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18-07-2012
Mots clés
France
Reportage

Je vis à côté d’une raffinerie

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Je vis à côté d'une raffinerie
(Sur le chemin qui mène à sa maison, Stéphane a une vue sur la raffinerie. Crédit photo : Julie Lallouët-Geffroy)
 
Les Bodinier vivent en face de la deuxième raffinerie de France, à Donges. Une route départementale sépare d'environ 500 mètres leur maison des cuves de stockage.
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ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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Dernier épisode de notre série « Je vis à côté de ». Relisez « Je vis à côté d’une d’une éolienne » et « Je vis à côté d’une ligne très haute tension ».

La route départementale joue les lignes de démarcation. D’un côté, l’église ; de l’autre, les cheminées de la raffinerie qui concurrencent le clocher. Stéphane Bodinier travaille dans l’aéronautique lorsqu’il décide, avec son épouse, de s’installer à Donges en Loire-Atlantique avec leurs deux enfants, de 9 et 6 ans. C’était il y a six ans. Quand ils achètent leur petite maison avec jardin, ils remarquent bien sûr les cheminées monumentales, l’alignement des cuves de stockage, les allers-retours des camions. Stéphane sait bien que vivre à cet endroit est un choix risqué.

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Comme il se l’était promis en emménageant, il crée en 2010 avec d’autres habitants une association de riverains dont il prend la présidence. Celle-ci regroupe plus d’une centaine de personnes sur les 6 500 habitants que compte Donges. Ces habitants veulent en savoir plus sur l’usine en face de chez eux, connaître les risques liés à ses activités, être mieux informés lorsque des incidents se produisent.

Parler de la raffinerie, presqu’un tabou

Lors des réunions, chacun a sa petite anecdote à raconter. Une habitante vivant à Donges depuis une trentaine d’années, rapporte comment un cheval puis un bœuf sont restés coincés sur le parking à l’entrée de la raffinerie plusieurs jours. Certes, le parking n’est pas la zone la plus à risque sur le site, mais tout de même, elle trouve cela étonnant. Cette histoire fait sourire mais d’autres incidents, plus graves, se produisent ça et là sur le site.
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Le site de Total est la deuxième raffinerie de l’Hexagone en quantité de pétrole brut : 11 millions de tonnes y sont traitées chaque année. 650 personnes y travaillent. Alors « c’est un peu comme dans les grandes usines automobiles, il y a un lien particulier entre l’entreprise et ses salariés. Aborder la question des risques et de la transparence, c’est finalement s’attaquer à un tabou », estime Stéphane.

La raffinerie est impressionnante par les chiffres mais aussi par sa taille. Son extension date des années 1990. Coincée sur les bords de Loire, la raffinerie n’avait d’autre choix que de gagner du terrain vers la commune. Distante de Donges d’environ un kilomètre avant les travaux, elle ne l’est plus aujourd’hui que de 500 mètres. Une proximité pas anodine. Le site de Total est classé « Seveso seuil haut », le niveau le plus dangereux.

Vu les quantités de pétrole et de gaz qui font des allers et venues, pour Stéphane, si une explosion survient, il ne restera plus grand chose de Donges, « on n’aura pas le temps de se dire adieu, ça c’est clair ! » Lui et les Dongeois n’ont pas pour autant la peur au ventre. « On s’habitue. » Leur quotidien est tout ce qu’il y a de plus banal, les enfants vont à l’école, jouent au football dans la rue. Leurs parents ne leur donnent pas de consigne particulière, si ce n’est de ne pas tenter de tromper les services de sécurité du site pour crapahuter au sommet des cheminées de la raffinerie.

« C’est à la raffinerie de nous protéger, pas l’inverse »

Cette vie paisible près des torchères prend un virage significatif en 2003 lors du vote de la loi Bachelot. Après l’explosion d’AZF en 2001, l’Etat décide de limiter les risques liés aux accidents industriels. Pour y parvenir, il veut renforcer la sécurité sur les sites eux-mêmes mais aussi sur les maisons des riverains. Sur le principe, les habitants n’ont rien à y redire, c’est par contre lorsqu’ils découvrent que ce sera à eux de payer pour les travaux que tout bascule. L’incrédulité des propriétaires cède rapidement le pas à la mobilisation pour négocier, voire empêcher, l’application de la loi Bachelot en l’état. Ils ne comptent pas débourser un seul centime pour se protéger de l’installation voisine. « C’est une question de principe », estime Stéphane, « ce n’est pas à nous de nous protéger de la raffinerie, c’est à elle de nous protéger. Il faut traiter le problème à la source. » D’autant plus que renforcer l’ossature des maisons est pour lui insuffisant, « on part du principe que nous vivons chez nous, mais nous ne sommes pas en permanence à la maison. Nos enfants jouent dehors, nous allons chercher le pain, nous prenons notre voiture. » Les désaccords sur les principes du « qui paie ? » persistent d’où le piétinement de l’application de la loi Bachelot. Sur le terrain, les négociations entre l’Etat, les collectivités locales et les associations de riverains se poursuivent tant bien que mal pour tenter de définir le périmètre des maisons concernées par les travaux. Stéphane a désormais une idée assez précise des travaux qui pourraient être exigés.
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Les riverains ne comptent pas lâcher le morceau. En février dernier, ils créent une coordination nationale avec une cinquantaine d’associations de riverains en France. Au total, 500 communes sont concernées par ces sites industriels à haut risque.

Tant que la bataille entre Etat et riverains n’est pas terminée, tous les travaux que les habitants auraient aimé réaliser chez eux sont à l’arrêt. Personne ne compte remplacer ses vitres par du double vitrage si peu de temps après ils ont l’obligation de recommencer des travaux pour du triple vitrage. Voilà pourquoi la vitre de la véranda de Stéphane n’est pas réparée, et reste à peine colmatée.

Au moment de partir, sur le pas de la porte, un ronron très net se fait entendre, c’est la raffinerie. « Elle est particulièrement bruyante aujourd’hui », confirme Stéphane. En plus du risque d’explosion, craint-il les risques, à terme, sur sa santé et celle de ses enfants, du bruit, des odeurs, des émanations qu’il a déjà évoqué ?

« Oui bien sûr, mais ça c’est notre prochain combat. Chaque chose en son temps, pour le moment, on s’occupe de cette histoire de travaux. »

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  • Vivre a cote d´une raffinerie a des risques énormes a cause des multiples accidents qui puissent se produire. Seulement je vous propose de chercher a l´internet les images tristes de l´accident qui a eu lieu le dimanche dernière a la raffinerie de Amuay au Venezuela, nous avons déjà 41 morts plus de 89 blésés, beaucoup des disparus. Les maisons voisines ont sautés dans l´air. C´est pour cela que les communautés ont un rôle super élève dans la prévention d´accidents. L´EXEMPLE DE LA REFFINERIE D´AMUAY AU VENEZUELA DOIT FAIRE REFLEXIR A TOUTES LES ENTREPRISES PETROLIERES.

    28.08 à 16h30 - Répondre - Alerter
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