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19-06-2013
Mots clés
Alimentation
Agriculture
France

Pacte sur le gaspillage alimentaire : beaucoup de bruit pour rien

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Pacte sur le gaspillage alimentaire : beaucoup de bruit pour rien
(Crédit photo : lyzadanger - flickr)
 
Le gouvernement vient d'annoncer en grande pompe un pacte contre le gaspillage alimentaire. Nous l'avons épluché, difficile d'y trouver des mesures concrètes.
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ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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Diviser par deux le gaspillage alimentaire en France d’ici 2025. L’objectif annoncé en grande pompe par le gouvernement ce vendredi 14 juin est très ambitieux. Pour rappel, chaque Français jette en moyenne 20 kilos de nourriture par an, soit un gaspillage d’environ 400 euros par foyer. Les chiffres manquent, mais les études montrent que l’industrie agroalimentaire gâcherait au moins autant, et que les secteurs de la distribution et de la restauration ne sont pas en reste. Comment parviendra-t-on à ce louable objectif fixé par le gouvernement ? Mystère. Nous avons décortiqué les 11 mesures du plan gouvernemental. Et on est resté sur notre faim.

  • 1) Une seule mesure précise, mais qui compte pour des prunes

« Même si vous dépassez la date limite (d’un paquet de gâteau, ndlr), il est toujours consommable. Certes, le biscuit sera peut-être moins croustillant mais il aura gardé ses qualités nutritionnelles. » Avec cet exemple, le ministre délégué à l’Agroalimentaire Guillaume Garot annonçait sur France info vendredi dernier l’une des onze mesures de son plan : les industriels devront, dès décembre 2014, remplacer la mention DLUO (Date limite d’utilisation optimale, qui indique que l’aliment reste consommable mais commence à perdre ses qualités gustatives) par la mention « A consommer de préférence avant ».

Combien de produits vendus en France porte la mention DLUO ? En fouillant dans nos placards et sur les étals du supermarché du coin, on n’en a point trouvé, à l’inverse des « A consommer de préférence avant » déjà largement présents. (Si vous voyez des DLUO, dites-le nous !). « On en trouve par exemple sur des gâteaux, il fallait harmoniser le système », assure-t-on pourtant au service de presse du ministère de l’Agriculture.

La France va donc troquer une mention peu utilisée sur ses paquets pour une mention déjà largement répandue. Impact attendu de cette mesure ? Faible à très faible. D’autant que le « A consommer… » est souvent accusé d’encourager le consommateur à jeter. Mais, réglementation européenne oblige, la France est obligée de la conserver. Ceux qui, comme nos voisins britanniques, militent pour la suppression totale de cette mention vont encore devoir poireauter. Tout comme ceux qui souhaitent voir la date limite de consommation (la DLC, qui indique, elle, le seuil à partir duquel un produit devient impropre à la consommation) prolongée sur certains produits comme les yaourts.

  • 2) Beaucoup de communication, un goût de suremballage  

Quasiment la moitié des mesures annoncées consistent à communiquer plus :

La première mesure du plan est une pomme barrée d’un « anti gaspi ». Ce logo doit être : « un signe de ralliement manifestant la mobilisation de chacun pour lutter contre le gaspillage », espèrent ses auteurs.

La seconde, une journée nationale contre le gaspillage.

La troisième prévoit d’intégrer des modules sur le gaspi dans la formation des lycées agricoles et écoles hôtelières.

La neuvième consiste à diffuser des spots à la radio et dans les supermarchés, avec des slogans comme « N’en perds pas une miette, finis ton assiette ! »

La dixième prévoit d’améliorer le site existant gaspillagealimentaire.fr.

Verdict ? C’est bien mais insuffisant. Patrick Hervier, chargé du gaspillage chez France nature environnement (FNE) qui a participé à la rédaction du pacte, se réjouit « de cette communication à l’échelle nationale ». Mais préconise de s’inspirer du programme britannique « Love Food Hate Waste » mis en place en Grande-Bretagne où « le volet "sensibilisation" a été accompagné d’un accompagnement, avec des conseils précis sur comment consommer, des ateliers pratiques... » Même avis pour Gaëtan Lassale, chargé des relations institutionnelles à la Fédération française des banques alimentaires, signataire du pacte : « L’Angleterre est largement en avance, avec le Wrap, qui est un organisme unique chargé de la question, ce que nous n’avons pas en France. »

  • 3) Des mesures au contenu flou, aux effets impossibles à chiffrer  

Le reste du plan comprend des engagements souvent peu précis et/ou non datés.

Ainsi la mesure 4 précise : « D’ici 2014, l’Etat prendra les dispositions nécessaires (...) pour que des clauses relatives au gaspillage alimentaire soient incluses dans les marchés publics de la restauration collective. Ces clauses pourront concerner : l’approvisionnement, la taille des portions et la possibilité d’acheter des portions adaptées aux convives, la sensibilisation des clients, équipes et convives, les processus de préparation des repas. » On attend d’en savoir plus. Notons également que depuis 2011 la loi recommande déjà la « mise à disposition de portions de taille adaptée » dans la restauration collective (voir ici en pdf).

La mesure 5 prévoit que l’Etat « fera en sorte que les partenaires disposent d’une meilleure connaissance de l’ensemble des règles relatives au transfert de propriété et de responsabilité lors d’un don alimentaire » et « mettra à disposition des professionnels des procédures pour faciliter le don alimentaire ». Là encore, on attend d’en savoir plus. Gaëtan Lassale propose, lui, de renforcer une mesure existante : augmenter les défiscalisations pour les enseignes qui donnent des produits dont la date limite de consommation approche : « La grande distribution peut défiscaliser ses dons en nature aux associations. Mais ces défiscalisations sont plafonnées. Quand elles dépassent ce plafond, les entreprises cessent de donner aux associations pour faire des promotions ou se diriger vers d’autres canaux de distribution. Nous proposons d’augmenter ces plafonds. »

La mesure 6 a des airs de palimpseste. Accrochez-vous. Le pacte national de lutte contre le gaspillage alimentaire signé vendredi prévoit en fait qu’un plan national pour la prévention des déchets, qui sera annoncé à la fin de l’année 2013, mentionne dans ses objectifs la lutte contre le gaspillage alimentaire. Voilà.

La mesure 7 rappelle que « les entreprises qui ont à rendre compte en matière de RSE (responsabilité sociale des entreprises, ndlr) mentionnent déjà dans leur rapport les mesures de prévention des déchets, notamment en ce qu’elles concernent le gaspillage alimentaire ». Pour ces grandes entreprises, ce plan ne prévoit donc rien de plus. Problème : Terra eco a récemment épluché les rapports de la grande distribution française, et on n’y trouve presque aucune mention sur le gaspillage alimentaire. Les autres entreprises et les autres partenaires « seront encouragés à créer également des indicateurs relatifs au gaspillage alimentaire ». On espère que cet « encouragement » suffira à les motiver.

La mesure 11 prévoit d’expérimenter le don de particuliers aux associations, via la plate-forme numérique eQo dons - qui sera lancée ce mois-ci mais ne porte pour l’instant que sur le don non alimentaire. A vous de jouer, donc !

Bilan :

Difficile de croire que ces mesures suffiront à diviser par deux le gaspillage en France. Ne serait-ce que parce qu’aucune mesure n’est chiffrée (même si le pacte prévoit de « poser les bases du suivi du pacte, de son évaluation et de sa mise en œuvre, ainsi que du suivi de la mesure du gaspillage et des progrès enregistrés d’ici à 2025 »).

Le ministre a-t-il eu les yeux beaucoup plus gros que le ventre ? « C’est bien de mettre tous les acteurs autour de la table et de faire de ce problème une question nationale. C’est une grande avancée », veut se réjouir Patrick Hervier, chargé du dossier chez France nature environnement (FNE) qui reconnaît toutefois que « le côté opérationnel du pacte reste en devenir », que ce pacte a « surtout une dimension corrective » et ne « permet pas d’agir directement sur les causes du gaspillage ».

Gaëtan Lassale se réjouit, lui aussi, de ce « premier pas franchi ». En reconnaissant qu’il reste du travail au-delà des engagements. « On n’a même pas réussi à s’accorder sur la définition du gaspillage », note-t-il avant d’acquiescer quand on lui fait remarquer que « donner une définition permettrait de déterminer les responsables du gaspillage ».

Coïncidence navrante, la Belgique vient d’annoncer sa volonté de contraindre l’ensemble des supermarchés à donner leurs invendus. Une mesure déjà appliquée dans plusieurs villes belges depuis plusieurs années. « Les Belges sont plus pragmatiques, alors que nous privilégions les accords de branche. C’est comme pour la taxe pique-nique, eux l’ont mis en place très vite alors que chez nous cette mesure est toujours en discussion au Conseil national des déchets. » Et hop, une idée de plus à piquer dans le cornet de nos voisins belges.

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