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7-10-2004
Mots clés
Société
France

Changement de direction

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Des dirigeants d'entreprises ont lâché le pouvoir, la voiture de fonction, la secrétaire particulière et les stock-options pour endosser l'habit d'agriculteur, d'écrivain ou de caviste, dont ils rêvaient. D'autres, que le travail a mis à l'abri du besoin, hésitent à franchir le cap. Portraits d'ex-forçats du business.
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Pendant des années, Laurent Le Moigne a collectionné les étiquettes de bouteilles de vin. Depuis deux ans, il empile ses crus préférés sur les étalages d’une boutique où se mêlent moellons de pierre et décor urbain aux tons rouge et noir. Silhouette trapue, chaussures tendance, Laurent Le Moigne n’est pas un caviste ordinaire. En 2001, ce trentenaire au cheveu grisonnant endossait encore le costume trois pièces du dirigeant d’entreprise. La société de conseil dont il était co-fondateur et associé employait alors quelque 1500 personnes. "J’étais directeur général, responsable des activités internationales", raconte-t-il. Un poste enrichissant mais oppressant. "J’étais trop investi. Pendant dix ans je me suis dit "plus tard ce sera cool". Sans jamais rien changer".

Librairie ou couches-culottes ?

Pourtant Laurent Le Moigne a bien franchi le Rubicon. Avec Hervé, son associé dans le Vin en tête, il a entamé à l’automne 2001 une année sabbatique pour sillonner le vignoble français, en quête de terroir et de produits non formatés, "pas comme ceux que l’on trouve dans les chaînes de cavistes...". Côtes de Nuits, Madiran, Bourgueil, pâté de cailles, confitures... Les produits savoureux de cette quête emplissent la boutique parisienne, au comptoir de laquelle lui et son compère se relaient en quasi-mi-temps. "Je consacre le reste de mon temps à mes deux enfants, retrouve mes amis pour lesquels je n’étais plus qu’une image sociale. Et je lis", confie-t-il.

Si l’ampleur du phénomène reste difficile à évaluer, le cas du directeur général devenu caviste n’est pas isolé. "La plupart des dirigeants que je connais ont envie de changer de vie, assure Alexandre Noto, le président du cabinet de recrutement Concerto. Tous me disent leur rêve d’ouvrir un restaurant à vins ou une librairie de livres anciens. Ils me confient leur ras-le-bol du stress et de la pression". Contraints de faire avec une norme à laquelle ils ne souscrivent pas toujours, les dirigeants paient leur trajectoire par un renoncement à la fantaisie. D’où, parfois, un malaise. "On peut avoir une vocation pour la musique ou la peinture mais je ne connais personne qui se dise "j’ai envie de monter une entreprise qui fabrique des couches-culottes et de manager 3000 salariés". A la tête d’une entreprise on est dans schéma logique, pas dans une démarche hédoniste", observe Alexandre Noto.

120 000 euros annuels, plus voiture de fonction

Les lectures du caviste Laurent Le Moigne l’amèneront peut-être sur les territoires imaginaires de Marc Durin-Valois. A 45 ans le "jeune" écrivain a tourné la page du "schéma logique de l’entreprise". Fils d’un expert du FMI, diplômé d’HEC, il a assuré la direction marketing du groupe CCI de Nice et occupé la tête de la rédaction du magazine Stratégies. "En fait j’étais bien armé sur le plan des diplômes, mais pas tellement doué pour les affaires", confie-t-il. Cela ne l’a pas empêché de tracer sa route, porté par un poste à 120000 euros annuels, plus voiture de fonction. "Et puis un jour, j’ai réalisé que cette carrière à la fois prenante et ronflante engendrait une déperdition de temps, voire d’existence".

Marc Durin-Valois plaque tout et disparaît. "J’étais sans domicile fixe. Je squattais à droite à gauche en considérant qu’il me fallait m’affranchir du monde matériel. Je n’avais plus de liens sociaux, plus d’amis ni de famille". Au volant d’une épave il erre. Fait une halte à l’Espace des possibles, camping de Charente-Maritime rendu célèbre par Michel Houellebecq, "un endroit où se rencontre toute une génération de personnes en rupture". Puis se lance dans l’écriture, deux ans de travail en vivant d’indemnités chômage. L’empire des solitudes paraît en 2001, suivi de trois autres ouvrages, dont Chamelle et, dernier en date, Les voix intérieures. "Aujourd’hui je construis ma carrière dans un domaine nouveau. Ce genre de rupture permet de revenir à ce pour quoi on est fait", insiste-t-il.

Un emmerdement maximal

Mais de l’idée de tout plaquer à la rupture effective, il y a un cap. "L’idée survient si l’on se demande ce qu’on a fait de soi, si l’on a pris le bon chemin. Quand on prend conscience qu’on n’a pas réalisé ses rêves de jeunesse, on peut se dire qu’il reste une chance de se raccrocher aux branches, observe Bernard Préel, consultant du Bipe auprès de chefs d’entreprises. La rupture en elle-même peut survenir à l’occasion d’une crise de milieu de vie, d’un choc familial, mystique ou de santé". "C’est la conjonction de deux facteurs, confirme Marc Durin-Valois. D’abord un job qui devient pesant, un emmerdement maximal que tout le monde connaît plus ou moins mais que l’on ne supporte plus. Ensuite un problème personnel qui se surajoute". "Ma femme est partie, j’ai pris un long congé maladie mais n’ai jamais pu retourner au travail. J’étais cassé, raconte Laurent Le Moigne. Je me suis dit : "c’est un comble de me retrouver à la tête des activités internationales d’une grande société alors que cela ne me correspond en rien". Je cherchais surtout une activité professionnelle guidée par le plaisir plus que par l’ambition sociale. Je me suis retrouvé avec mes enfants, j’ai vu la vie sous un angle différent"...

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  • Céline Robert : > Changement de direction

    J’ai lu avec intérêt et amusement votre article sur ces "dirigeants d’entreprises" qui ont "lâché le pouvoir, la voiture de fonction, la secrétaire particulière et les stock-options", pour s’en aller à la campagne ou ouvrir une cave à vin. Tout cela laisse rêveur. Dans l’entreprise où je travaille on trouverait des dizaines de candidats au départ et au changement radical de vie. Je ne parle pas de gens aigris mais de tous ceux qui se disent chaque jour "ah si seulement ...". Comme je les comprends. Mais on voit bien avec vos témoignages qu’une fois de plus le nerf de la guerre est l’argent. Personne ne peut réellement prendre le risque de quitter le confort douillet d’une entreprise (même si l’on s’y ennuie au plus haut point) pour partir à l’aventure. Ou alors quelques "allumés", quelques marginaux. Nous sommes prisonniers, car dépendants de la société de consommation. D’ailleurs ce n’est pas obligatoirement grave. Le tout est d’en être conscient.

    10.10 à 21h17 - Répondre - Alerter
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