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24-02-2010
Mots clés
Social
Environnement
Agriculture
Interview

Elevage : "les petits producteurs sont marginalisés"

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Elevage : "les petits producteurs sont marginalisés"
 
Au niveau mondial, l'élevage est en plein boom. Mais l'exclusion sociale et les impacts sur l'environnement s'aggravent. Décryptage avec Pierre Gerber, expert en politiques d'élevage à la FAO, l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture.
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ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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Terra eco : Le rapport de la FAO publié la semaine dernière souligne l’importance de l’élevage en terme de revenus et de sécurité alimentaire pour près d’un milliard de personnes. Mais on a l’impression que le boom de la consommation de viande est déconnecté des petits producteurs...

Pierre Gerber : "C’est vrai que dans les pays en fort développement économique, comme le Mexique, le Brésil ou la Thaïlande, il est rare que les produits consommés dans les villes soient fournis par des petits producteurs. Car c’est dans les centres urbains, où les habitudes de consommation changent et les ressources économiques sont plus élevées, que l’on trouve le gros de la croissance de la consommation. Il y a des contre-exemples. En Inde, l’effort du programme Operation Flood pour que l’approvisionnement en lait des villes soit basé sur des coopératives de petits producteurs a été couronné de succès. Mais c’est relativement unique. Bien souvent, dès que le marché passe une masse critique, on a des gros opérateurs qui entrent en jeu et assurent une grande partie de l’offre."

Pourquoi les petits producteurs ne tirent-ils pas leur épingle du jeu ?

"Les petits producteurs sont marginalisés parce qu’en faisant des gros volumes on arrive à des coûts à l’unité bien moindres. Les gros producteurs assurent aussi une qualité fixe et peuvent répondre aux critères de standardisation et de qualité sanitaire imposés par les pays importateurs ou les supermarchés. Ils ont aussi l’accessibilité et la connaissance du marché. Il y a une dichotomie dans ce secteur de l’élevage. D’un côté on a une croissance très forte, avec des changements techniques assez phénoménaux. Même sans subventions, ce secteur s’est développer sans contrainte, ou presque. D’un autre côté, les petits producteurs, c’est à dire le pastoralisme ou l’agriculture villageoise sont très importants mais ne reçoivent presque aucune attention et en souffrent."

Comment inverser la tendance ?

"Si les gouvernements mettent en place des mesures de régulation pour restaurer une meilleure durabilité et une meilleure réponse aux attentes de la société, il va certainement y avoir un tassement de l’avantage comparatif des systèmes industriels. On peut aussi contrebalancer en aidant les petits producteurs à mieux s’organiser, en appuyant le développement et le transfert de technologies, en créant les institutions qui leur permettent de mieux accéder au marché. Mais il faut s’attendre à ce que la tendance lourde de diminution du nombre d’agriculteurs observée dans les pays de l’OCDE ait lieu aussi dans les pays en développement. Et ce n’est pas forcément une mauvaise chose, si il y a de meilleures opportunités dans d’autres secteurs en matière de conditions de travail, de stabilité, de revenus... Le problème se pose quand un gros producteur arrive, s’accapare le marché à la périphérie d’une ville et supplante une bonne partie des petits producteurs. Si les rythmes de transformation dans le secteur de l’élevage et dans les autres pans de l’économie sont similaires, les gens ont au moins une alternative."

Quelles sont les solutions pour limiter l’impact environnemental de l’élevage ?

"Viser une meilleure efficacité dans l’utilisation des ressources. La production du secteur doit doubler d’ici 2050 et il faut vraiment se poser la question : combien d’hectares et de litres d’eau utilisés, combien de polluants émis pour un kilo de protéines ? De manière générale, les solutions techniques existent. Prenons le cas de l’élevage porcin : le problème essentiel est la gestion des effluents, du lisier. Il y a des possibilités comme la production de biogaz qui permet d’éviter les émissions de gaz à effet de serre (GES) dans l’atmosphère et d’utiliser le méthane produit comme substitut aux énergies fossiles. Si maintenant je prends les bovins par exemple, le problème vient essentiellement des émissions de méthane. On peut essayer de les limiter par un changement d’alimentation ou en augmentant la quantité produite par tête de bétail. On a aussi tout un autre potentiel d’atténuation qui réside dans la séquestration du carbone au niveau des prairies, par la mise en œuvre de pratiques adaptées de rotation, d’amélioration des pâturages..."

Mais concrètement comment s’assurer que ces mesures seront appliquées ?

"Cela dépend de qui on parle. Pour le producteur qui a 5 ou 20 porcs au Vietnam, il faut appuyer le transfert de technologies, avoir des programmes de subvention, de formation. Et une fois passée cette barrière on se retrouve avec un environnement mieux préservé et des revenus ou une qualité de vie accrus pour les fermiers. Mais une unité de plus de 30 000 bêtes en Thaïlande par exemple n’a pas besoin de subventions. Là il faut mettre en place des réglementations sur les épandages, le relarguage d’eaux usées dans les cours d’eau etc. Il faut faire attention aux cibles des politiques menée, à leur mise en place et mettre dans la balance les objectifs environnementaux avec ceux de développement rural et de sécurité alimentaire. Autant il est légitime que la Hollande fasse des enquêtes très poussées sur les émissions de GES de son industrie laitière pour essayer de gagner quelques centaines de grammes de carbone par litre, autant pour le Soudan ce n’est pas une priorité. Là la priorité c’est produire plus pour assurer la sécurité alimentaire."

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Journaliste, collaborateur régulier pour Terra eco.

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