France : l'antisémitisme en chiffres

Quatre morts. C’est le bilan de la tuerie devant une école juive à Toulouse. Au lendemain de la tragédie, les médias israéliens s’insurgent, dénonçant une montée de l’antisémitisme dans l’Hexagone. Dans le quotidien Maariv, Ben-Dror Yemini, un éditorialiste de droite, condamne l’apathie des institutions internationales et « le soutien dont cette haine bénéficie » dans la société. Dans un édito titré « Protéger les Juifs de France », le quotidien anglophone Jerusalem Post affirme : « Depuis l’an 2000, les Juifs de France ont été exposés à la plus importante manifestation d’antisémitisme depuis l’Holocauste. »

Vrai ? Selon une étude allemande publiée en 2011, l’antisémitisme n’est pas mort en France. Loin s’en faut. A la question, « pensez-vous que les Juifs ont trop d’influence dans votre pays », 27,7% des 1000 Français interrogés répondaient par l’affirmative. Pas moins de 32,4% estimaient que les « Juifs tirent avantage de leur statut de victimes pendant l’ère nazie » et 25,3% pensaient qu’ils ne « se préoccupent de rien d’autre que d’eux-mêmes ». En revanche, 60,6% des Français estimaient que la population juive « enrichit leur culture ». Et la France n’est pas le seul repère des antisémites. La xénophobie est beaucoup plus forte en Pologne et en Hongrie mais limitée en Allemagne, en Grande Bretagne ou aux Pays Bas, comme le montre le tableau ci-dessous (en anglais) :

A partir des réponses aux questions, les chercheurs ont même établi un classement des huit pays étudiés selon le niveau d’antisémitisme. Résultat : en France « les attitudes antisémites sont en moyenne moins répandues que la moyenne européenne », précisent-ils :

Reste l’assertion du Jerusalem Post : la haine des Juifs aurait fortement progressé ces dernières années. Vrai ? Publiés par le Pew Research Center, les chiffres datent un peu mais concluent en ce sens. Si en 2004, 11% des Français exprimaient un sentiment plutôt négatif vis-à-vis des Juifs, ils étaient 20% en 2008, affirme le rapport de ce think tank américain. Un sentiment surtout marqué chez les personnes âgées et les personnes les moins diplômées :

Un an plus tard, néanmoins, dans une autre enquête réalisée auprès de 1000 Français (parmi un échantillon de 14 000 Européens), le Pew Research Center ne recensait plus que 10% d’opinion négative vis-à-vis de la communauté juive contre 37% en Lithuanie, 29% en Italie, Pologne ou Hongrie.

Mais sentiment antisémite ne rime pas - heureusement - avec passages à l’acte. Ceux-là sont plus difficiles à comptabiliser. Parce qu’ils ne sont pas toujours déclarés sous l’étiquette antisémite, ou même répertoriés tout court, ils passent souvent inaperçus. Le « Service de protection de la communauté juive » s’essaie au triste jeu du décompte chaque année. Dans son rapport sur l’année 2011, il recense 389 menaces et actes antisémites en 2011 contre 466 en 2010 avec une prévalence des « propos, geste menaçant et démonstration injurieuse » (29% des faits) et des « inscriptions » injurieuses (26%). En France, selon ce même décompte, les actes antisémites évolue en dent de scie depuis 2002.

Et dans les autres pays ? Avec les réserves de rigueur, l’Agence européenne des droits fondamentaux (FRA) a compilé données policières et associatives et recensé à son tour les actes antisémites perpétrés dans les pays de l’UE entre 2001 et 2010. Difficile de comparer ces chiffres tant les méthode de comptabilisation sont différentes mais voilà ce que la FRA comptabilise en 2009 en classant les données en officielles (répertoriées par les services de police) et non officielles (compilées par les associations notamment) :

Autriche :