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27-09-2011
Mots clés
Recyclage, Déchets
Bangladesh

Le Bangladesh ne veut plus être un cimetière pour navires

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Le Bangladesh ne veut plus être un cimetière pour navires
(Crédit photo : Greenpeace)
 
Fait inédit, le Bangladesh ferme ses frontières à un navire en attente de démantèlement. Ce refus pourrait bien annoncer la fin de l'exportation des déchets dangereux dans des pays non-équipés pour leur traitement.
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ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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Où est passé le Probo Koala ? Tristement célèbre pour avoir déversé des centaines de mètres cubes de déchets toxiques à Abidjan en 2006, le « cargo de la honte » (1) est aujourd’hui impossible à localiser. Sa balise AIS (Automatic Identification System) n’émet plus de signal depuis le 3 juin dernier, alors que le tanker était à l’ancre dans la baie d’Halong, au Vietnam, en quête d’un chantier de démantèlement où finir ces jours.

Rebaptisé « Gulf Jash » suite à la catastrophe environnementale en Côte d’Ivoire, qui avait causé la mort de 17 personnes et l’intoxication de milliers d’autres, le pétrolier chercherait-il à se faire discret ? Car aujourd’hui, peu de pays semblent encore disposés à le voir approcher leurs eaux territoriales. Pas même les états côtiers asiatiques, pourtant jusqu’ici peu regardants sur les impacts environnementaux et sociaux des activités de démantèlement. Le refus catégorique du Bangladesh, le 27 mai dernier, d’accorder à l’ex-Probo Koala l’entrée au chantier de démolition de Chittagong, témoigne de cette nouvelle donne. L’exportation des déchets dangereux vers des pays qui ne disposent pas de structures adaptées à leur traitement toucherait-elle à sa fin ?

Le Bangladesh change de cap

« C’est la première fois qu’un navire voué à la démolition est ainsi banni des eaux du Bangladesh », soulignait l’association Robin des Bois dès l’annonce du ministère de l’Environnement bangladeshi. Les mises en garde répétées de l’ONG française auprès des autorités semblent donc avoir porté leurs fruits. Ce lobbying s’inscrit surtout dans un mouvement de fond contre le démantèlement irresponsable de plus en plus influent. Comme le faisait remarquer la Banque mondiale dans un rapport paru en décembre dernier (2), « le Bangladesh, sous la pression des tribunaux, impose progressivement des mesures de prévention contre le déversement de substances toxiques dans l’environnement. » Effectivement, en 2010, « l’échouage de navires pour démolition a été interdit par intermittence par plusieurs décisions des cours de justice dans l’attente de mesures de réglementation sur la protection des travailleurs et de l’environnement », d’après l’association Robin des Bois.

Le 7 mars dernier, sous la pression des industriels du secteur, la Haute Cour de justice autorisait toutefois l’échouage de navires en attente de démolition sur les chantiers des côtes bangladeshies. Autorisation provisoire, assortie d’une vingtaine d’exigences socio-environnementales (interdiction d’employer des mineurs de moins de 16 ans et des femmes, de rejeter des substances dangereuses sur terre ou dans les eaux, obligation de tenir à jour un registre du personnel, de fournir des équipements de protection individuels, etc.) « La Haute Cour donne du temps au gouvernement pour fixer les règles applicables à l’activité de démolition des navires », analysait alors Robin de Bois. « Elle vient de prolonger l’autorisation provisoire jusqu’au 7 juillet, permettant aux chantiers de faire le plein avant les mois de mousson. Aujourd’hui les annonces du type ‘une politique de démolition des navires bientôt mise en place’ se succèdent mais les actes ne suivent toujours pas. » Le refus opposé à l’ex-Probo Koala marquera t-il l’amorce de cette politique tant attendue ?

Risque de fuite vers des chantiers pakistanais

Cette tendance au renforcement des règles et à la responsabilisation sociale et environnementale des chantiers, Charlotte Nithart, porte-parole de Robin des Bois l’observe également en Inde, leader mondial du démantèlement (47% des bateaux « partis à la casse » entre janvier et mai 2011 ont échoué sur les chantiers indiens). En revanche, le Pakistan et la Chine (aux troisième et quatrième rangs, derrière le Bangladesh) se montrent moins zélés. La Chine arbore une poignée de chantiers « verts », vitrine en trompe l’œil d’une activité encore mal réglementée, et le Pakistan ne laisse filtrer que des informations parcellaires, rendant l’analyse des conditions de travail sur les chantiers des plus hasardeuse.

La nouvelle posture du Bangladesh, si elle se confirme dans les mois qui viennent, entraînera-t-elle la perte de certains marchés, au profit de ses voisins moins-disants ? D’après la Banque mondiale, « les profits dégagés par l’industrie et les volumes disponibles sur le marché sont tels qu’un modèle de démantèlement plus responsable serait tout à fait viable au Bangladesh, sans répercussion néfaste sur la compétitivité de l’industrie bangladeshie, ni risque de délocalisation. » Un avis que ne partage pas tout à fait Charlotte Nithart. « Un certain nombre de navires se tourneront forcément vers le Pakistan et la Chine, où le démantèlement sera, de fait, moins onéreux. D’où la nécessité d’une approche internationale de la question, et d’une responsabilisation des armateurs européennes et américains. »

Car force est de constater que 89% des navires partis à la casse début 2011 ont rejoint les côtes asiatiques, alors que 38% appartenaient à des armateurs européens. Seul instrument international dédié à la question, la Convention de l’Organisation maritime internationale (OMI) « pour un recyclage sûr et écologiquement rationnel des navires », votée en mai 2009 à Hong-Kong, entrera en vigueur deux ans après avoir été ratifiée par au moins 15 Etats... Or, pour l’heure, seuls six Etats (dont la France) l’ont signée « sous réserve de ratification ou d’acceptation. » « Il faut ouvrir des chantiers de démolition responsables en Europe et aux Etats-Unis dès à présent », recommande donc Charlotte Nithart « sans attendre une ratification de la Convention qui, de toute évidence, prendra des années. » Faute de quoi, les chantiers pakistanais sauvages auront encore de tristes jours devant eux.

(1) Le cargo de la honte. L’effroyable odyssée du Probo Koala, Bernard Dussol et Charlotte Nithart, les documents Stock, mai 2010. (2) « Ship Breaking and recycling industry in Bangladesh and Pakistan », Banque mondiale, décembre

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Cet article de Anne Farthouat a initialement été publié le 27/09/2011 sur le site de Novethic, le média expert du développement durable.

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