publicité
haut
Accueil du site > Actu > Nature > Bois illégal : pourquoi le règlement européen reste feuille morte
16-12-2013
Mots clés
Bois-forêts
France

Bois illégal : pourquoi le règlement européen reste feuille morte

Taille texte
{#TITRE,#URL_ARTICLE,#INTRODUCTION}
Bois illégal : pourquoi le règlement européen reste feuille morte
(Crédit photo : Greenpeace)
 
Adopté en mars, le règlement censé lutter contre les importations illégales de bois dans l'Union européenne n'a été appliqué qu'une fois jusqu'ici, par l'Allemagne. Pourquoi tant de lenteurs ?
Le Baromètre de cet article
ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
SUR LE MÊME SUJET

Ça valait bien un communiqué de presse. Le 11/12/13, l’ONG Greenpeace a voulu marquer un événement : pas la date, non, mais la première saisie de bois illégal sur le territoire de l’Union européenne depuis que le règlement sur le bois (le RBUE), qui interdit l’importation illégale de bois en Europe, est entré en vigueur, le 3 mars dernier. Difficile a priori de savoir s’il fallait se réjouir de cette nouvelle, ou la déplorer.

Un optimiste aurait pu en déduire que ce nouveau dispositif contraignant, qui oblige un importateur de bois à justifier solidement l’origine de sa marchandise, est redoutablement efficace. Il aurait pu croire que, par la seule force de son entrée en vigueur, le RBUE a dissuadé la plupart des organisations criminelles de décharger leur cargaison de bois coupé sans autorisation dans les ports européens. Sacrée réussite quand on sait que le bois illégal représente encore 30% des échanges de cette matière première dans le monde, selon Interpol, pour une valeur d’environ 11 milliards de dollars (8 milliards d’euros) contre 13 milliards (9,5 milliards d’euros) générés par le trafic de drogue. Rien qu’en France, 10% à 19% des bois importés dans l’Union européenne proviennent du commerce illégal, selon des chiffres 2011 du ministère de l’Ecologie.

L’arbre qui cache la forêt

Un réaliste en conclut simplement que ce règlement, adopté après presque dix ans de tractations, n’est pas appliqué. S’il y a bien une « vraie inflexion en 2013 des importations de bois », selon Frédéric Amiel, chargé de campagne forêts chez Greenpeace, c’est davantage lié à « la situation générale du secteur », en perte de vitesse. En réalité, les mètres cubes de wengé, ce bois précieux venu de République démocratique du Congo, saisis par les autorités allemandes sont en fait... l’arbre qui cache la forêt.

La preuve : Greenpeace avait déjà alerté les autorités belges, en août, qu’une cargaison de bois congolais illégal – celle-là même que les Allemands ont saisie – allait arriver à Anvers, en Belgique. Et malgré l’absence de preuves concluantes sur sa légalité, censées être obligatoirement apportées par son importateur (l’entreprise suisse Bois d’Afrique Mondiale), la cargaison a pu continuer sa route.

Déjà, au lendemain même de l’adoption du règlement européen, l’organisation non gouvernementale Global Witness révélait que plusieurs mètres cubes de bois coupés illégalement au Liberia avaient débarqué au port de Nantes. Sans effet.

Il faut créer un nouveau cadre juridique

Alors il est clair que « les pays ne se pressent pas pour appliquer la réglementation européenne », explique Frédéric Amiel. Pourquoi ? Il avance que « les pays savent que s’ils appliquent le règlement européen de manière stricte, les importateurs se tourneront vers des ports de pays moins regardants comme l’Italie, la Grèce ou le Portugal, et ils perdront le marché ». Pourtant, les Etats membres de l’UE, quels qu’ils soient, sont engagés par ce règlement, qui a une valeur supérieure à celle des lois nationales et doit normalement s’appliquer sans délai après son adoption... soit dès le 3 mars 2013.

Qu’attendent les Etats ? En France, il n’existe toujours pas à ce jour de cadre juridique permettant à ce règlement de s’appliquer. Il faut le créer. « Ce règlement introduit des dispositions totalement nouvelles qui dépassent les compétences exercées jusqu’ici par les différents services de l’Etat et départements ministériels », se justifie le ministère de l’Agriculture. 

Il faudra attendre le vote définitif de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, débattue à partir de janvier à l’Assemblée, pour que soient intégrées dans le droit français « les dispositions permettant de contrôler et, le cas échéant, de sanctionner, les opérateurs qui mettent du bois ou des produits dérivés sur le marché sans respecter les dispositions du règlement sur le bois de l’Union européenne », poursuit le ministère. A ce jour, les contrôles du bois importé en France n’ont donc pas encore commencé.

Les ONG dénoncent un manque de volonté politique

Pourtant, Greenpeace a envoyé un rapport en juillet aux autorités françaises en leur indiquant plusieurs lots de grumes suspects provenant de RDC. « La réponse du ministère a été : “on prend bonne note”. En attendant que la loi passe, nous réclamons l’immobilisation provisoire du bois », rappelle Frédéric Amiel.

Pour Julien Tavernier, chargé de campagne forêts au WWF, ce manque de réactivité traduit un « manque de volonté politique ». De plus, il estime que « le projet de loi n’est pas suffisamment détaillé, notamment sur la question des moyens alloués à la lutte contre les importations illégales de bois ». « Ce qui est incompréhensible, puisque le bois illégal vient concurrencer le bois légal français. » Or, abonde Frédéric Amiel, « la loi d’avenir veut justement relancer la filière française du bois. Il est donc difficile de comprendre pourquoi la France met autant de temps à se conformer à un texte qui s’impose normalement d’emblée à elle ».

De son coté, le ministère assure que les signalements reçus ne resteront pas sans effet : « Ils serviront à cibler les premiers contrôles qui seront réalisés pour vérifier le niveau de diligence des compagnies citées [soit le fait qu’elles ont rassemblé toutes les garanties que le bois qu’elles importent est légal]. » Ces vérifications se dérouleront non pas sur les ports mais dans les locaux des entreprises qui ont mis du bois ou des produits dérivés sur le marché. Les importateurs qui ne seront pas en mesure de démontrer la parfaite légalité du bois qu’ils font venir dans l’Hexagone pourront être sanctionnés : ils encourront jusqu’à 100 000 euros d’amende et deux ans de prison.

A lire aussi sur Terraeco.net :

Bois illégal : l’Europe attaque le trafic à la racine
Faites réagir vos proches, diffusez l'info !
Vous aimez Terra eco ? Abonnez-vous à la Newsletter
1 commentaire
TOUS LES COMMENTAIRES
COMMENTAIRES SÉLECTIONNÉS
RÉPONSES DE LA RÉDACTION
Trier par : Plus récents | Plus anciens
Affichage : Voir tout | Réduire les discussions
PUBLIER UN COMMENTAIRE

Un message, un commentaire ?

  • Se connecter
  • Créer un compte

publicité
1
publicité
2
    Terra eco
    Terra eco
publicité
3
SPIP | squelette | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
publicité
bas