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Une poubelle à la mer
jeudi, 14 octobre 2004 / ponofob (illustration) , / David Solon /

Président de l’association des Amis de Terra eco Ancien directeur de la rédaction de Terra eco

Une petite entreprise exploite la vente de poubelles flottantes pour récupérer les déchets des bateaux de plaisance. Avant qu’ils ne finissent 20000 lieues sous les mers.

L’initiative est corse et date du milieu des années 1990. Ulcéré de voir les fonds marins souillés de déchets en tous genres, un groupe d’insulaires réfléchit au moyen de réduire le désastre. Le constat est brutal. 150 millions de déchets en Mer du Nord, plus de 80 millions dans le golfe de Gascogne, la plupart d’entre eux faits de plastique, et donc la certitude qu’ils auront une durée de vie d’environ 400 ans. Une situation qui met bien évidemment en danger l’ensemble de l’écosystème sous-marin. Afin d’endiguer le phénomène, une petite entreprise corse - Opérata - met au point avec l’aide de l’Agence française de l’innovation (Anvar), ce qu’elle baptise l’Obell. Une poubelle pour les océans.

Flotteur écolo

Protégée par un brevet international, l’invention ressemble à un gros bouchon de champagne, la tête en bas. Le principe est simple. Ancré à l’entrée ou bien au cœur des ports de plaisance, l’Obell est un gros container capable d’abriter jusqu’à 1250 litres de déchets. Il suffit au skipper de s’amarrer puis de se délester de ses déchets, en accédant par une porte latérale du flotteur. Ce réceptacle, insubmersible même en conditions extrêmes (vents supérieurs à 150 km/h), pèse plus de 200 kilos pour un diamètre de 2,30 mètres environ. D’une profondeur d’1 m 85, il est surmonté d’un mât, lui même surplombé d’un voyant lumineux alimenté par des batteries rechargeables afin d’être visible de nuit.

A l’époque, l’entreprise Opérata avait décidé de financer son développement avec l’aide du conseil général de Haute-Corse qui croyait dans le projet. Opérata avait même ajouté une dimension sociale à l’entreprise en invitant de jeunes Corses à venir suivre une formation de "jardiniers des mers" en son sein. Mais après un accueil très favorable (fondation Nicolas Hulot, Salon nautique...), la jeune entreprise s’emballe, végète pour finir par déposer le bilan. Dans la foulée, le brevet est racheté et est exploité par une autre entreprise. Obell SA vient de naître.

"Meilleure visibilité depuis Paris"

"Il y a réellement un côté exaltant dans cette histoire, explique Barthélémy Dominici, l’actuel pédégé de l’entreprise, lui aussi, d’origine corse. On peut concilier écologie, création d’emplois et économie autour d’un même projet." Le nouveau responsable qui a repris les rennes il y a maintenant un an a cependant été contraint de dépoussiérer le dossier. D’abord en quittant la Corse pour s’installer à la Défense, dans les Hauts-de-Seine, puis en administrant un léger lifting à sa politique commerciale ainsi qu’à son produit.

Allier l’écologie à l’économie

"L’idée est de vendre aux collectivités locales et territoriales qui sont indiscutablement nos clients principaux, précise le chef d’entreprise. Obell leur permet d’importantes économies, elles n’ont plus besoin d’envoyer des plongeurs ratisser les fonds. Il y a en outre une vraie mission de service public dans cette initiative." D’après Barthélémy Dominici, la vente d’un seul container engendre la création d’un emploi. La petite société propose son produit à partir de 7200 euros, un prix qui peut évoluer en fonction de la profondeur des fonds où sera ancré le container. Autre innovation, celui-ci est désormais disponible en kit. "C’est une astuce technique qui nous permet de décrocher des clients implantés en Martinique par exemple."

Barthélémy Dominici ne cache pas que son entreprise est à la croisée des chemins. "Il y a pas mal de choses à reconstruire, une image à changer aussi." Mais Obell ne part pas de rien. L’entreprise compte déjà une trentaine de clients. "On pense vraiment avoir trouvé le produit utile et pratique, maintenant, c’est vrai qu’il faut se faire connaître et parvenir à développer toute notre stratégie." Et là, on ne parle plus d’écologie mais bien de marketing. Déjà un autre monde.

Le site d’Obell


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