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25-02-2015
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Développement Durable
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Ecologie : pourquoi ça ne prend pas

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Ecologie : pourquoi ça ne prend pas
(Crédit photo : Denis Allard - Réa )
 
Des décideurs aux entreprises, des religieux aux étiquetés « verts » en passant par les citoyens, l’écologie ne passionne pas les foules. Voici pourquoi.
Le Baromètre de cet article
ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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Mise à jour le 1er juin 2015 : Selon une étude menée par GreenFlex et l’Ademe (l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie), 23% des Français se désintéressent des problématiques liées à l’environnement, un chiffre en hausse sur un an. 33,8% des personnes interrogées sont d’accord avec la phrase « Cela ne sert à rien que j’agisse pour l’environnement si les autres ne le font pas ».

La pollution des eaux atteint des niveaux inquiétants, l’air n’est pas en meilleure santé, la biodiversité s’érode et le changement climatique est à l’œuvre. Les grands indicateurs de l’état de notre planète sont au rouge. Et pourtant… Selon une étude de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), la dégradation de l’environnement arrivait, en 2014, en bonne dernière position des préoccupations des Français. Elle se classe derrière l’emploi, les déficits publics et la dette de l’Etat, les impôts, l’immigration, la hausse des prix, les inégalités, l’insécurité, l’éducation et le logement (mais devant les banlieues). Certes, il y a eu des avancées – chaque habitant utilise dans sa vie quotidienne deux tonnes de moins de matière qu’il y a vingt ans et les volumes d’eau prélevés par les ménages ont baissé de 3% depuis quinze ans –, mais bien insuffisantes au regard des enjeux écologiques. De nombreux mécanismes de blocages sont en effet à l’œuvre et doivent être surmontés afin de passer à la vitesse supérieure. Tour d’horizon.

Les dirigeants font de la résistance (incohérente)

Force est de constater que les questions écologiques ne sont pas intégrées dans le logiciel des gouvernants français. Virevolte des ministres de l’Ecologie (douze depuis quinze ans avec un temps moyen de séjour d’un an et deux mois, contre six ministres de la Défense avec trois ans en moyenne de présence), coupes budgétaires à répétition pour le ministère concerné (6,7 milliards d’euros en 2015 contre 8,3 milliards d’euros en 2012), il y a de quoi rester perplexe… Sans parler du manque flagrant de cohérence ! Mesure phare du Grenelle de l’environnement, l’écotaxe poids lourds a été votée au moins à six reprises depuis 2009, par la droite comme par la gauche, pour finir par être tout simplement abandonnée en octobre dernier. Comment expliquer cette résistance de nos dirigeants vis-à-vis de l’écologie ? Un rapport, paru le 9 février 2015 et réalisé par le think tank La Fabrique écologique, tente d’apporter des éléments de réponse. La centralisation de l’Etat, les grands corps administratifs et techniques peu sensibles à ces questions complexes, le refus de l’expérimentation, la culture française marquée par l’ambivalence à l’égard de la nature – qui, si elle est patrimoine, a aussi vocation à être transformée – expliqueraient le manque de perméabilité de l’Etat aux enjeux écologiques. « Notre société est au bord de la transition écologique, mais elle ne plongera pas tant qu’elle n’aura pas eu une impulsion d’en haut », estime Lucile Schmid. Pour la vice-présidente de la Fabrique écologique, les décideurs nationaux auraient tout intérêt à s’appuyer sur les nombreuses initiatives territoriales qui ont vu le jour. « A l’échelle des régions ou des grandes villes, les politiques écologiques ont pris une ampleur qui leur donne une vraie consistance. Cette écologie en actes indique la voie à suivre au niveau national », poursuit-elle.

Des écolos pas très vendeurs

Pourquoi, dans la même optique, ne pas s’appuyer sur les initiatives de la société civile pour passer la seconde ? Les étiquetés « écolos » – parti politique vert et organisations environnementales – ont bien du mal à se faire entendre et à peser dans les débats par rapport à certains de leur homologues européens. Europe Ecologie - Les Verts (EELV) reste un petit parti, peu puissant. Il comptait, en 2014, 10 000 adhérents, loin derrière les 170 000 militants affichés par l’UMP, les 83 000 du Front national et les 60 000 du Parti socialiste. « Ce parti est moins sensible au côté rentable de son discours – très conceptuel et évolutif dans le temps – que d’autres partis politiques. Il considère que, comme ses idées ont une certaine valeur, elles vont s’imposer d’elles-mêmes », avance Julien Longhi, maître de conférences en sciences du langage à l’université de Cergy-Pontoise, qui a comparé l’efficacité des discours vert et frontiste. En somme, les écologistes doivent inventer un vocabulaire de l’action, adapter leur discours aux différents publics et trouver celui qui incarnera au mieux le message.

Quant aux associations et organisations environnementalistes, souvent perçues en France comme les sous-fifres de l’action publique, elles semblent aussi devoir se réinventer. « Nous comprenons peut-être mal la société française, qui est très éclatée. Nous devons aussi sortir du conservatisme associatif lié à la faiblesse de nos moyens financiers, admet Denez L’Hostis, président de l’association France nature environnement (FNE), forte de 800 000 adhérents. Mais ce qui est très positif, c’est l’existence d’un mouvement citoyen très puissant en France qui affleure. Peu de combats passent à la trappe. » Que ce soit en matière de transport, d’alimentation, d’habitat, de consommation… de simples citoyens inventent de nouvelles manières de vivre. « Pourquoi ne pas soutenir ces pionniers de façon qu’ils diffusent l’innovation dans les autres strates de la société ? Il faut oublier ceux qui ne veulent pas changer pour se concentrer dans un premier temps sur les autres », analyse Séverine Millet, cofondatrice de l’association Nature humaine, spécialisée dans l’accompagnement au changement.

Entreprises, des avancées en reculant

(Crédit photo : Benoit Tessier - Reuters)


C’est vrai, les entreprises ont progressé sur la question environnementale. « Il était impensable, il y a quinze ou vingt ans, de voir un représentant du patronat évoquer les questions de biodiversité. Si elles ne sont pas devenues écolos, il y a des entreprises qui ont une vraie conscience des enjeux environnementaux et en tiennent compte », souligne Denez L’Hostis. Des avancées qui se sont pourtant souvent faites à reculons. Frein des quatre fers contre les lois visant à encadrer l’utilisation de produits chimiques ou à limiter les émissions de CO2 des voitures, résistances du secteur agricole… les exemples sont nombreux. « Pour les entreprises, le constat est paradoxal : la France compte de grands groupes industriels mondialisés et des PME disposant de savoir-faire importants sur des secteurs clés de la transition écologique et ils constituent pourtant l’un des principaux facteurs de résistance », avance Lucile Schmid, de la Fabrique écologique. Embrasser cette transition implique de repenser leur modèle traditionnel d’activités et de convaincre leurs actionnaires. Alors, comment accélérer le mouvement ? « Cela ne va pas se faire d’un coup de baguette magique, mais tous les acteurs doivent évoluer et l’opinion publique, qui doit être sensibilisée par les pouvoirs publics, est un moteur capital », avance Hélène Valade, présidente du Collège des directeurs du développement durable. On l’aura compris, sans la perspective de nouveaux marchés ni l’implication directe des pédégés sur ces questions qui touchent à la stratégie globale, les entreprises auront du mal à sauter le pas une bonne fois pour toutes.

Dialogue de sourds avec les scientifiques

Les Français entretiennent une relation ambivalente avec la science. Selon le baromètre Ipsos de 2013 « les Français et la science », s’ils lui accordent leur confiance – elle reste perçue comme un progrès pour la société –, la défiance envers les scientifiques est réelle. Une majorité des personnes interrogées remettent en cause leur indépendance vis-à-vis de différents groupes de pression et donc leur capacité à dire la vérité. Et si en plus un climato-sceptique passe par là en affirmant que l’homme n’est pas pour grand-chose dans le dérèglement climatique, le doute s’installe. Ajoutez à cela la difficulté des scientifiques à communiquer sur des enjeux à long terme qu’eux-mêmes ont parfois du mal à cerner au vu de la complexité des phénomènes… et le chemin se transforme en parcours du combattant ! « Il est très difficile pour nous d’expliquer que nos actions d’aujourd’hui auront des conséquences sur le climat à partir de la seconde partie du XXIe siècle. C’est toute la difficulté du message à faire passer », explique Jean Jouzel, climatologue et vice-président du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec). A force de rapports alarmistes, le Giec a cependant réussi à marquer les esprits. Selon l’Ademe, le changement climatique arrivait, en 2014, dans le top trois des préoccupations environnementales des Français avec les pollutions de l’air et de l’eau. François Hollande compris. Le président de la République reconnaissait en novembre dernier que le discours des membres du Groupe avait déclenché sa prise de conscience écologique. « Le Giec a permis de populariser la question du changement climatique, mais cela n’offre pas une manière de faire. Les analyses scientifiques doivent pouvoir influer sur tous les milieux », précise Lucile Schmid.

La religion se réveille… doucement

(Crédit photo : Emmanuel Dunand - Reuters)


Le pape François – après avoir posé en 2013 aux côtés d’Argentins en tenant à la main un T-shirt anti-fracturation hydraulique – travaille à l’écriture d’une encyclique, une lettre destinée à tous les évêques, exposant la position officielle de l’Eglise catholique sur les relations entre l’homme et la nature. Une grande première ! On ne peut en effet pas dire que la mobilisation des représentants religieux sur l’écologie soit jusqu’ici en pointe. Selon le sociologue et historien des religions Frédéric Lenoir, dans un entretien donné au programme télévisé Le Jour du Seigneur, l’explication vient du fait que les grandes religions monothéistes – judaïsme, christianisme, islam – et le bouddhisme considèrent que l’homme est supérieur à la nature.

Les différentes autorités religieuses se mettraient seulement à prendre conscience que l’homme a été trop loin dans la maîtrise de son milieu, provoquant un risque d’autodestruction. « Elles sont en train de mettre en place des discours écologiques, ce qui n’est pas simple car elles doivent aller chercher dans leurs propres textes ce qui pourrait justifier une action », détaille Frédéric Lenoir.

Et moi, et moi, et moi…

(Crédit photo : Jeff Haynes - Reuters)


« Les gouvernants, les entreprises et les collectivités ne prennent pas la mesure de leurs responsabilités. Cela hyper-responsabilise les citoyens, les met dans l’impuissance et donc, majoritairement, ils n’agissent pas », assène Séverine Millet. Sans compter que nous sommes des êtres d’habitude peu adeptes du changement… a fortiori pour des bénéfices différés dans un avenir lointain. Nos préoccupations sont à court terme. « Les principaux soucis des mammifères, y compris des humains, sont la reproduction, l’alimentation et la nécessité de trouver un abri. On ne peut voir au-delà que si tous nos besoins primaires vitaux sont remplis. On peut ainsi être en accord avec les messages écologiques mais ne pas les prioriser », expose Sylvie Granon, chercheuse en neurobiologie de la prise de décision au Centre de neurosciences Paris-Sud de l’université d’Orsay. Pas facile dans ces conditions où l’intérêt personnel prime de modifier notre style de vie pour protéger la planète. Comme l’explique Séverine Millet, changer ses habitudes est un travail de longue haleine. « Une habitude est une stratégie du cerveau pour utiliser un minimum d’énergie. Il y a donc un apprentissage à faire sur de longues périodes pour qu’une nouvelle habitude devienne un comportement sans effort. » Sur le plan cognitif, l’apprentissage précoce des enfants serait ainsi une manière de favoriser la mise en place de ces nouvelles habitudes. Tout comme le fait de montrer que l’écologie peut répondre à certains besoins concrets et immédiats. « Si on veut changer les comportements, la première chose à faire c’est de faciliter la vie des individus, leur faire visualiser les conséquences de leurs actions et bannir les concepts abstraits », avance Olivier Oullier, chercheur au Laboratoire de psychologie cognitive de l’université d’Aix-Marseille. Ainsi, lors d’une campagne d’incitation à l’isolation des logements au Royaume-Uni, il est apparu que certains individus ne faisaient pas isoler leur toit parce qu’ils n’avaient pas envie de… vider leurs greniers ! Quand le dispositif a intégré une offre de débarras de greniers, il a commencé à prendre. De même, l’importance du groupe et des comparaisons sociales semble cruciale. Selon Olivier Oullier, des expériences ont montré que nous régulons davantage notre consommation électricité si nous savons… que nous sommes moins performants que nos voisins… —
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  • Tout le monde doit se sentir concerné par l’écologie. C’est notre planète nous devons tous en prendre soin et apprendre à nos enfants à faire de même.

    Aurel du guide choisir un siège auto pour bébé

    26.05 à 10h16 - Répondre - Alerter
  • Salut a tous les copains,
    Je suis Patrick BRUEL.
    Cordialement,
    La direction.

    10.01 à 14h37 - Répondre - Alerter
  • Je contribue également avec des petits gestes, j’ai un parc de quad et je fais en sorte que chaque piece de quad soit bien changé pour que ça ne pollue pas, maintenant j’attends de voir ce que font les politique

    28.07 à 07h25 - Répondre - Alerter
  • L’attitude de notre gouvernement et ses décisions sont en contradictions avec une "gouvernance écologique". Il autorise les fermes usines là où les rejets saturent déjà les terres et les eaux, il veut construire des aéroports inutiles, il favorise le transport automobile au détriment du rail, etc et on voudrait que le citoyen ait une conscience écologique !
    Tant que l’exemple ne viendra pas du haut, l’égoïsme du bien être immédiat alimenté par l’hyper consommation prévaudra.
    Voilà pourquoi "ça ne prend pas" !

    23.07 à 19h04 - Répondre - Alerter
  • bien sûr les actions des "citoyens ordinaires" sont importantes mais les plus graves dégradations sont réalisées par ceux qui ont les outils de production et qui veulent toujours davantage de rentabilité. Tant que ces décideurs-là ne prendront pas en compte l’avenir de la planète, nous continuerons à aller vers la fin du monde que nous connaissons actuellement- Culpabiliser les citoyens accentue encore le gouffre qui nous sépare des vrais pollueurs- l’écologie devrait être la matière principale à apprendre dans les écoles- obligatoire et à gros coefficient aux examens avec recherche de solutions comme débouchés porteurs d’emplois- dans tous les pays développés- si on n’apporte pas de solutions on épousera le schéma prévu par Lévy Strauss :"La terre a commencé sans l’homme et terminera sans lui" ! et les autres espèces terrestres ne s’en plaindront pas !

    24.03 à 14h39 - Répondre - Alerter
    • bien d’accord.
      Je continue , par réflexe et conscience, de contribuer à "soutenir"la planète par mes petits gestes mais, hélas, son avenir est entre les mains des "décideurs".
      Si au moins les religieux pouvaient provoquer une prise de conscience et se mettre d’accord pour reconnaître que notre planète est notre déesse, le paradis sur terre serait proche...
      "On a tout pour être heureux.."disait la chansonnette
      Oui," l’écologie devrait être la matière principale à apprendre dans les écoles...."
      Dimanche, second tour des élections. Chez nous (Ploermel,56) le choix est : UMP ou FN . Ils se réclament tous d’ une "fibre écologique"...De quoi devrais-je me plaindre ? J’ai l’embarras du choix !

      24.03 à 22h30 - Répondre - Alerter
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