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France et nucléaire, une relation fusionnelle
lundi, 26 novembre 2012 / Simon Barthélémy

Avenir radieux : une fission française Nicolas Lambert. L’échappée, 128 p., 10 euros.

Nicolas Sarkozy, Valéry Giscard d’Estaing, Guy Mollet… Ces trois-là forment l’affiche d’Avenir radieux, avec vingt autres personnages, tous joués par Nicolas Lambert. Ceux qui n’auront pas la chance de voir le comédien se démultiplier sur scène pourront se consoler avec la parution de sa pièce-documentaire sur papier. Documentaire car tout est vrai dans ce texte : après Elf, la pompe Afrique, l’auteur a enquêté pendant sept ans sur la passion française pour le nucléaire, et construit ses dialogues à partir de discours, d’interviews, de débats réels et sérieux… mais qui prêtent aussi à rire. On peut ainsi savourer les propos de l’ancien président Nicolas Sarkozy défendant l’atome contre vents et tsunami après la catastrophe de Fukushima.

Parodie de démocratie

On peut aussi écouter les réponses de Pierre Guillaumat – ministre délégué chargé de l’Energie atomique à l’époque du premier essai nucléaire français en 1960 et ex-patron du CEA (Commissariat à l’énergie atomique) – à des journalistes allemands en 1986. L’homme qui a tiré – dans l’ombre – les ficelles du secteur en France pendant près d’un demi-siècle est l’un des fils rouges du texte. Ses mots alternent notamment avec des extraits du débat public de 2010 sur la potentielle construction d’un EPR à Penly (Seine-Maritime). Une parodie de démocratie où les prises de parole sont plutôt cocasses puisque la décision de construire un tel réacteur avait déjà été prise, un an plus tôt, par le président Sarkozy ! Nicolas Lambert rappelle ainsi que, de droite comme de gauche, les dirigeants politiques se sont toujours soigneusement abstenus de consulter sérieusement les citoyens sur l’atome. En 1981, le président François Mitterrand avait même promis un référendum, avant de relancer le programme électro-nucléaire initié en 1973 par le Premier ministre, Pierre Messmer.

Pétrole-atome-armement

Nicolas Lambert met souvent le doigt où ça fait mal, là où, selon lui, les médias n’osent pas gratter, tenus qu’ils sont par leurs annonceurs EDF ou Bouygues. A quoi bon, d’ailleurs, des pubs pour Areva ?, s’interroge au passage le comédien qui confesse n’avoir jamais noté sur sa liste de courses : « Uranium enrichi ». L’auteur revendique de faire du théâtre pour porter les informations au plus grand nombre. Faute de le voir sur scène ou en complément du spectacle, on ne peut qu’encourager à lire sa pièce, enrichie d’une interview et de « bonus » bien informés. Et on attend, après le pétrole et le nucléaire, le dernier volet de sa trilogie théâtralo-politique, qui devrait être consacré à l’armement. De la bombe, baby ! —