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La Californie a dit non à l’étiquetage OGM, pour l’instant
mercredi, 14 novembre 2012 / Pierre Johnson /

Citoyen nord-américain et français, Pierre Johnson spécialiste du commerce équitable et du biocommerce éthique. Il est l’auteur de l’ouvrage « Biopiraterie, quelles alternatives au pillage des ressources naturelles et des savoirs ancestraux ? », ECLM, Paris, 1992.

Pour Pierre Johnson, spécialiste du commerce équitable, il faut se réjouir du référendum sur l’étiquetage OGM en Californie malgré son résultat négatif.

Alors que l’attention du monde entier était tournée vers le duel présidentiel Romney - Obama, dans pratiquement chaque Etat des Etats-Unis, les électeurs étaient appelés à voter sur des questions référendaires. Certainement l’une des plus importantes était la proposition 37 de Californie : pour ou contre l’étiquetage obligatoire des OGM. 

Comme d’autres propositions, celle-ci a fait l’objet d’une « campagne dans la campagne ». L’enjeu cette fois était de taille, quasi nationale. Car si la Californie votait pour l’étiquetage des OGM, de nombreux autres Etats suivraient, rendant de fait l’étiquetage effectif dans tout le pays. Cette proposition n’arrangeait évidemment pas des entreprises comme Monsanto, fabricant direct d’OGM, des entreprises de pesticides comme DOW Chemicals et les principales entreprises agroalimentaires. Mais comment convaincre l’opinion publique californienne, une des mieux informée du pays, de l’absence d’intérêts d’un étiquetage des OGM ?

Très chère communication

Après tout, les consommateurs n’auraient-ils pas le droit de savoir ce qu’ils mangent ? De fait, au début de la campagne pour la proposition 37, les intentions de vote en faveur de la proposition étaient assez élevées, à hauteur de 64%. Mais c’était sans compter sur la force de frappe des entreprises en faveur des OGM, des pesticides, et de la bouffe industrielle. Rapidement celles-ci mirent la main au portefeuille, Monsanto en tête bien sûr, et dépensèrent 45,6 millions de dollars (35 millions d’euros) en communication contre la proposition 37. Leurs arguments ? L’étiquetage coûterait cher aux consommateurs, la traçabilité créerait de la bureaucratie, mot que les Américains ont en horreur. Et pourquoi cibler les OGM, puisque que les tests industriels avaient montré que ceux-ci étaient sans danger pour le consommateur ? Jour après jour, les clips sur les grandes chaînes de télévision dénonçaient la proposition 37 en des messages simplistes, entraînant la confusion dans l’esprit des consommateurs. Aux Etats-Unis, l’argent n’est pas un tabou et les entreprises doivent déclarer les sommes avec lesquelles elles contribuent aux joutes électorales. On constate ainsi que les industries transgéniques, semencières, agroalimentaires, et des pesticides, ont pu mettre plus de 5 fois, en faveur du « non », le montant que les entreprises de distribution de produits biologiques et les regroupements citoyens ont pu réunir pour appuyer le proposition.

Désinformation

Le rejet de la proposition 37 par 53,1% des votants, c’est une fois de plus la victoire de l’argent, de la désinformation organisée par les lobbys des OGM et de l’agroalimentaire. Un peu plus de la moitié des électeurs aurait préféré ne pas savoir ce qu’il y a dans leurs assiettes, quitte à en payer les coûts plus tard, sur leur santé, et même dans leurs impôts, quand il faudra décontaminer les sols lourdement pollués par les pesticides produits et réclamés par les OGM, dépolluer l’eau chargée de fertilisants et de pesticides, et remplacer les services que rendaient la biodiversité lorsqu’elle était encore florissante (pollinisation, climat, etc.).

Mais l’organisation de ce référendum est déjà en soi une petite victoire en Californie. Et la défaite n’est que provisoire, car la bataille de l’information se poursuit, et, dans un avenir proche, les électeurs comprendront mieux les enjeux du suivi des OGM, et le danger réel qu’ils représentent.


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