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Climat : le prix de votre assurance va-t-il exploser ?
vendredi, 5 mars 2010 / Karine Le Loët /

Rédactrice en chef à « Terra eco ».

Sur les côtes de l’Ouest du pays, la tempête Xynthia a finalement cessé de souffler, laissant derrière elle 53 morts et 7 blessés graves, selon les dernières estimations. Mais au delà du bilan humain, Xynthia c’est aussi des terres agricoles noyées, des maisons détruites, des routes emportées. En langage d’assureurs, c’est 1,2 milliard d’euros de dégâts à indemniser. Avec la multiplication des événements de ce genre, le prix des assurances est-il voué à augmenter ?

En quinze mois, Xynthia est la troisième tempête à balayer l’Hexagone, après Klaus (janvier 2009) et Quinten (février 2009). Or, les experts sont formels : avec l’accélération du réchauffement climatique, les catastrophes naturelles risquent d’être plus fréquentes. Le prix de l’assurance multi-risques habitation va-t-il donc s’envoler ? La Fédération française des sociétés d’assurance (FFSA) a saisi sa calculette. Dans un rapport paru en avril 2009, elle a estimé à 60 milliards d’euros le coût des dommages d’ici à 2030 contre 30 milliards ces vingt dernières années. Soit un doublement des indemnisations à verser aux Français.

Les raisons de cette croissance sont diverses. Il y a d’abord les facteurs dits “socio-économiques”. “Si l’on en croit les tendances actuelles, la population devrait augmenter d’ici à 2030 et migrer en bord de mer ou sur la façade atlantique, soit dans des zones à risques d’inondations. Le nombre de foyers monoparentaux - donc de logements - devrait continuer à augmenter et, avec l’augmentation de la richesse, la quantité de biens assurés est amenée à croître. Tout cela augmentera mécaniquement le coût des sinistres liés aux événements naturels. De 30 à 44 milliards d’euros selon nos estimations”, décrypte Frédéric Gudin du Pavillon, sous-directeur assurances chômage à la FFSA.

16 milliards qui pèsent

La charge sur les épaules de l’assuré ne s’en trouvera pas forcément plus lourde. Notamment parce que les coûts seront alors répartis sur davantage de porte-monnaies. Reste la multiplication des événements naturels prédite par les experts. “Celle-là pourrait faire passer le coût des sinistres de 44 à 60 millions d’euros”, estime M. Gudin du Pavillon. 16 milliards de surcoût qui risque de rester en travers de la gorge des assureurs et plomber le porte-monnaie des assurés.

Dans son rapport, la FFSA déroule ses calculs : en 2030 “la part de la couverture contre les événements naturels dans le budget assurance dommages des ménages et des entreprises passera à près de 25 % (contre 16% initialement)”. D’accord. Et traduit en monnaie sonnante et trébuchante, ça donne quoi ? Si on estime qu’une multirisque habitation c’est 200 euros en moyenne par an, la part de la couverture contre les catastrophes naturelles pèse aujourd’hui 32 euros. Un prix qui pourrait grimper en 2030 à près de... 50 euros. A condition que le coût global du contrat reste figé à 200 euros. Improbable. Car les frais liés aux autres sinistres (dégâts des eaux, incendies, vol...) ne risquent pas de rétrécir pour autant. Alors les assureurs pourraient bien être tentés d’augmenter le prix des contrats pour éponger leurs pertes.

Pas une fatalité

Mais difficile de connaître leurs intentions. Contactées à ce sujet, Groupama déclare que le sujet n’est “pas vraiment un secteur sur lequel [elle] travaille“, la Maïf, elle, ne communique pas sur les éventuelles hausses de prix liées aux catastrophes naturelles mais précise que les “augmentations de cotisations RAQVAM [leur contrat multirisque habitation] sur ces dernières années restent relativement faibles (moyenne de 3%)”. A la MAAF, tout le monde est en vacances. Et chez Axa, on tarde à répondre.

Reste que l’augmentation des coûts n’est pas une fatalité, souligne Frédéric Gudin du Pavillon, sous-directeur assurances dommages à la FFSA. “Il est impératif de mener des politiques de préventions, notamment publiques. Pour protéger les Français contre ces évènements naturels, il faut que nous ayons une meilleure connaissance des risques, d’inondations notamment. C’est ainsi que l’on pourra réduire la vulnérabilité des ménages face aux catastrophes naturelles. Si on ne fait rien, on risque tous de payer plus cher...”. Si la prévention est meilleure, les dégâts seront moins importants, les assureurs indemniseront moins et les clients n’auront pas à payer plus cher. CQFD.

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