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6-02-2013
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France

Gaz de houille : la France va-t-elle retourner à la mine ?

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Gaz de houille : la France va-t-elle retourner à la mine ?
(Les terrils jumeaux de Loos-en-Gohelle, près de Lens. Crédit photo : Olibac - flickr)
 
Avec son gaz « made in France », Arnaud Montebourg lance l'espoir de ressusciter l'industrie en Lorraine. Lancer la filière du grisou ? Les écologistes s'étranglent. Sauf qu'il n'y a rien de nouveau sous les tropiques. L'exploration de cette ressource va déjà bon train.
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On connaissait Arnaud Montebourg en marinière. Voici que le même ministre du Redressement productif prône « un gaz made in France ». Le gaz de houille est un hydrocarbure non conventionnel. Contrairement aux mines à la Germinal, là, on ne cherche pas a exploiter directement le charbon, mais le méthane piégé dans le charbon, qui était la hantise des mineurs. Une trop forte concentration de ce gaz engendrait une explosion, « le coup de grisou ».

Pour les sites d’extraction de charbon, la filière du grisou, c’est la poule aux œufs d’or. En ligne de mire, la Lorraine, qui renferme des milliards de mètres cubes de ce gaz. Après l’agonie des hauts-fourneaux de Florange et de l’aciérie de Gandrange, un regain de l’industrie soulagerait bigrement cette région. Le Front national, surfant sur la vague nationale, voit dans le gaz de houille le Saint Graal.

Quatre forages d’exploration

Branle-bas de combat. Les politiques grimpent au rideau. Les écologistes lèvent le poing contre cette énergie fossile. Mais alors, va-t-on forer dès demain sur les rives de la Moselle ? On en est loin, mais c’est tout à fait possible. Pendant que la polémique fait rage, soudainement, les compagnies gazières explorent le sol, en Lorraine et dans le Nord-Pas-de-Calais... depuis plus de vingt ans. La phase d’extraction des réserves de houille n’est pas encore d’actualité. Mais les recherches avancent à grand pas.

Après quelques tentatives infructueuses d’une entreprise américaine, la société European Gas Limited (EGL), basée à Freyming-Merlebach (Moselle), obtient en 2004, les permis pour des forages de reconnaissance en Lorraine. Depuis cinq ans, elle sonde le sous-sol lorrain grâce à un puits expérimental à Folschviller. Les forages donnent des résultats. L’entreprise dispose actuellement de deux permis exclusifs de recherche – baptisés Bleue Lorraine et Bleue Lorraine Sud - et a été autorisée en septembre 2012 par la préfecture à lancer quatre forages d’exploration.

Parler d’exploitation est « prématuré »

Il s’agit bien pour l’heure de prospection ! Il n’y aura exploitation industrielle que si la phase d’exploration est concluante. Mais le directeur d’EGL, Frédéric Briens, a déjà annoncé être prêt à investir 33 millions d’euros dans ce programme. D’après une étude de Beicip-Franlab, filiale de l’Institut français du pétrole et des énergies nouvelles (IFPEN), il y aurait dans cette zone « 371 milliards de mètres cubes de ressources, soit sept à neuf années de consommation de gaz en France ». De là à voir la filière du grisou s’enflammer, on est loin. Roland Vially, géologue à l’IFPEN tempère : « Il est incorrect et anticipé de parler de ces 370 milliards de m3 comme neuf ans de consommation française... c’est vrai arithmétiquement mais pas dans la pratique ! Entre l’estimation de la ressource et la quantité commercialisée, il faut quand même passer par la production ! »

Réagissant à l’engouement d’Arnaud Montebourg, la ministre de l’Ecologie, Delphine Batho, a calmé le jeu sur une possible exploitation du gaz de houille : « C’est prématuré de le dire. Il y a des permis d’exploration, mais la démonstration n’a pas encore été faite qu’il y avait une exploitation possible dans des conditions économiques rentables. » Ce gaz de houille est déjà exploité depuis des décennies aux Etats-Unis où il représente plus de 10% de la production américaine de gaz naturel. Mais pour l’heure, en France, personne ne s’est prononcé pour se lancer dans l’aventure : « Jusqu’à ce jour, il n’y a pas de demande d’exploitation » rappelle la ministre. Frédéric Briens explique que « notre rôle n’est pas d’exploiter le gaz ». Après 2014, les concessions devront être vendues à un opérateur, partenaire d’EGL, pour assurer la production.

Juridiquement, on peut forer

Pas question de mettre la charrue avant les bœufs, mais admettons que la rentabilité de la ressource soit avérée, que dit la loi ? Le géologue explique qu’« il s’agit d’exploration et de production d’hydrocarbures régit par le code minier. En cas d’exploration positive, EGL pourra demander une concession qui lui sera ou non accordée par l’Etat ». Juridiquement, rien n’empêchera de forer le sol.

Le code de l’environnement autorise l’exploitation du gaz de houille, contrairement à son cousin, le gaz de schiste. Il est aujourd’hui impossible d’extraire cet hydrocarbure. La seule technologie d’extraction connue pour l’heure est la fracturation hydraulique, réputée extrêmement polluante et interdite depuis 2011. Rien à voir avec ce bon vieux grisou, « sans atteinte pour l’environnement » clame le ministre du Redressement productif.

Les associations écologistes s’inquiètent cependant. Elles attendent des garanties par rapport à l’impact sur l’environnement. L’exploitation du gaz de houille est-elle réellement sûre pour les nappes phréatiques ? Rappelons par ailleurs que ce gaz est composé à 95% d’un gaz à effet de serre, le méthane. Notre rythme actuel d’exploitation des énergies fossiles est déjà largement supérieur aux seuils à respecter pour éviter un réchauffement climatique à +2°C. L’exploiter ne nous éloignerait-il pas encore davantage des objectifs ?

Delphine Batho a demandé une étude d’impact écologique avant que l’Etat donne son feu vert. Comme c’est le cas pour toute activité extractive. L’annonce d’une exploitation de gaz de houille intervient au moment où le gouvernement entame son débat national sur la transition énergétique. Laquelle est justement destinée à imaginer les moyens pour sortir des énergies fossiles et développer les énergies renouvelables. Le gaz de houille ne va pas vraiment dans cette direction.

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Née au bout de la Loire, un pied dans l’Atlantique, l’autre embourbé dans la terre, elle s’intéresse aux piafs et aux hortensias, observe ses voisins paysans et leurs élevages bovins. Elle enrage devant les marées noires. Licenciée en lettres, elle sort diplômée de l’Institut pratique du journalisme de Paris en avril 2012. Elle scrute les passerelles qui lient les hommes à leurs terres. Parce que raconter la planète, c’est écrire au-delà des pommes bio et du recyclage de papier.

7 commentaires
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  • D’accord pour les impacts environnementaux au sujet de l’exploitation du gaz de houille, il y a à mon avis de grands points à revoir. Mais pour ce qui est du point de vue économique de cette exploitation , il serait, je pense judicieux que les taxes perçues lors de la vente de ce gaz soient directement versée à la région Lorraine, en effet il ne s’agit pas là de refaire les mêmes erreurs que part le passé. En effet la Lorraine n’a pas vraiment profité jusqu’à présent de l’exploitation de son sous sol...

    18.03 à 13h14 - Répondre - Alerter
  • Ne pas oublier les expériences américaines et australiennes :

    L’exploitation nécessite le pompage très bruyant pendant des mois de l’eau présente dans la houille. Des milliers de m3 d’eau très polluée que l’on ne sait pas traiter.

    L’exploitation se termine par une fracturation pour rentabiliser les forages.
    La densité des puits est la même que celle des forages destinés à l’extraction de n’importe lequel des hydrocarbures de roche mère, dont le gaz de houille.

    10.02 à 14h30 - Répondre - Alerter
  • SI ça permet d’éviter des pétroliers sur les mers et de réduire aussi notre déficit commercial pourquoi pas. On remplace la pollution pétrole par la pollution gaz. Mais que ce soit l’occasion d’avoir plus de moyens pour développer les énergies renouvelables

    9.02 à 12h22 - Répondre - Alerter
  • Ben moi je suis monté le weekend dernier sur le terril de la photo. Voilà.

    7.02 à 20h40 - Répondre - Alerter
  • Le problème, me semble-t-il, est de savoir ou on veut aller. Vers l’utilisation de tout ce qui peut être exploitable (encore faudrait-il être sûr que c’est bien exploitable) ou vers une économie plus soucieuse de notre environnement tout en développant de nouveaux emplois sur notre territoire.
    J’ai entendu un expert récemment expliquer qu’il n’y avait strictement rien à exploiter en Lorraine en terme de gaz de houille. La ministre de l’Ecologie dit qu’on ne sait pas si j’ai bien compris. L’avenir passera par les énergies renouvelables qu’on le veuille ou non.
    Au fait avez-vous vu la pollution sur Pékin ces derniers temps ? Ca vous tente ?

    7.02 à 14h56 - Répondre - Alerter
    • Tout à fait d’accord, Vert, tout ceci n’est qu’un cataplasme sur une jambe de bois : "Sept à neuf ans de consommation" c’est ridicule. La seule condition serait d’être sûr à 100% qu’il n’y aura pas de retombées négatives sur l’environnement et que l’on aura que le côté positif (la balance commerciale) : qui va garantir cela ?
      Cet "eldorado" ne peut être vu que pas des personnes qui n’ont toujours pas compris les vrais enjeux d’aujourd’hui, et dont le seul raisonnement est : "oh de l’énergie, encore de quoi jouer à la croissance du PIB pendant quelques années, ça va bien me permettre d’atteindre la retraite ça..."
      Sept à neuf ans ! Quelle "vision" de l’avenir, bravo ! Quel déni à l’intelligence humaine !
      Et si encore cette "vision" n’existait pas, on pourrait dire "les pôvres, savent pas où aller, alors y vont là ou le vent (de houille) les pousse..."
      Alors que si, on sait bien, il faut juste percuter et s’y mettre : société dé-carbonée (progressivement), énergies renouvelables (la biomasse, voilà un gaz qu’il est Français !), culture raisonnée puis agro-agriculture, ré-équilibrage végétal/animal, arrêt des gaspillages énergétiques (Isolation, réduction de l’agitation automobile), déplacements repensés, déplacements doux, inter-modalité, plus d’exercice et moins d’anxiolytiques, plus d’empathie et moins d’individualisme...
      Et pour terminer aussi à Pékin : que l’Europe réalise qu’il est vain de continuer à courir une course que nous avons déjà perdue à cause des règles du jeu que nous avons nous-même fixées au départ ! La seule solution, bien connue de tous les stratèges industriels : un "leapfrog" sociétal !

      2.03 à 16h50 - Répondre - Alerter
  • Pourquoi ne pas recycler les usines françaises en unités de méthane, qui permettront de gérer les déchets organiques toujours français (entre les crottes des humains et celles de leurs animaux domestiques et d’élevage) ? Cela induira 1 développement massif des toilettes sèches et 1 énoooorme économie d’eau potable qui risque de coûter de + en + cher, vu le gaspillage effectué + pollutions croissantes qui impliquent de + en + de traitements.
    Ainsi parallèlement, verra l’essor du marché de l’emploi ainsi qu’1 éducation populaire massive à l’éco-citoyenneté. Mais lorsque c’est 1 entreprise américaine qui se nomme européan gaz limited, sans réaction de personne d’autre que moi, apparemment, on peut se demander à quand l’intelligence française...à part aller encore exploiter et polluer ailleurs !
    Pauvre France !

    7.02 à 09h38 - Répondre - Alerter
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