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28-11-2013
Mots clés
Economie
France

Payez vos courses en revendant votre CO2

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Payez vos courses en revendant votre CO2
(Crédit photo : 401(K) 2013 - flickr)
 
Limiter ses émissions, c'est bien. Gagner des sous en le faisant, c'est mieux. C'est le pari de la société 450 qui a conçu un compte épargne sur lequel stocker son CO2 et l'échanger contre de l'argent ou des services. Explications.
Le Baromètre de cet article
ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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Le covoiturage, ça fait longtemps que vous y songez. Mais flemme ou peur de l’inconnu, vous peinez à trouver une bonne raison de vous y mettre. En voilà une. Si vous abandonnez chaque matin votre auto pour partager l’habitacle de votre voisin qui, comme vous, travaille en ville, vous gagnerez 1800 kg de CO2 au bout d’un an de rendez-vous quotidiens. Vous voilà bien avancé me direz-vous. Sauf que ces 1800 kg ne resteront pas un simple gage de vertu, des points virtuels à afficher, le jour venu, en guise d’épitaphe. Non, ces 1800 kilos-là seront versés sur un compte épargne CO2 et pourront être, selon votre choix, convertis en monnaie sonnante et trébuchante ou transformés en bons à valoir sur un billet de train, une place de théâtre ou un abonnement à votre magazine préféré (1).

L’idée d’un compte épargne CO2 est née en 2008 dans la caboche de Jean-Luc Baradat et d’une poignée de proches. « Pour réduire les émissions de CO2, vous avez trois instruments possibles, explique le désormais pédégé de 450, la société à l’origine du concept. Soit vous faites de la régulation et vous imposez par exemple aux voitures de ne pas dépasser les 50 km/heure. Sur le papier c’est intéressant mais dans la réalité ça veut dire mettre des flics et des radars partout. Deuxième solution : vous introduisez une taxe mais sans garantie de voir baisser les émissions. Regardez ce qui se passe avec le prix du tabac. Ce n’est pas parce que vous l’augmentez que le nombre de fumeurs baisse proportionnellement. La taxe carbone, c’est comme si on vous donnait un bol de soupe avec une fourchette. Ce n’est pas le bon outil pour le bon usage. »

Donner aux gens l’envie de monter sur la balance

Aussi la société décide-t-elle de miser sur un autre cheval : les quotas de CO2. En clair, la quantité d’émissions autorisées et mises à disposition de l’Etat français pour rester dans les clous d’un réchauffement acceptable. Selon les experts du Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), pour avoir un espoir de maintenir l’augmentation de température à 2°C, le monde doit maintenir sa concentration de CO2 à 450 parties par million dans l’atmosphère (une donnée qui a inspiré le nom de la société). Pour la France ça signifie n’émettre « que » 564 millions de tonnes de CO2 par an.

« Imaginez que vous faites 100 kilos et que vous voulez en faire 175 pour devenir un sumo. Vous connaissez votre poids de départ, vous connaissez le poids auquel vous voulez arriver. Vous pouvez voir un nutritionniste ou un entraîneur pour définir un programme. Ensuite, il vous faudra monter sur la balance pour suivre vos progrès, explique Jean-Luc Baradat qui aime décidément les métaphores. Dans le cas du climat, on connaît le point de départ et le point d’arrivée – il faut diminuer les émissions par 4 dans le cas de la France – on dispose aussi de la balance – le bilan carbone. Mais il faut donner aux gens l’envie de monter dessus régulièrement, il faut trouver une incitation. Faire de la pédagogie pure, je n’y crois pas une seconde. »

Récompenser ses employés pour l’effort

L’homme et son équipe ont donc imaginé un système de récompense pour les particuliers qui font des efforts sur deux terrains : les transports et l’habitat. Et pas n’importe quelle récompense. Le prix attribué à chaque tonne de CO2 économisé est de 52,64 euros soit largement au-dessus du prix du marché (la tonne de CO2 s’échange aujourd’hui à moins de 5 euros sur la place européenne). Pourquoi 52,64 euros ? La société a pris pour référence les 45 euros/tonne initialement préconisés par le rapport Rocard de 2009 qui visait à mettre en place la taxe carbone et fait grimper ce prix de 4% par an depuis lors.

Reste que le particulier ne pourra vendre que si une entreprise rachète, à l’autre bout, ses kilos carbone (à un prix pondéré à l’intérieur d’un portefeuille). Et pour Jean-Luc Baradat, cette dernière a tout intérêt à le faire. Outre la possibilité de compenser made in France et de manière transparente, une boîte pourra ainsi trouver un moyen de récompenser à moindres frais ses employés. Une entreprise de transport pourra par exemple reverser la valeur des kilos de CO2 économisés à ses chauffeurs et les inciter à pratiquer l’éco-conduite. Mieux, ce versement ne sera pas taxé. « C’est vrai, reconnaît Jacques Le Cacheux, économiste à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) et spécialiste de la taxe carbone. C’est un avantage en nature comme les tickets restaurant donc qui permet aujourd’hui de contourner les cotisations sociales. Ça peut fonctionner tant que la pratique reste marginale mais si tout le monde faisait ça, croyez bien que la Sécurité sociale réclamerait son dû. C’est difficilement généralisable », tempère-t-il.

Des petits ruisseaux, ou une grande rivière

Mais le particulier n’est pas forcé de réclamer ses sous. Il peut aussi choisir de valoriser ses quotas en bons d’achat sur des tickets de train, des offres de covoiturage, des abonnements énergie. Et là il gagnera davantage au change : la tonne de CO2 vaudra ainsi entre 100 et 150 euros selon les offres. De quoi retenir l’argent au sein d’un système fermé, créer une économie bas carbone avec en son sein, un CO2 devenu monnaie complémentaire, souligne Jean-Luc Baradat. Avec une limite là encore selon Jacques Le Cacheux : « La grande force de la monnaie c’est d’avoir un pouvoir général, d’acheter quand vous voulez et où vous voulez. Là, la monnaie carbone ne permet d’acheter que chez les partenaires qui l’acceptent. »

Autre hic pour l’économiste : « C’est un mécanisme intéressant mais purement volontaire. Il y aura toujours une partie de la population pour adhérer à ça, comme certains, volontairement, renoncent à avoir une voiture, trient leurs déchets ou s’abonnent à une Amap (Association pour le maintien d’une agriculture paysanne, ndlr). Mais pour enclencher un cercle vertueux, il faut qu’il y ait suffisamment de gens. C’est pour ça que les impôts ont été inventés, si les gens s’occupaient bénévolement des dépenses publiques, on n’aurait pas besoin d’impôts. » Et l’homme de poursuivre : « Je sais bien qu’on dit toujours que les petits ruisseaux font les grandes rivières. Mais parfois aussi les petits ruisseaux restent de petits ruisseaux. Je pense qu’on ne pourra pas se passer d’un instrument plus directif comme la taxe carbone. » Séduits, Nicolas Hulot et Michel Rocard ont pourtant apporté leur soutien à l’initiative. L’Etat, lui, a accordé un agrément à la société lui permettant de distribuer des crédits CO2 mais demande à voir. La société devra d’abord faire ses preuves sur le territoire du Finistère avant d’emporter le droit de s’étendre.

(1) Terra eco est partenaire de ce programme.

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10 commentaires
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  • Bonjour
    Depuis une dizaine d’années je suis retourné vivre dans la vieille maison familiale de campagne avec ma mère et mon épouse.
    J’ai installé une centrale photovoltaïque 9Kw qui a produit depuis 2015 si on en croit les relevés de l’onduleur SMA une réduction de 12t de Co2. Est il possible de le valider en courses.
    Je suis un peu écolo sur les bords et aime les choses saines. J’ai également fait une cuve eau de pluie de 12,6m3 (jardin/volailles) - Remis en service un jardin de 1000m2 où j’ai supprimé tous les produits bizarres (gardé fumier de vache, cendre du poêle à bois, composte herbes/divers ménager & bouillie bordelaise) - ajouté dessus une vieille serre à l’abandon réparée de 200m2 - remis en fonction un poulailler d’un quarantaine de volailles sur les 2000m2 restant.
    Remis en service et en conformité un vieux forage (217m !) qui alimente toute la maison
    Est-ce que cela compte dans l’achat de mes courses ?
    Bien à vous

    10.11 à 18h14 - Répondre - Alerter
  • Je suis interessé à savoir comment va évoluer cette sympathique tentative de récompenser ceux qui limitent leurs émissions de CO2, je vous souhaite bonne chance, car vous en aurez certainement besoin.
    Tout d’abord vous partez sur un présupposé complètement FAUX. Le signal prix est l’outil le plus efficace pour réduire la consommation de tabac (avec l’interdiction pure et simple, renseignez vous auprès de la ligue anti tabac et pas aupres des lobbyistes des cigarettiers)
    C’est bien (et agréable à entendre) de vouloir récompenser financièrement les bons comportements, plutôt que de pénaliser les mauvais, mais pratiquement ce n’est pas viable économiquement.
    Je trouve un mérite au quota, c’est d’etre pedagogique, et par exemple pour arriver à comprendre que chaque etre humain a doit au même quota de CO2.
    Ensuite opposer quota et taxe devient non pertinent, dès lors que la taxe est à 100% redistribuée en part égale entre chaque etre humain, cette redistribution financière représente l’argent pour acheter ce quota commun. Une taxe 100% redistribuée c’est exactement comme donner le meme quota à chacun avec possibilité d’échanger ce qu’on a en trop ou acheter ce qui nous manque (quota échangeables)

    9.12 à 10h34 - Répondre - Alerter
  • "Pour la France ça signifie n’émettre « que » 564 milliards de tonnes de CO2 par an".

    Attention ! 564 milliards de tonnes de CO2, cela représente environ 15 ans d’émissions mondiales ! Je suppose qu’il s’agit de 564 millions de tonnes de CO2 par an ?

    7.12 à 19h59 - Répondre - Alerter
  • l’article cite deux méthodes en service, et qui ne fonctionnent pas, ou mal :
    - la contrainte : réduire la vitesse, il faudra mettre des flics et radars partout
    - la taxe pour orienter la dépense, mais l’exemple du tabac montre que ça ne fonctionne pas, on peut aussi citer l’exemple du prix du carburant !

    il propose le concept de quota, qui selon l’auteur de cette idée fonctionnerait mieux. Je suis de son avis, mais cette personne oublie, ou ne prends pas en compte le fait que le principe de quota n’est pas accepté en France comme mode de gouvernance.
    C’est la réponse qui m’a été faite lorsque j’ai évoqué le concept suivant au ministère de l’écologie pour limiter la consommation de carburant fossile avec un minimum de contrainte :
    - tout citoyen ou foyer possède une carte à puce "énergie" sur laquelle est enregistrée sa consommation d’énergie (carburant voiture, énergie chauffage de la maison, etc..)
    - les prix des différentes formes d’énergie, selon l’usage, est fixé en fonction de quota de consommation, afin de permettre aux personnes ou foyers modestes d’acheter l’énergie indispensable. Le dépassement des quota provoque un coût de l’énergie plus cher, ceci en plusieurs paliers.
    - les quota pourraient être annuels ou mensuels, selon l’usage de l’énergie et selon le choix du consommateur.
    - le système de quota permet de "récompenser" le consommateur responsable, et de faire prendre conscience aux autres de leurs excès de gourmandise.

    Le concept de quota est inapplicable car non conforme à "l’éthique" de la république, qui préfère orienter les comportements du citoyen par les taxes ou l’interdiction. Le principe de distribution "d’aides" auprès des personnes affaiblies par les taxes est par ailleurs préféré, même si cela génère un coût de mise en œuvre et de gestion comparable ou supérieur à l’économie réalisée....

    L’esprit "État centralisateur" dirige ce concept, ceci en toute conscience de nos dirigeants.

    l’avenir du projet 450 mérite d’être suivi.. mais il traîne un lourd handicap !

    29.11 à 12h07 - Répondre - Alerter
  • Bonjour, voici quelques réponses aux points soulevés :

    - oui, on gagne sur la différence entre émissions passées et émissions nouvelles
    - oui, quand le compte est ouvert on doit joindre les justificatifs
    - oui, le système est équitable, comme cela est indiqué en page 19 de la méthodologie consultable sur http://www.developpement-durable.go...
    - oui, il est possible d’avoir plus d’information sur la même méthodologie.
    - oui, il est urgent de diviser les émissions de CO2 par 4 en France, d’ici à 2050, et ceci implique de réussir à faire baisser les émissions du secteur diffus (batiment transport pour 46% des émissions de la France
    - oui le mécanisme des quotas est adapté à la problématique climatique, ce qui n’est pas le cas de la taxe carbone : voir http://www.latribune.fr/opinions/20...

    bonne journéé !

    29.11 à 12h03 - Répondre - Alerter
  • Je rejoins les analyses des deux commentaires précédents et me pose aussi une autre question : que deviennent ces kg de CO2 lorsqu’ils on été revendus ou utilisés comme monnaie ? S’ils sont juste achetés en tant que droit à émettre le CO2 alors il n’y a pas de réduction au final (même si l’idée émetteur/payeur me semble bonne). Et dans ce cas si tout le monde réduit ces émissions alors il y aura énormément de kg de CO2 sur les comptes épargnes mais personne pour les acheter ? Ai-je manqué quelque chose au principe ?
    Si quelqu’un a plus d’informations je suis preneur !

    29.11 à 10h52 - Répondre - Alerter
  • Hmmm ... en plus du fait que le site ne passe pas les 75% de remplissage du profil (click sur suivant qui ne fait rien), je vois mal comment ça peut marcher : on serait donc payé sur la différence de production de CO2.
    Mais c’est purement déclaratif non ?
    Du coup qu’est-ce qui m’empêche de dire que j’ai un Hummer alors que je n’ai pas de voiture et de dire que j’ai revendu ma voiture l’année d’après ?
    Et par ailleurs quelqu’un qui a déjà fait des efforts gagnerait moins que quelqu’un qui a du mal à en faire ???
    L’idée de comptabiliser le CO2 est intéressante, mais infaisable en pratique.

    28.11 à 16h41 - Répondre - Alerter
    • Assez d’accord avec votre analyse, avant de critiquer je me suis dit, je vais aller voir, ils proposent une simulation. plusieurs défaut, effectivement ce n’est que sur du déclaratif (pour ouvrir un compte il faut peut être apporter ensuite des preuves, sinon à quoi bon ?). Ensuite, par exemple, j’ai déménagé, mais pas par choix, pour cause de changement de travail, ça me fait faire des économies (logement plus récent et EnR) alors que je n’ai absolument rien changé à mon comportement ni fait ce choix de logement pour ces raisons. enfin, je n’ai pas de voiture, mais à priori cette option là n’existe pas, je n’utilise que les transports en commun, ce qui est en soit déjà vertueux, mais ça ce n’est pas valorisé. Cet outil est en gros conçu pour avantager les gros pollueurs en leur faisant gagner de l’argent à moindre effort, et à priori sur simple déclaration. si ce n’est pas le cas, j’aimerais avoir pus d’information sur le fonctionnement de ce compte épargne CO2 que ce qui est donné dans l’article

      28.11 à 18h40 - Répondre - Alerter
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