Voilà une initiative sympathique, mais qui pourrait gêner aux entournures les gros poissons l’IGN (Institut géographique national) et Michelin, dont les données cartographiques ne relèvent pas du domaine public, et sont particulièrement difficiles à obtenir.
Depuis deux ans, l’association Un Point C’est Tout (upct.org) s’est mis en tête de proposer l’édition collective d’une carte géographique mondiale. A partir de données libres de droits, et sur la base d’un logiciel de publication en ligne, SPIP. Rien que cela. Mieux, cette association, autofinancée jusqu’à présent, vient de décrocher 72 000 euros de subventions européennes, en partenariat avec l’IUFM de Poitou-Charentes et de la Communauté d’agglomération du Grand-Angoulême. Ces fonds ont été décrochés dans le cadre du programme InnovaTIC-FEDER, un Fonds européen de développement régional.
Trace ta route
L’idée a germé dans la tête de Michel Bondaz, professeur d’informatique à l’IUFM de Poitou-Charente. Son ambition : proposer aux enfants d’éditer, grâce à l’outil informatique, une cartographie de leurs villages, de leurs quartiers, voire de leur maison. Leur outil : le GPS, ce système de positionnement par satellite. C’est ainsi que la petite idée est devenue projet pédagogique, qui à son tour, a pris de l’ampleur.Michel Bondaz a conçu un Système d’Information Géographique (SIG) libre de droits, auquel chacun peut contribuer. "Un simple randonneur, automobiliste ou cycliste peut relever des points via le GPS. Le site récupère les traces enregistrées par l’appareil et les convertit en routes, rues et chemins", explique-t-il. Ce procédé permet de reproduire point par point un tracé d’une précision de 10 à 50 mètres.
Mises bout à bout, ces "empreintes citoyennes" ont permis d’établir une cartographie claire de la région bordelaise, et, déjà, prennent forme au Canada. L’association Un Point C’est Tout a aussi intégré sur son site une cartographie générale du monde empruntée à la CIA et à l’Armée américaine. A l’instar de nombreuses données gouvernementales, ces documents sont libres de droits aux Etats-Unis. Peu à peu, au fil des contributions bénévoles, les données géographiques du monde se redessinent. Mieux, l’association a prévu d’ajouter un zeste d’interactivité. Ainsi, "sur la carte d’Angoulême, l’internaute peut cliquer sur la gare, et à partir de la fonction "questionner", accéder directement aux horaires des trains", explique Michel Bondaz.
Pompiers et ONG
D’autres options pourraient apparaître, comme une fonction de moteur de recherche géographique. D’autres usages, aussi, comme faciliter la logistique des ONG ou de pompiers lors des opérations d’urgence. Outre celui du public, l’initiative suscite l’intérêt - non encore confirmé - de pays comme Madagascar, le Mali ou le Ghana. Leurs édiles y voient un moyen de produire à moindre frais des cartes relativement précises, de voies non recensées sur les cartes officielles.
L’idéologie qui sous-tend cette initiative est claire : promouvoir le partage des connaissances, "donner accès au grand public à des données libres, encadrées par des formats ouverts", revendique Michel Bondaz. Un Point C’est Tout rejoint ainsi la masse des projets de promotion des savoirs ouverts. Autant de réactions à l’encadrement de plus en plus strict dont fait l’objet la connaissance, du fait de la prolifération de licences, brevets et droits d’auteurs. En ce sens, la carte que joue Un Point C’est Tout n’est pas sans rappeler celle de l’encyclopédie libre et multilingue Wikipedia (voir Terra economica numéro 39). Avec laquelle, précisément, l’association s’apprête à nouer un partenariat.
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