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22-11-2009
Mots clés
Afrique
France
Portrait

Sobre héraut de la terre

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Sobre héraut de la terre
 
Paysan, écrivain, philosophe, voire prophète, Pierre Rabhi ce pionnier de l’agriculture biologique prône l’ « insurrection des consciences » qui a imprégné le film de Nicolas Hulot.
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ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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Abandonné aux mains expertes d’une maquilleuse, Pierre Rabhi laisse la poudre foncer sa peau déjà tannée par le soleil des Cévennes. Le pinceau court sur ses rides, illumine ses yeux rieurs et lisse ce visage qui dans quelques minutes apparaîtra sous les projecteurs. Sandales aux pieds hiver comme été, bretelles sous une veste endimanchée, ces attributs « rabhisiens » contrastent avec les paillettes du microcosme de la télé. C’est pour répondre à l’invitation de « son ami » Nicolas Hulot, à qui Michel Drucker consacre son Vivement Dimanche, que Pierre Rabhi a quitté pendant quelques heures sa terre d’Ardèche. D’ordinaire, il fuit les émissions de divertissement « Ce que j’ai à dire est trop grave pour qu’on en rie ». S’il a accepté aujourd’hui « c’est pour Nicolas ».   Loin des plateaux télé que des Nicolas Hulot, Yann Arthus-Bertrand ou José Bové ont accaparés, ce pionnier de l’agriculture biologique est sans doute l’influent écologiste le moins médiatique de France. Prôner « la sobriété heureuse » comme il le fait à l’heure de la surconsommation serait-il passé de mode ? C’est pourtant auprès de ce petit homme de 71 ans, sec comme un sarment de vigne, à la voix douce et posée, que certains puisent leur inspiration. « Pierre est une des plus belles rencontres de ma vie ! Il aide à me structurer et m’empêche de désespérer de l’humanité », confie Nicolas Hulot.

Pierre Rahbi marque. La réalisatrice Coline Serreau a même fait de ce paysan écrivain et penseur, l’un des héros de son prochain film [1]. Une série de six documentaires consacrés à tous ceux qui, par leurs initiatives locales, contribuent à changer un système global en déroute. C’est un fait, aujourd’hui, on l’écoute, on le lit. Ses conférences à Polytechnique, HEC et récemment à l’Université d’été du Medef sont même ovationnées. « L’apparition de cet être humain qui parle avec le cœur émerveille », raconte Cyril Dion, le directeur de Colibris, l’association de Rabhi. Pourtant, il y a encore quelques années, on regardait d’un œil railleur cet ascète qui a préféré quitter le confort de la ville pour une ferme sans eau ni électricité.

Semeurs d’idées

1954, guerre d’Algérie. Pierre Rabhi vient trouver refuge à Paris. Sans diplôme, il est embauché comme ouvrier spécialisé. Dans l’entreprise où il travaille, il fait la connaissance de Michèle, son épouse. En pleine Trente Glorieuses, tous deux nourrissent le rêve de quitter l’effervescence de la ville « pour se désaliéner du progrès », explique-t-il. Là-dessus, il théorise avec cynisme : « La modernité, censée nous libérer, n’a fait que nous enfermer. Pour preuve, on passe notre vie dans une boîte : on travaille dans une petite ou grande « boîte », on s’amuse en « boîte » dans lesquelles on se rend en « caisse », pour finir nos jours dans une « boîte à vieux », avant l’ultime boîte… »

C’est dans une ferme plantée sur un sol caillouteux hostile, dompté avec le temps que le couple élèvera ses cinq enfants. « Chez nous, pas de télé. Courir dans la garrigue derrière nos chèvres a nourri notre enfance », se souvient Sophie Rabhi, la quatrième de la fratrie qui a « tracé son sillon droit » comme lui conseillait son père. A la tête de l’éco-village, le Hameau des Buis à deux kilomètres de la ferme de ses parents, elle s’est construite « une vie en adéquation avec les valeurs familiales, transmises sous le regard parfois dur d’un père exigeant », raconte-t-elle.

Peu à peu, la ferme familiale se transforme en une sorte de laboratoire où Pierre Rabhi met au point ses méthodes de production agricole en harmonie avec la nature : l’agroécologie. Une technique développée aux USA dès 1924 et qu’il a découverte à la lecture de La fécondité de la terre du chimiste Ehrenfried Pfeiffer. Le principe : nourrir la terre par des matières organiques fermentées (déchets végétaux et animaux) pour nourrir les plantes qui nous nourrissent. La formation de l’humus qui en résulte, permet de fertiliser naturellement les sols.

Mouvement du colibris

Au début des années 80, le gouvernement du Burkina Faso l’invite pour y développer ses pratiques. Vingt ans plus tard, 50 000 paysans burkinabés ont adopté ses méthodes. Un succès qui le pousse à lancer des actions similaires dans d’autres pays du Sahel, où les terres, ruinées par l’érosion et la sécheresse, retrouvent une nouvelle vie grâce à l’agroécologie. Pierre Rabhi en est persuadé : elle seule peut faire face « au tsunami alimentaire qui est à nos portes. Même l’occident est menacé, prévient-il. Et ce n’est pas cette mode de tout verdir qui sauvera l’humanité ! J’ai espéré à Rio, à Johannesburg, puis à Kyoto. Aujourd’hui, je n’attends rien de Copenhague. Nous sommes plongés dans une extrême urgence ! Il faut penser un paradigme nouveau où l’écologie serait une question fondamentale et l’homme au centre des priorités. Il en va de la survie de notre espèce ! »

Depuis plus de 40 ans dénonce les méfaits de l’agriculture chimique. Infatigable guerrier pacifiste au service de la déesse terre, il crée en France, en 2007, l’association « Colibris, mouvement pour la terre et l’humanisme » qui regroupe toutes les actions locales en faveur du respect de « notre terre nourricière ». Là, il fédère notamment le réseau des « Oasis en tous lieux », des éco-hameaux, où sont inculqués dès l’enfance, les principes de sauvegarde de la nature et de solidarité. En moins de deux ans, plus de 4 000 personnes ont adhéré au mouvement.

Un début pour qui prône « l’insurrection des consciences ». « Il faut écouter cet homme-là ! », conseille Nicolas Hulot dans la préface du Manifeste pour la terre et l’humanisme, l’un des ouvrages de Pierre Rabhi. Dans deux jours, il s’envole pour le Maroc, poursuivre sa mission. « Pas de repos dans l’engagement », lâche-t-il. Pas de retraite pour les prophètes. 

Portrait rédigé pour Terra eco par Patricia Bureau, étudiante au CFPJ (Centre de formation et de perfectionnement des journalistes).


Bio express
- 1938 : Naissance à Kenadsa en Algérie
- 1960 : Départ de Paris pour la ferme d’Ardèche
- 1972 : Découverte de l’agroécologie et application de cette méthode dans sa propre ferme
- 1981 : Le gouvernement du Burkina Faso le mandate comme « Paysan sans frontières »
- 2002 : Pré-campagne présidentielle. Il obtient 184 parrainages d’élus

[1] « La terre vue de la terre, solutions locales pour un désordre global », sortie prévue en 2010

Sources de cet article

- Le mouvement Colibris
- Le Hameau des Buis
- Photographie : ©Fanny Dion

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