Bernard Maris, Antimanuel d’économie, Bréal, 360 p., 17 euros.
Le retour en grâce de la pensée économique "hétérodoxe" (pour faire simple, non-libérale) a au moins une conséquence positive : pléthore d’ouvrages paraissent en librairie pour faire comprendre au public les grands concepts de l’économie. Et lui faire réaliser que le sabir des penseurs libéraux cache souvent au mieux, des grosses bêtises, au pire, des philosophies douteuses. Les deux tomes des Vrais lois de l’économie de Jacques Généreux (Seuil) et le Petit bréviaire des idées reçues en économie du collectif les Econoclastes (La Découverte) ont ouvert le bal. Bernard Maris, co-auteur du best-seller Ah ! Dieu que la guerre économique est jolie (Albin Michel) enfonce joliment le clou.
Keynes, le rêveur
Son
Antimanuel se présente à la manière des manuels scolaires, avec leçons aux sujets traditionnels (marché et concurrence, croissance...), textes d’illustration et index à la fin. La maquette est d’ailleurs aussi superbe que celle de nos livres d’écoliers. Mais qu’on n’attende pas la froide impartialité du prof d’économie (que Maris est, par ailleurs) : l’"Oncle Bernard", qui officie dans les pages de
Charlie-Hebdo, est un fidèle d’Attac, un admirateur de Keynes et son
vade mecum taille en pièces les préceptes libéraux. Il va même plus loin : pour lui, l’économie n’est pas et ne sera jamais une science, ses "lois" n’existent pas, et le galimatias stérile proféré par les économistes ne prospère que parce que notre civilisation est malade.
"Lorsque l’économie et les économistes auront disparu(...), auront aussi disparu le travail sans fin, la servitude volontaire et l’exploitation des humains. Régneront alors l’art, le temps choisi, la liberté. Qui rêvait ainsi ? Keynes, le plus grand des économistes".
Manuel de philosophie
On l’aura compris : cet
Antimanuel d’économie est surtout un manuel de philosophie. Dans une langue imagée et souvent drôle, Maris entend nous faire réfléchir sur l’inefficacité foncière de la concurrence, de la compétition et la validité
"scientifique" de notions comme la solidarité, le don, la gratuité... A noter : le dernier chapitre qui présente quelques-unes des
"utopies" forgées dans le chaudron alter-économiste est particulièrement rafraîchissant.
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