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Vise le green

Par Benjamin Cliquet
21-04-2011

Les bâtiments du futur

Les bâtiments du futur
(A Vancouver, les architectes innovent)
"Nous travaillons à l'intersection de l'homme et du système." Pour réduire les émissions carbone du secteur du bâtiment, Vancouver a choisi de développer des nouvelles technologies qui rendent plus facile les changements de comportements.

« Vancouver a la vision d’être la Ville la plus Verte au monde d’ici 2020. Pour y parvenir, nous avons défini 10 objectifs de long-terme, chacun associé à une visée pour 2020. Après avoir parlé avec les citoyens et les actionnaires, nous avons créé un premier plan d’action pour atteindre les objectifs fixés. » C’est ainsi que commencent toutes les courtes vidéos réalisées par la ville de Vancouver pour présenter ses 10 objectifs de long-terme (voir les vidéos en anglais) qui sont :

1. Une économie verte

2. Être leader en matière de politique climatique

3. Bâtiments écologiques

4. Réseau de transport propre

5. Zéro déchet

6. Accès à la nature

7. Empreinte écologique plus faible

8. Eau propre

9. Air propre

10. Nourriture locale

Après deux mois passés à Vancouver, j’essaie de remettre ces objectifs dans leur contexte pour comprendre les problématiques de chacun d’entre eux. Si vous êtes impatients d’en savoir plus, je vous invite à visiter le site officiel du projet.

Avec l’objectif de réseau de transport propre, l’objectif n°3 sur les bâtiments écologiques est un des piliers du projet de Ville la plus Verte de Vancouver. Le secteur du bâtiment est responsable de plus de la moitié des émissions de CO² de la ville. Pour me parler des solutions pour réduire cette part, Lyn Bartram a été mon interlocutrice. Professeur et chercheuse à l’Ecole des Technologies et des Arts Interactifs de la SFU (Simon Fraser University), elle était également membre du groupe de travail sur l’objectif des bâtiments écologiques.

Vancouver a l’ambition de devenir leader en terme de conception et de construction des bâtiments écologiques. Dans cette optique, la ville s’est fixée comme objectif de réduire la consommation d’énergie et les émissions de GES des bâtiments existants de 20% par rapport au niveau de 2007 (d’ici 2020), ainsi que de rendre obligatoire la neutralité carbone des bâtiments construits à partir de 2020.

La problématique majeure de l’équipe de Vancouver Greenest City est de pouvoir agir sur le stock de bâtiments existants. En empruntant la filière des nouvelles technologies vertes, tous ces bâtiments devraient être rénovés et c’est une solution chère pour les habitants (même s’ils auront droit à plusieurs aides financières). C’est pourquoi la ville mise beaucoup sur les changements de comportements de la part des habitants. "Un bâtiment écologique est un bâtiment qui est utilisé de façon durable", explique Lyn, argumentant qu’un bâtiment possédant de nombreuses technologies vertes pourrait être dévié de son objectif si les habitants n’adoptent pas les bons comportements. "Chaque bâtiment n’est qu’une enveloppe qui détient certaines capacités." Ils essaient donc de trouver des solutions pour aider les gens à utiliser leur logement de façon plus efficace. C’est le meilleur moyen pour agir sur le stock de maisons existantes.

Le comportement de l’occupant est un champ d’intérêt croissant mais nouveau des architectes et des designers de bâtiments. Ils sont à la recherche de techniques comme les systèmes de chauffage adaptatifs ou d’autres techniques pour "régler" ("tune") les habitations. Ces questions ont déjà été traitées pour des larges bâtiments mais les architectes veulent maintenant appliquer les solutions à l’échelle résidentielle. La ville compte surtout sur les technologies d’information, comme les "compteurs intelligents" ou "smart meters". Ces appareils peuvent dire aux habitants quelle partie de la maison utilise le plus d’énergie et peuvent être dirigés depuis son iphone. Une technologie, qui serait bientôt au point, permettrait même d’allumer et éteindre les lumières de la maison depuis son iphone ! Ils sont donc à la recherche de technologies qui rendent très faciles les gestes économiseurs d’énergie.

Ces technologies sont souvent contrôlées par ordinateur ou iphone, des appareils de plus en plus abordables mais qui restent à mon avis encore inaccessibles à une certaine catégorie de la population. L’intérêt est que ce sont des appareils "que tout le monde a déjà". Ces "appareils technologiques petits, légers et sans fil rendent plus facile l’intégration à un système de conscience et de contrôle" et il suffit de les "rapiécer à un ordinateur que l’on a déjà". Ces technologies peuvent s’appliquer pour le contrôle du chauffage du bâtiment comme de l’éclairage.

Concrètement, si l’appareil informe par exemple que le lave-vaisselle utilise trop d’énergie, il proposera de le faire fonctionner en mode économe, soit souvent la nuit, "quand il y a la bonne quantité d’énergie disponible et que c’est le plus efficace." Cela s’oppose à des technologies plus automatiques qui ne s’adaptent pas. "Il y a un délicat équilibre entre le contrôle de l’utilisateur et le contrôle automatique". Lyn conclut par cette phrase qui nous donne l’impression d’être dans Matrix ou Terminator : "Nous travaillons à l’intersection de l’homme et du système."

L’installation de ces technologies est encore à l’état de projet pilote et l’équipe du projet ne sait pas si les habitants accepteront de vivre avec les appareils. Ils espèrent qu’ils auront le même effet que le compteur de vitesse sur les voitures : il nous rappelle à quelle vitesse on va, sans être embêtant. Et l’acceptation des habitants sera bien sûr la plus forte barrière.

La diversité en centre-ville, un problème ?

"Si l’on construit de tout nouveaux bâtiments très efficaces, le prix des logements augmentera." En outre, l’ouest du Canada est une terre d’immigration. Donc la demande de logement est en croissance et elle le sera pour les 20 prochaines années. Mais peu importe, car "même si les prix stagnent, nous avons un problème de diversité économique." Même s’il reconnait et déplore que ça en soit ainsi ("les quartiers hébergeant les classes sociales populaires sont souvent identifiés par les promoteurs comme des problèmes"), Eugene McCann, que vous connaissez maintenant, considère que ce n’est pas "nécessairement un problème" que les quartiers riches de Vancouver soient riches. "Personne n’a dit que des pauvres devraient venir s’y installer" ajoute-t-il. Il semble que le centre-ville de Vancouver abrite des populations aisées et que ça ne changera pas de sitôt. Peut-être ai-je voulu voir un problème là où il n’y en avait pas...

L’aspect de "quartiers verts" ("green neighbourhoods") est très important pour les économies d’énergie, affirme Lyn, qui les différencie des quartiers de bâtiments écologiques. Si c’est un quartier de nouveaux bâtiments écologiques, alors ils seront très chers et seront habités par les plus riches. "Tandis que si c’est un quartier vert où vivent des personnes vivant "durablement", alors vous trouverez des jardins communautaires (ou "jardins ouvriers"), des habitants rivalisant les uns avec les autres de façon amicale pour être le pâté de maison de plus efficace..." s’enthousiasme Lyn.

Une des caractéristiques du "Vancouverisme" : la recherche de la densité

En dehors du centre-ville et des couloirs créés par le Skytrain, la densité n’est pas très élevée. Et c’est compliqué d’introduire de la densité tout en préservant la qualité de vie des quartiers. "Les gens s’inquiètent moins de la densité que du fait que cela augmenterait les problèmes de parking et diminuerait la qualité de leurs ruelles" ainsi que du fait que les hauts immeubles pourraient faire de l’ombre (au sens propre) à leur maison. Lyn considère qu’il est "bien trop tôt" pour construire des grands immeubles dans ces zones peu denses.

A bientôt, Visez l’green, Ben

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