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Il est pas si blême, mon chrysanthème
jeudi, 30 octobre 2014 / Camille Cruz

C’est la star du début du mois de novembre, mais ses pétales ont une connotation lugubre. Pour les horticulteurs français, c’est surtout une plante très résistante et… très rentable.

Onze novembre 1919, premier anniversaire de l’armistice de la Grande guerre. Le président Raymond Poincaré ordonne le fleurissement des monuments aux morts de l’Hexagone. Une fleur s’impose : le chrysanthème. « C’est une des seules plantes à fleurir naturellement à l’automne », explique Marie-Hélène Durand, conseillère technique au Conservatoire national du chrysanthème. Sans le savoir, Raymond Poincaré va être à l’origine de l’essor du chrysanthème.

« Fleur des veuves »

La « fleur des veuves » du 11 novembre devient la préférée des Français pour fleurir les tombes le 2 novembre, lors de la fête des morts. Jaunes, roses ou bicolores, plus de 21 millions de pots de chrysanthèmes sont vendus chaque année à la Toussaint, selon France-AgriMer. Et leur commerce représente plus de 160 millions d’euros. Ce succès a incité les horticulteurs français à miser sur la fleur. Une grande partie des pots de chrysa thèmes sont ainsi cultivés en France. Les serres hexagonales produisent plus de 15 millions de boutures, et 23 millions de pots. Avec deux régions phares : le Nord-Pas-de-Calais et les Pays de la Loire. Mais les horticulteurs français doivent faire face à la rude concurrence de leurs homologues belges, néerlandais et allemands.

Timing automnal parfait

Si les ventes s’effectuent en quelques jours, entre le 27 octobre et le 1er novembre, la culture commence, elle, des mois plus tôt. « Le producteur achète une bouture, dans une petite motte de terre, explique Jean-Pierre Tourly, horticulteur dans le Cher. Il commence à la cultiver entre avril et juin. » Le chrysanthème va pousser l’été, en serre ou à l’air libre, abreuvé et nourri en fertilisants. « C’est une plante qui peut être gourmande en eau », reconnaît l’horticulteur. Côté santé, le chrysanthème est du genre résistant et nécessite peu de traitements. Seul point faible : la rouille blanche, maladie qui attaque ses feuilles. « Il faut bien surveiller ses chrysanthèmes. Si on est vigilant, on peut traiter la plante très localement, sans la noyer de produits phytosanitaires », assure Jean-Pierre Tourly. Lorsqu’arrive le mois de septembre, les boutons des chrysanthèmes commencent à sortir. Puis les fleurs s’ouvrent à mesure que les jours raccourcissent : le timing parfait pour être en beauté le jour J, au début du mois de novembre. Les chrysanthèmes donneront des couleurs aux cimetières pendant plusieurs semaines, résistants à des températures allant jusqu’à – 5 °C.

Peu d’entre eux se réchaufferont la feuille à l’intérieur des appartements. « Dans l’esprit des Français, on achète seulement des chrysanthèmes pour la fête des morts, regrette Marie- Hélène Durand. C’est dommage, c’est la fleur qui dure le plus longtemps dans le vase. » Pour ne pas rebuter les acheteurs, le nom de « chrysanthème » est même souvent occulté, remplacé parfois par « marguerite ». Pas facile pour les chrysanthèmes français d’arracher leur étiquette de fleurs des cimetières. Alors qu’en Asie, il est synonyme de joie et de longévité et qu’aux Pays-Bas il est offert… lors des mariages ! —

Le conservatoire national du chrysanthème

Etude de FranceAgriMer sur le marché du chrysanthème

Le site de Jean-Pierre Tourly