n’ont pas hésité à faire du porte à porte auprès des délégations pour rallier les hésitants. Chine, Canada, pays de la Ligue arabe, et même Grenade (Caraïbes), qui "craint pour sa sécurité alimentaire", ont donc rallié le Japon.
Malgré la baisse des quotas (13 500T cette année) et l’interdiction de la CICTA [2], en 2007, de pêcher des thons de moins de 30kg en Atlantique Est, les stocks ne sont en effet toujours pas reconstitués et l’effort de pêche actuel n’est pas soutenable, affirment les scientifiques. Conscient du problème, le Japon plaide pour une pêche mieux contrôlée, mais encore faut-il que toutes les prises soient déclarées, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.
Toujours est-il que l’industrie s’avère lucrative, avec un prix de base (autour des 40 $ le kg) capable de grimper jusqu’à 100 $, voire plus. En janvier, un thon de 232 kg a été vendu pour la coquette somme de 122 000 €. Et le thon d’embouche capturé vivant et engraissé en captivité, se vend deux fois le prix du thon congelé. Ce qui a fait dire au représentant de Monaco, au lendemain du vote : "Cette espèce n’est pas pêchée pour satisfaire les besoins alimentaires des populations mais pour alimenter un marché hautement spéculatif."
Autre élément important : la couleur rouge. « Elle rappelle la tache rouge sur fond blanc du drapeau japonais, un must dans le mélange des couleurs pour les Japonais », explique Patrick Terrien, chef de cuisine ayant enseigné au Japon. RIA Novosti compare même la viande de thon à la chaire de baleine : « Les tentatives des écologistes de restreindre le droit des Japonais à manger la viande de baleine sont accueillies au Japon comme une atteinte à leur culture, étrangère à la civilisation occidentale. Il y a quelques dizaines d’années, leur viande (...) figurait même dans le menu des repas des écoliers en tant que nourriture bon marché et nutritive. »
Anticipant une interdiction du commerce du thon, l’entreprise nippone Burimy s’était fait remarquer cette semaine en expliquant avoir réussi à faire naître les bébés thons en captivité. Son thon "qui ne porte pas atteinte à l’environnement" devra encore attendre avant de remplacer le fameux Thunnus Thynnus.
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Le blog de Sylvestre Huet Sciences²
L’Ifremer
Le site Enviro2b
RIA Novosti
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Marché aux poissons de Tsukiji, à Tokyo JPEG - 66.7 ko 450 x 300 pixels |