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9-11-2006
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Société
France

Tous délocalisés !

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Fuite des cerveaux, des fortunes, des talents : à en croire les "déclinologues", la France, se viderait de ses forces vives. Mais si les étudiants, les retraités, ou les millionnaires, quittent parfois l'Hexagone, ce n'est pas toujours pour les raisons que l'on croit. Enquête.
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Deux millions de Français vivent aujourd’hui hors de nos frontières. C’est l’hémorragie. La preuve irréfutable, nous dit-on, que la France sombre. La rengaine est assommante. A chaque fois que des statistiques tombent sur l’état de l’expatriation française, les théoriciens du déclin poussent les mêmes cris d’orfraie. Dernière saillie en date : l’interview dans Le Figaro daté du 16 octobre de Nicolas Baverez, le pape de la "déclinologie " et auteur en 2003 du best-seller La France qui tombe (Editions Perrin). Interrogé sur la hausse du nombre d’expatriations, l’économiste s’alarme : " La France est en voie de décervelage, de désertification industrielle et entreprenariale ". Elle subit "un désarmement technologique et scientifique forcené ". L’angoisse.

Sauf que cette analyse fait fi de la réalité de l’émigration française. Certes, le nombre de nos compatriotes vivant à l’étranger n’a cessé d’augmenter : + 40 % depuis 2000. Mais alors que l’économie mondiale pousse à la mobilité des travailleurs, les Français se révèlent en fait plutôt casaniers. En effet, seulement 3 % de la population quitte l’Hexagone, contre 5 % pour les Allemands (4 millions d’expatriés), 7,5 % pour les Britanniques (4,5 millions), 10 % pour les Suisses (0,7 millions) et 11 % pour les Italiens (6,5 millions).

Chasse aux ingénieurs

Autre poncif martelé par les prophètes du chaos : en raison de ses rigidités structurelles, la France se viderait de sa matière grise et de ses jeunes talents. Il est vrai que la moitié des citoyens vivant hors de la mère-patrie ont moins de 35 ans et que 44 % d’entre eux sont des cadres ou des entrepreneurs. Il est vrai aussi que chercheurs et jeunes issus des grandes écoles sont de plus en plus débauchés par les pays anglo-saxons. Pour beaucoup cependant, ce phénomène n’est pas le symptôme du marasme mais au contraire le gage d’une influence française croissante à l’étranger. Exemple, cette année, un élève sur cinq sortis de Polytechnique a débuté sa carrière hors de l’Hexagone, contre 5 % il y a dix ans. Comme le signale Brigitte Duret du pôle Carrières de Polytechnique, "cette évolution n’est pas liée à la morosité du marché du travail français mais au fait que nos ingénieurs sont davantage demandés à l’étranger et de plus en plus ouverts sur d’autres cultures".

Même rengaine à HEC, où plus de 27 % de la promotion 2006 a décroché un emploi hors des frontières, contre 19 % en 1996. "C’est le fruit d’un travail en faveur de l’ouverture de notre école sur l’international, assure Bérangère Pagès, directrice des relations avec les entreprises du groupe HEC. Aujourd’hui, nous sommes très courtisés dans le monde de la finance internationale." Pas de panique, donc.

D’autant que si les "déclinologues" s’affolent sur la fuite des méninges, ils taisent en revanche le nombre de cerveaux étrangers installés en France : 127 000 cadres et chercheurs, soit 8 % de plus que l’an dernier. Sans oublier 240 000 étudiants, contre 160 000 en 1998. "L’enseignement supérieur français est très compétitif, note Eric Charbonnier, analyste à la direction de l’Education à l’OCDE. Il accueille 9 % du total mondial des étudiants en mobilité internationale, et ce malgré le fait qu’il s’adresse essentiellement à la communauté francophone, plus réduite que l’anglophone."

Appuyez sur la touche "peur"

Autre obsession des Cassandres : l’hémorragie de capitaux qui saignerait le pays. Or, chaque année, seuls 350 des 400 000 contribuables assujettis à l’impôt sur la fortune (ISF) prennent la tangente. Un chiffre stable depuis dix ans. Et comme le remarque Vincent Drezet, membre syndicat national unifié des impôts (Snui) : "On parle toujours des gros patrimoines qui partent mais on n’évalue jamais ceux qui rentrent." De plus, selon l’Agence française pour les investissements internationaux, l’Hexagone représente la quatrième terre d’investissement mondial. Déduction de Vincent Drezet : "Cette façon systématique de n’utiliser qu’une partie des données sert à jouer sur la peur pour faire accepter certaines réformes." Car pour sauver cette "France qui recule", les docteurs ès- déclin prescrivent systématiquement les mêmes remèdes. Suppression des 35 heures, assouplissement du marché du travail, réforme de la fiscalité : l’ordonnance se veut radicale.

Est-elle pour autant justifiée ? Voici en quelques pages un tour d’horizon des Français qui vont voir ailleurs. A vous de juger !

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- Nababs en cavale

- Etudiants, millionnaires, retraités : pourquoi certains vont voir ailleurs ?

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ALLER PLUS LOIN

Feuilleter

- Pour un serpent fiscal européen. De la concurrence à l’harmonisation, Vincent Drezet, Gérard Gouguechon et Serge Colin, Ed. Syllepse, 2005. 116 pages. Rapport de l’OCDE sur la mobilité des travailleurs hautement qualifiés (juillet 2002).

- Tableau de l’attractivité de la France dressé par l’Agence française des investissements internationaux (mai 2006).

- Rapport 2006 de l’Unesco sur l’éducation et la mobilité des étudiants dans plus de 200 pays.

Surfer Maison des Français de l’étranger : service d’information sur l’expatriation dépendant du ministère des Affaires étrangères.

L’actualité de l’expatriation

Union des Français à l’étranger : cette association œuvre pour les droits des Français expatriés.

Fédération des étudiants francophones de Belgique : cette organisation regroupe l’essentiel des délégations étudiantes de la communauté française de Belgique. Elle milite pour la mobilité étudiante européenne et la reconnaissance internationale des diplômes.

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