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19-04-2013
Mots clés
Environnement
France
Etats-Unis

Explosion au Texas : les usines françaises sont-elles à l’abri ?

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Explosion au Texas : les usines françaises sont-elles à l'abri ?
(Explosion de West Fertilizer. Crédit photo : capture d'écran rtl.be)
 
Une explosion du type de celle de West Fertilizer, qui a soufflé la ville de West au Texas, est-elle possible en France ? Si le risque zéro n'existe pas, l'arsenal réglementaire est strict. Mais insuffisant, pour les riverains.
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ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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NH3. Deux lettres et un chiffre pour l’explosion, énorme, qui a ravagé dans la soirée de mercredi 17 avril une partie de la petite ville de West, au Texas. La cause reste incertaine, le bilan humain aussi – on parle d’une quinzaine de morts au moins. Ce seraient quelque 25 tonnes d’ammoniac qui auraient explosé sur ce site de stockage d’engrais chimiques et de céréales, non protégé.

La France produit de l’ammoniac. Elle produit également du nitrate d’ammonium (également appelé ammonitrate), incorporé aux engrais. Un scénario catastrophe comme celui que vient de vivre le Texas pourrait-il se produire chez nous ?

En réalité, cela est déjà arrivé : c’est bien l’explosion d’un stock de nitrate d’ammonium, le 21 septembre 2001, qui a soufflé l’usine AZF à Toulouse (Haute-Garonne), et entraîné la mort de 31 personnes. Mais depuis, la France s’est dotée d’un arsenal réglementaire visant à réduire au maximum les risques.

Ammoniac gazeux très toxique

Contrairement aux agriculteurs américains, les Français ne sont plus autorisés à répandre de l’ammoniac dans les champs. Ils le dispersaient à une vingtaine de centimètres de profondeur « pour porter cet engrais au plus près des racines », précise Gilles Poidevin, directeur de l’Unifa, l’Union des industries de la fertilisation. Cela pour éviter que cette substance, habituellement stockée sous forme liquide (à -33°C) mais qui devient particulièrement explosive sous forme gazeuse au contact de l’air et d’une flamme, ne soit trimballée « de l’usine de fabrication à l’agriculteur, en passant par les transporteurs et l’entrepôt intermédiaire où elle était stockée ».

En plus d’être explosif, l’ammoniac gazeux est « très toxique : à 700 microgrammes par mètre cube, on constate des effets létaux sur les animaux et les plantes », explique le représentant des fabricants de produits phytosanitaires. Ainsi, et malgré le fait que « cette technique permette de doubler le rendement à l’hectare, la France l’a interdite en 2010 en raison des risques environnementaux tout au long de la chaîne ».

Six usines de fabrication d’engrais à base d’ammoniac en France

Les seuls points de l’Hexagone où l’ammoniac à des fins agricoles est stocké sont donc les six usines de fabrication d’engrais azoté réparties sur le territoire français. Quatre d’entre elles fabriquent également la matière première, l’ammoniac, stocké en très grandes quantités. Afin de limiter les risques d’explosion, les deux sites qui ne conçoivent que des ammonitrates n’ont pas le doit de stocker plus de 150 kg d’ammoniac « pur » dans leurs cuves, selon Gilles Poidevin.

Mais ce n’est pas tout. Pour être autorisé à développer une activité dans une installation dite « classée », parce qu’elle peut présenter des risques pour la santé des travailleurs et l’environnement, l’Ineris (Institut national de l’environnement industriel et des risques) rappelle que « c’est à l’exploitant ou au fabricant de démontrer qu’il a mis tout en œuvre pour diminuer les risques au minimum ». Il doit effectuer une étude de dangers, une étude d’impact sur l’environnement de l’activité et bien sûr installer des protections pour éviter qu’un banal incident ne devienne un accident majeur.

Empêcher l’effet domino

Afin d’empêcher cet effet domino, les usines qui fabriquent ou utilisent de l’ammoniac doivent par exemple le stocker dans une cuve à double paroi, installer des capteurs hypersensibles permettant de détecter la moindre fuite et des soupapes de sécurité bloquant toute ouverture en cas de fuite, etc. La réglementation R428 s’intéresse plus particulièrement au stockage des ammonitrates, qui se présentent sous la forme de granulés. Depuis la catastrophe d’AZF, il faut les contenir dans des sacs et ne plus stocker en vrac et à l’air libre. Dans chaque région, des plans de prévention des risques technologiques, instruits par le préfet, doivent assurer que tout est mis en œuvre pour que le risque d’accident atteigne son niveau le plus bas possible. A condition que ce plan soit mis en place, ce qui tarde à venir pour la majeure partie des usines d’engrais.

Ces mesures de sécurité sont d’autant plus sensibles que les usines classées Seveso 2 (signifiant qu’elles présentent des risques d’accidents majeurs) se situent au sein de larges zones industrielles et jouxtent d’autres usines chimiques. On n’ose imaginer ce qu’une explosion comme celle de West pourrait provoquer au sein d’un énorme complexe d’installations classées...

Des visites de contrôle inopinées

Dans la zone de Gonfreville-l’Orcher, collée au Havre (Seine-Maritime), est implantée l’usine Yara qui produit de l’ammoniac pour l’industrie et l’agriculture ainsi que de l’urée (un autre engrais). Son directeur, Hervé Gibault, gère un stock moyen de 6 000 tonnes d’ammoniac. Il explique que la Dreal (Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement) chargée de contrôler les installations et les systèmes de prévention des risques dans les sites sensibles effectue des « visites annuelles régulières, qu’elles soient inopinées ou planifiées ». Il y en a eu six en 2012. A titre de comparaison, West Fertilizer, le site de stockage d’ammoniac qui a explosé non loin de Waco, n’avait pas été contrôlé depuis 2006...

Il estime que « la réglementation française est sérieuse, adaptée aux risques. » « Sans doute avons-nous encore quelques progrès à faire mais c’est marginal. Notre réglementation parmi les plus strictes au monde explique que le niveau de risque soit très faible », rassure également Gilles Poidevin.

Numéro vert pour rassurer ou opération de communication ?

Au Havre, les directeurs des installations classées Seveso 2 se retrouvent régulièrement, à l’invitation de la Chambre de commerce et d’industrie, dans une « commission risques ». Hervé Gibault explique que « le but est d’échanger sur nos façons de faire et nos retours d’expérience, en toute transparence, ce qui n’était pas dans nos habitudes au début », mais aussi d’établir ensemble des plans d’action pouvant faciliter la gestion d’incident sur les sites. Cette commission a mis en place en 2010 le numéro vert Allo Industrie « dans un souci de transparence et d’information rapide des citoyens ». Les riverains intrigués par une fumée, un bruit, une odeur inhabituels peuvent appeler ce répondeur qui renseigne en temps réel sur l’événement en cause.

Pour Daniel Darets, secrétaire général de l’Institut pour une culture de sécurité industrielle dont le but est de faire en sorte que les parties prenantes (industriels, autorités, riverains) vivent mieux ensemble autour des sites industriels, « il est important de prendre en compte la dimension sociétale de l’acceptation du risque ». Car la croissance démographique a rapproché les citadins des sites à risques. Cela passe par ce besoin de transparence de la part des industriels, de nature si secrets. Mais il estime que, depuis AZF, le changement de culture a eu lieu.

Sylvestre Puech est nettement plus sceptique. « Combien d’accidents sont ignorés du public ? », s’interroge le porte-parole de la Coordination nationale des associations riveraines des sites Seveso. Car les incidents sont fréquents, et ils ne font pas la une des journaux. Selon lui, « les industriels font de la com’. Devant la prise de conscience des riverains et leur connaissance des accidents, le discours reste "ne vous inquiétez pas, vous êtes en sécurité". Les industriels essaient à travers toute une série de mesures insidieuses (colloques, réunions informelles avec les riverains..) de faire accepter l’idée de la "culture du risque" rendant du même coup le riverain responsable de sa sécurité ou de son insécurité ». Et de pointer du doigt le fait que les grands sites industriels ont souvent recours à la sous-traitance, ce qui peut entraîner une formation à la prévention des risques insuffisante.

A lire aussi sur Terraeco.net :
- Usines d’engrais : des fuites et des feux en série en France

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