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24-07-2014
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Culture

Dix livres à (re)lire d’urgence cet été !

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Dix livres à (re)lire d'urgence cet été !
((Crédit photo : Florin Gorgan - flickr))
 
Enfin du temps libre pour lire calmement. Voici notre sélection des livres à déguster au soleil estival.
Le Baromètre de cet article
ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
SUR LE MÊME SUJET

- Pour les enfants

Le Baron bleu, de Gilles Baum et Thierry Dedieu, (Seuil), 40 p., 12,90 euros

Pour passer inaperçu dans le ciel et observer les oiseaux, le Baron a peint son avion en bleu. Mais un conflit éclate, et il doit partir bombarder l’ennemi. L’aviateur, qui n’a que sa bibliothèque sous la main, s’exécute avec des livres assommants. Jusqu’au jour où Guerre et paix tombe sur un officier si absorbé par le roman qu’il en oublie de donner ses ordres. Le Baron va alors balancer de la bonne littérature pour faire se rapprocher les adversaires. Un opus drôle et percutant pour les enfants. —

- Pour imaginer

Le Village évanoui, Bernard Quiriny, Flammarion, 218 P., 17 euros

Ne cherchez pas Châtillon-en-Bierre sur une carte. Si ce roman démarre par une description wikipédiesque d’un village « situé entre Auvergne et Morvan », il n’est que le fruit de l’imagination de l’auteur. Pour mieux disparaître… Car un jour, les 2 000 habitants du canton constatent qu’ils ne peuvent en partir : les voitures tombent en panne au même endroit sur la route ; au-delà de cette frontière invisible, piétons et cyclistes avancent en vain dans un paysage infini ; Internet et téléphone sont coupés ; plus personne n’arrive à Châtillon. Ni les personnages ni le lecteur n’auront d’explications au phénomène. L’auteur s’intéresse, lui, aux effets de l’autarcie sur la communauté. Vifs débats sur la répartition et la production des vivres, recyclage, regain des vocations religieuses, tentation de la loi du plus fort… Le village connaît un retour au Moyen-Âge et « anticipe le futur : fin du pétrole, des communications faciles et des voyages instantanés ». Le récit, drôle et tragique, livre une réflexion vertigineuse sur la place du local dans notre monde. —

- Pour réfléchir

La Malfaçon, Frédéric Lordon, Les Liens qui libèrent, 304 p., 20,50 euros

Faudra-t-il s’étonner si le Front national et l’abstention sortent victorieux des élections européennes ? « La montée des extrêmes droites un peu partout en Europe est l’évident symptôme » de la négation de toute « souveraineté populaire » par l’Union européenne (UE), répond Frédéric Lordon. La charge est virulente contre le couple franco-allemand, dont les élus, socialistes comme de droite, ont fait de l’UE un « laboratoire du néolibéralisme » (spéciale dédicace à Jacques Delors et Pascal Lamy…), où la politique est déconnectée des suffrages et résulte de dispositifs gravés dans le marbre des traités. Qu’importe si l’austérité génère un taux de chômage dépassant les 25 % en Europe du Sud, voire une baisse de l’espérance de vie… Qu’importe si les peuples disent stop (référendum de 2005)… L’Europe s’enferre dans ses carcans – voir le renforcement des sanctions prévu par le pacte budgétaire européen. En cause, « l’obsession monétaire » de l’Allemagne, allergique à toute intervention politique pour faire marcher la planche à billets, analyse Frédéric Lordon, esprit brillant peu soupçonnable de germanophobie.

On lui doit notamment D’un retournement l’autre (Seuil, 2013), pièce de théâtre en alexandrins, formidable d’humour et de pédagogie, sur la transformation de la crise des subprimes en crise des dettes souveraines. Des événements dont on paye aujourd’hui la facture : pour sauver les banques, les gouvernements européens ont creusé leurs dettes, de près de 50 % en France à plus de 400 % en Irlande !

« Il faut dire que nous ne sommes pas comptables [de ce surplus de dettes]. Et par conséquent que nous ne le paierons pas. » L’économiste évalue toutes les conséquences et les conditions du défaut, à commencer par la sortie de l’euro, préalable à une « monnaie commune », avec ou sans l’Allemagne. Cette « stratégie du choc » sera d’abord nationale, car l’UE est irréformable, juge l’auteur. Plus souverainiste que ses collègues « Economistes atterrés », il récuse l’amalgame avec le FN, dont il démonte les entreprises de récupération idéologique. On peut, selon lui, s’opposer à « la mondialisation des conteneurs sans tourner le dos à toutes les autres manières (…) de s’ouvrir au monde »… Lucide et décapant. —




- Pour apprendre

La Traversée des Alpes, d’Antoine de Baecque (Gallimard, 426 p., 24,50 euros)

Un mois de rando solitaire sur le GR5, huit à neuf heures de marche par jour, 650 kilomètres parcourus du lac Léman à Sospel (Alpes-Maritimes), sur les bords de la Méditerranée : l’historien Antoine de Baecque fait de cette aventure datée de 2009 un exercice d’histoire expérimentale. Il entremêle le récit de son voyage et de ses rencontres aux études savantes et éclectiques sur le massif : histoires des routes du sel, du développement touristique (randonnée ou… ultra-trail du mont Blanc), des aménagements. Frais et copieux. — S.B.

- Pour se souvenir

Le Pouvoir de la pédale, d’Olivier Razemon. Rue de l’échiquier, 192 p., 15 euros

Le Retour de la bicyclette, de Frédéric Héran. La Découverte, 256 p., 17,90 euros

Si vous pensez que les Néerlandais pédalent plus que les Français du fait du plat pays qui est le leur, si vous croyez que les Latins sont lâchés du peloton par des Scandinaves ou des Germains plus écolos, si rouler à vélo en ville rime selon vous avec périls, alors foncez sur ces deux bouquins. Parus à quelques jours d’écart, ces plaidoyers pour le biclou démontent avec plaisir ces clichés. Les styles sont différents : Frédéric Héran, économiste spécialiste des transports, livre une analyse politique et historique, brillante et très documentée ; le journaliste indépendant Olivier Razemon oscille entre enquête et reportage, humour et coups de gueule.

Les références sont similaires – les deux auteurs se citent mutuellement – et le contenu des ouvrages, proche. Mais on y apprend des tas de choses : sur l’invention progressive du vélocipède, de la « machine à courir » de Karl Drais, la draisienne (1817), jusqu’aux Vélib ; sur ce loisir d’aristos devenu instrument d’émancipation des femmes (elles ont ainsi acquis le droit de porter des pantalons grâce au vélo, en 1892…), puis moyen de transport populaire.

Jusqu’à ce que, dans tous les pays industrialisés après-guerre, la petite reine soit supplantée par la voiture. Selon Frédéric Héran, la motorisation est alors particulièrement forte (et le regain ultérieur du vélo, plus délicat) dans les nations riches d’une puissante industrie auto, souvent issue du cycle (Peugeot en France, Rover en Grande-Bretagne). Le succès des cyclomoteurs (Solex, Mobylette…) chez les jeunes est, d’après l’économiste, une autre explication à la poursuite du déclin français.

Ainsi, dans les années 1970, le choc pétrolier, la pollution et la contestation croissante de l’urbanisme probagnole poussent certains pays à investir massivement dans les aménagements cyclables, la réduction de la place de la voiture en ville et les incitations fiscales. Mais la France attendra les années 2000 pour réagir : résultat, moins de 3 % des déplacement s’effectuent aujourd’hui chez nous à bicyclette, contre 18 % au Danemark et 27 % aux Pays-Bas. Nos maillot jaunes sont loin des leaders européens (8 % à Strasbourg et Bordeaux, 35 % à Copenhague…), et la pratique du vélo est beaucoup moins importante dans les banlieues de nos agglomérations que dans les villes centres, alors que les proportions sont similaires en Allemagne (10 % des déplacements). Les distances ne sont pourtant pas un argument : 60 % des déplacements en ville sont inférieurs à 3 km.

« En France, les efforts de modération de la circulation automobile sont surtout réalisés dans les centres, les périphéries urbaines et les villes moyennes restant souvent abandonnées à la voiture », souligne Frédéric Héran. Il voit dans la « pacification » des rues (comme les zones 30, qui permettent de réduire de 10 % à 30 % le nombre de victimes) et des aménagements urbains (contre-sens cyclables généralisés, seconds vélos dans les gares) des clés pour un vrai come-back du vélo.

Il s’agit de changer le regard sur le biclou, souvent vu comme dangereux. Ou ringard, pour les jeunes des quartiers populaires, observe Olivier Razemon. Dans les familles issues de l’immigration, les engins motorisés sont en effet un signe de réussite et d’intégration sociale. Et les cyclistes actuels, plus bourgeois et intellos que ceux des années 1930, sont souvent raillés – des hipsters qui ignorent tout de la vie au-delà du périph !

Aussi, pour le tandem Razemon-Héran, le vélo ne doit plus être présenté comme un « talisman écolo » : afin d’encourager la pratique, il faut rappeler que pédaler est la façon la plus rapide, pratique et économique de se déplacer, et la meilleure pour la santé. Aller tous les jours à vélo à son travail, c’est deux années et demie d’espérance de vie supplémentaire, et 15 milliards d’économie pour la Sécu, soit l’équivalent du trou actuel ! C’est aussi une aubaine pour les finances locales : une piste cyclable est 200 fois moins chère qu’une autoroute urbaine, et 25 fois moins qu’un tramway. Les auteurs en sont convaincus : à l’heure de la crise écologique et économique, le vélo redeviendra un mode de transport dominant, qui, à l’horizon 2050, pourrait représenter 40 % des déplacements. En selle ! —

- Pour le plaisir

Dans la lumière, de Barbara Kingsolver, 560 p., 24,50 euros

Jeune mère au foyer un peu paumée, Dellarobia découvre dans la forêt un phénomène étrange, une lumière jaillie des Appalaches. En fait, des milliers de papillons jaunes, agrippés aux arbres. Que viennent faire ici ces monarques, qui passent d’ordinaire l’hiver au Mexique ? Des scientifiques évoquent un effet du changement climatique. Le beau-père de Dellarobia n’en a cure : éleveur étranglé de dettes, il veut déboiser la montagne. Romancière, journaliste et poète américaine, Barbara Kingsolver est une activiste écolo. Sur un fond engagé, mais pas manichéen, elle brosse un superbe portrait de femme, drôle et dramatique. Déchirée entre un mari médiocre et des désirs inassouvis, Dellarobia doit composer avec sa famille fauchée, et sa communauté, rurale et religieuse. Et tente d’accorder ses principes avec un quotidien difficile – la scène de ménage pendant les courses de Noël à la Farfouille est, à ce titre, un petit bijou. —

- Pour résister

Lip, des héros ordinaires, de Laurent Galandon et Damien Vidal, (Dargaud), 176 p., 19,99 euros

Plogoff, de Delphine Le Lay et Alexis Horellou, (Delcourt), 192 p., 14,95 euros

Malpasset, de Éric Corbeyran et Horne (Delcourt), 160 p., 18,95 euros

1974 : une lutte s’achève avec le retour au travail des ouvriers de Besançon (Doubs), une autre s’éveille à la pointe du Raz, dans le Finistère, où l’Etat veut construire une centrale nucléaire. Lip et Plogoff sont depuis devenus des symboles de résistance citoyenne victorieuse, contre le démantèlement d’une entreprise (rentable) de 1 300 salariés par son actionnaire et contre un projet sur un site remarquable, lancé sans consultation des habitants. Leurs noms résonnent avec les conflits actuels : Notre-Dame-des-Landes ou les Fralib, à Marseille. Pas étonnant donc qu’ils deviennent des sujets de bande dessinée, genre de plus en plus attaché à l’histoire et à l’actualité.

Lip, des héros ordinaires est, à ce titre, une vraie réussite. Laurent Galandon et Damien Vidal restituent avec une précision d’horloger le déroulé des événements. En 1973, les ouvriers (majoritairement des ouvrières) imaginent d’autres moyens pour sauver leurs emplois, et passent de la réduction des cadences à l’occupation de l’usine, puis à l’autogestion. Derrière le slogan « On fabrique, on vend, on se paye », le mouvement suscite une ferveur qui gagne toute la France, Lip devient une affaire d’Etat. Les auteurs convoquent des figures du mouvement et ravivent les débats au sein de l’usine, vécus au travers de personnages fictifs, dont Solange. Plus cette jeune ouvrière s’implique dans le conflit, plus elle s’affranchit de son réac de mari et se réalise, reflétant en cela l’évolution de la condition féminine.

Dans Plogoff, les femmes sont aussi aux premières loges. Delphine Le Lay et Alexis Horellou suivent en effet souvent des épouses de marins. Ces Breton(ne)s déterminé(e)s rejettent la volonté de l’Etat d’implanter chez eux – ou ailleurs – une centrale nucléaire, « cochonnerie pour nous, pour la mer, pour la terre ». Les héros du récit n’ont pas l’épaisseur romanesque des Lip, et les auteurs les délaissent parfois trop au profit d’une lutte collective, dont l’âpreté singulière est toutefois fidèlement restituée. C’est une vraie guérilla qui, du blocage des routes au boycott de l’enquête publique, en passant par les procès de militants, s’est violemment heurtée au pouvoir et à ses CRS.

Plus paisibles, des méthodes importées d’un autre conflit emblématique des années 1970, le Larzac – manifs spectaculaires, achats collectifs de parcelles, construction d’une bergerie… –, ont aussi contribué à populariser Plogoff. Elles ont conduit en 1981 à l’abandon du projet de centrale (et à celui d’extension du camp militaire du Larzac…), après l’élection de François Mitterrand, qui a su capitaliser sur ces luttes, symptomatiques de la France de l’après mai-68 et du début de la crise.

Eric Corbeyran et Horne remontent, eux, plus loin dans le temps. Malpasset est le nom d’un barrage dans le Var, dont la rupture, le 2 décembre 1959, provoqua la submersion de Fréjus et fit 500 morts : la plus grande catastrophe civile du XXe siècle en France. Cette bédé se fonde aussi sur des témoignages directs, ceux d’une quinzaine de survivants, qui, pour beaucoup, ont perdu des proches. Leur parole est si forte que les planches proposent essentiellement une sobre restitution des entretiens.

S’appuyant sur les procès qui ont suivi le drame, les auteurs reviennent sur ses causes. La retenue d’eau de 60 mètres de haut, vouée à alimenter les agriculteurs et développer le tourisme de masse, a été construite avec peu d’argent et sans étude géologique préalable. Mais on savait le barrage fragile, si bien qu’il n’était jamais rempli qu’au tiers de sa capacité… et ne servait à rien. Jusqu’à ce que des pluies diluviennes remplissent trop le réservoir et que la roche cède. Comme ils pourront s’inspirer de Plogoff, les opposants aux « grands projets inutiles » liront avec intérêt ce récit d’une catastrophe causée par un éléphant blanc.

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