publicité
haut
Accueil du site > Actu > Nature > La planète bleue blémit (suite)
Article Abonné
11-05-2006
Mots clés
Environnement
Multinationales
Monde

La planète bleue blémit (suite)

Taille texte
{#TITRE,#URL_ARTICLE,#INTRODUCTION}
 
SUR LE MÊME SUJET

Avec ou sans les multinationales ?

Au contraire de la téléphonie ou de l’électricité (respectivement 44 % et 28 %), les entreprises privées n’ont glissé qu’un simple orteil dans le financement des infrastructures liées à l’eau. A peine 5 %, en fait. Au début des années 2000, pourtant, la manne privée était considérée comme un cadeau des cieux. On imaginait alors "réglés" les problèmes de l’eau. Trompe l’œil. Les financements ne sont pas venus. Pire, ceux qui paradaient au Forum mondial de Kyoto en 2003 ou à celui sur le développement durable de Johannesburg en 2002, affichaient profil bas il y a quelques semaines à Mexico.

JPEG - 15.5 ko
Mer d’Aral. L’eau a fait place au désert. En surexploitant les fleuves, l’Homme a radicalement modifié la nature. (Photo : Vincent Robinot)

Car le temps a charrié son lot de désillusions et la jurisprudence s’est épaissie. Uruguay, Argentine, Inde, Bolivie : les multinationales ont essuyé quelques guerres de l’eau et ont été contraintes de plier bagages, jurant pour certaines qu’on ne les y prendraient plus. Michel Camdessus, l’ancien directeur du Fonds monétaire international (FMI) et auteur d’un rapport sur l’eau pour l’Onu en 2003, avait en quelque sorte vu juste en déclarant sans trembler à l’époque : "Le véritable risque, aujourd’hui, ce n’est pas que les entreprises gagnent trop d’argent sur le dos des pauvres. C’est plutôt qu’elles se retirent de ce business, parce qu’elles gagnent trop peu."

Robinet contre bouteille en plastique

Un autre type de multinationales a donc peu à peu fait sa place au sein du paysage. Mais pas question cette fois de canalisations ou d’assainissement. Plutôt de bouteilles en plastique. Nestlé, Danone (un tiers du marché mondial à elles deux), Pepsico, Coca-Cola sont les quatre poids lourds d’un secteur qui se chiffre à plus de 20 milliards d’euros dans le monde. Se sachant mis en cause, les quatre géants se défendent et assurent ne "peser que sur 0,008 % des ressources mondiales d’eau potable." De leur côté, des ONG comme Planète Bleue, l’Acme ou Greenpeace stigmatisent certes l’accaparement par ces entreprises des nappes phréatiques au Brésil ou en Inde par exemple. Mais elles dénoncent surtout "la privatisation déguisée" de l’accès à l’eau potable dans les pays en voie de développement. "En gagnant des parts de marché, explique le président du tribunal latino-américain de l’eau, Javier Bogantes, les multinationales encouragent les pouvoirs publics à moins investir dans leurs infrastructures".

CONSOMMATION

500  : le nombre de litres d’eau potable utilisés par jour par un Américain. Contre 10 à 20 pour un Africain.

55  : le nombre de litres d’eau dilapidés par un Européen par jour en actionnant sa chasse d’eau. Victime de la sécheresse, des Ethiopiens du Sud-Est du pays survivent avec 5 litres d’eau potable au quotidien.


Tout le problème est là. L’accès à l’eau n’est pas encore un droit. Tout juste un "besoin essentiel", selon l’expression consacrée par le Forum mondial organisé à La Haye en 2000. Jean-Luc Touly, ancien salarié du groupe Véolia, aujourd’hui président de l’Association pour un contrat mondial de l’eau (Acme), en mange tous les jours son chapeau. Pour lui, aucun doute, "l’eau doit être considérée comme une ressource gratuite pour tous". Comme pour l’immense majorité des ONG présentes à Mexico pour le contre-forum, "l’eau doit immédiatement quitter la sphère marchande, car elle est un patrimoine commun de l’humanité". Pour cela, Jean-Luc Touly fixe pour chaque être humain un "seuil minimum vital de 40 litres d’eau potable gratuits par jour". Et selon lui, pour atteindre ces minima humanitaires "propriété, gestion et distribution" doivent nécessairement rester dans le giron public.

L’eau, libre comme l’air ?

L’ambition est belle, mais les sommes nécessaires à sa concrétisation ne se trouvent pas en claquant des doigts. Le secteur privé semble vacciné, les autorités publiques ont du mal à tout faire et l’alliance des deux parties - les
JPEG - 26.7 ko
En Afrique, la consommation d’eau potable par habitant est de 10 à 20 litres par jour et par habitant. (Photo : Pierre Saint-Jacques)

partenariats public-privé - peine à émerger. Alors du Nord au Sud, les hommes se creusent les méninges. L’Espagne ou le Moyen-Orient ont misé sur l’industrie de dessalinisation de l’eau de mer lire aussi :). Efficace mais coûteux, autant en financement qu’en impact sur l’environnement, du fait des émissions de gaz à effets de serre. D’autres, au Pérou ou au Chili, misent sur la récupération des eaux de pluies. La Turquie, elle, remarquablement pourvue en richesses hydrauliques, n’hésite plus à envisager l’exportation de ses mètres cubes d’eau inutilisés vers ses voisins du Proche-Orient, notamment Israël [1].

Mais c’est aussi vers l’agriculture, qui absorbe 70 % de l’eau prélevée, contre seulement 8 % pour la consommation domestique, que se portent les regards. "Il ne faut stigmatiser personne, lâche un ingénieur spécialiste de la gestion des services publics de l’eau, qui préfère conserver l’anonymat, mais il faudrait penser en termes de ressources hydrauliques avant de se lancer dans des cultures. Il est sans doute temps de repenser l’irrigation."

A Washington, Eustache Ouayoro, le fonctionnaire de la Banque mondiale assure "ne pas perdre patience". Dans quelques mois peut-être, il bouclera son programme dont les négociations ont commencé au Nigeria depuis plus de deux ans. Il faudra ensuite attendre la validation par le conseil d’administration de la Banque mondiale, et les travaux pourront enfin débuter. A Mogadiscio, le choléra, lui, n’attendra pas.

Articles liés


- L’Espagne se tourne vers la mer

- “L’eau gratuite est un non-sens”

- Eau : aller plus loin

[1] Le projet "Eau de la paix", signé en 2004, prévoyait l’exportation de 50 millions de m3 d’eau par an de la Turquie vers Israël via d’énormes tankers. Il vient d’être annulé en raison - officiellement - de la flambée du prix du baril de pétrole et du coût occasionné pour le transport.

Faites réagir vos proches, diffusez l'info !
Vous aimez Terra eco ? Abonnez-vous à la Newsletter

Président de l’association des Amis de Terra eco Ancien directeur de la rédaction de Terra eco

TOUS LES COMMENTAIRES
COMMENTAIRES SÉLECTIONNÉS
RÉPONSES DE LA RÉDACTION
Trier par : Plus récents | Plus anciens
Affichage : Voir tout | Réduire les discussions
Soyez le premier à réagir à cet article !
PUBLIER UN COMMENTAIRE

Un message, un commentaire ?

  • Se connecter
  • Créer un compte

publicité
1
publicité
2
    Terra eco
    Terra eco
publicité
3
SPIP | squelette | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
publicité
bas