publicité
haut
Accueil du site > Actu > Bactérie tueuse : faut-il chercher du côté de l’élevage intensif (...)
Article Abonné
7-06-2011
Mots clés
Santé
Alimentation
Agriculture
Europe

Bactérie tueuse : faut-il chercher du côté de l’élevage intensif ?

Taille texte
{#TITRE,#URL_ARTICLE,#INTRODUCTION}
Bactérie tueuse : faut-il chercher du côté de l'élevage intensif ?
(Joost J. Bakker IJmuiden / Flickr)
 
Alors que l'origine de la « bactérie tueuse » reste un mystère, une chose est à peu près sûre : elle provient des intestins des bovins. Et n'est peut-être pas étrangère au développement de l'élevage intensif.
Le Baromètre de cet article
ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
SUR LE MÊME SUJET

Dernier bilan de l’épidémie causée par la bactérie E. Coli : 25 morts, dont 24 en Allemagne. En cause, un organisme au nom bien barbare : le STEC (Escherichia coli producteur de shiga-toxine) de type O104-H4, qui cause des SHU (Syndrome hémolytique et urémique), à savoir une complication de diarrhée souvent sanglante, qui débouche notamment sur une insuffisance rhénale aiguë. Jusqu’ici, l’E. Coli O104-H4 était une souche très rarement associée à des pathologies chez l’homme, note Christine Martin, directrice de recherche en microbiologie à l’Institut national de recherche agronomique (Inra). Mais visiblement, la bestiole a dû acquérir de nouveaux gènes et évoluer, pour finalement devenir virulente en ce beau mois de juin.

Passés ces termes indigestes, d’où vient cet E. Coli ? Mystère pour l’instant. Mais au-delà des concombres espagnols ou des graines germées – ces deux pistes ayant été écartées – une chose est sûre : la bactérie s’épanouit dans le tube digestif des bovins, sans nuire à leur santé. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si la République tchèque vient de lancer des tests sur la viande de boeuf et de porc provenant d’Allemagne.

Itinéraire d’une E. Coli

Qu’on se le dise donc : c’est dans les bouses de vache qu’il faut chercher l’origine des E. Coli. De là, la bactérie se balade sur les animaux, et peut donc se retrouver sur leurs cadavres. Selon Marie-Pierre Monget, qui a écrit une thèse sur la contamination des aliments par les STEC en France, elle peut ensuite se propager de carcasses en carcasses, via les instruments utilisés dans les abattoirs. Puis se disséminer lors des étapes suivantes de transformation de la viande, notamment lors de la fabrication de viande hachée.

Au-delà de la viande, les E. Coli peuvent aisément se propager dans le lait, donc dans le fromage et les yaourts, mais aussi dans les fruits et légumes. Comment ? En migrant par le fumier posé sur les cultures, par l’eau d’irrigation, ou même par l’homme (surtout quand il ne se lave pas bien les mains...). Bref, toute la chaîne de transformation des aliments est susceptible d’être touchée. Des disséminations qui « laissent imaginer des situations assez peu ragoûtantes dans certains circuits de l’agro-alimentaire », remarque Jean-Yves Nau, qui s’est occupé des questions de médecine pendant 30 ans au Monde, sur Slate.

© Inra

Une tripotée d’épidémies

En matière d’épidémies, l’E. Coli a déjà fait ses preuves. Avant l’arrivée de cette nouvelle souche pathogène (la O104:H4, donc), c’était la O157 : H7 qui apparaissait comme la plus virulente. En France, cette bactérie est responsable de 86% des SHU, relève Marie-Pierre Montet. Selon le ministère de la Santé, les SHU touchent chaque année 70 à 100 personnes, en particulier les enfants de moins de trois ans.

Depuis une trentaine d’années, l’E. Coli O157:H7 se propage de plus en plus via les fruits et légumes crus (la bactérie ne supporte pas une température de plus de 70°C). Elle en a tout le loisir : ces aliments sont, selon Christine Martin, soumis à moins de contrôles sanitaires que la viande et le lait, et moins facilement traçables.

Ainsi, la scientifique rappelle que la bactérie a été retrouvée, il y a tout juste un mois, sur des noix grenobloises importées au Canada. Ou encore, récemment aussi, sur des pommes qui poussaient dans des pâturages à bovins. En 2007, ce sont des épinards frais en sachet qui ont causé la mort de trois personnes aux Etats-Unis. Plus tôt, en 1996, 9000 enfants avaient été infectés au Japon par des pousses de radis.

Il faut remonter en 1982 pour trouver la première épidémie causée par cette E. Coli, aux Etats-Unis. Christine Vernozy-Rozand, alors experte au comité microbiologique de l’Affsa (actuelle Agence nationale de sécurité sanitaire), a noté qu’à cette époque, deux épidémies de diarrhées hémorragiques sévères ont nécessité « l’hospitalisation de 70 % des malades ». Les coupables : « Des hamburgers insuffisamment cuits provenant d’établissements d’une même chaîne de restauration rapide. » Ce syndrome fut surnommé, à cette occasion, la « maladie du hamburger ».

Quel rapport avec l’élevage intensif ?

Pour Marie-Pierre Montet, l’apparition de cette bactérie E. Coli pathogène et sa propagation aux fruits et légumes à partir des années 1980 s’explique, en partie, par la « multiplication des élevages bovins intensifs ».

Le journaliste et spécialiste de l’alimentation américain Michael Pollan est résolument de cet avis. Dans le documentaire de Robert Kenner, Food Inc., il explique même que cette mutation de la bactérie s’est directement produite au sein des parcs d’engraissement intensifs des Etats-Unis (les feedlots), où les animaux « pataugent dans leur fumier » :


Naissance d’une bactérie tueuse ! Extrait de... par CTVinternational

En effet, les études réalisées dans ces feedlots américains présentent une prévalence de l’E. Coli O157:H7 très au-dessus de la moyenne : 61% des troupeaux testés sont positifs, contre 0 à 3% des troupeaux français, d’après la thèse de Marie-Pierre Montet.

Toutefois, « aucune étude ne nous permet d’affirmer un lien entre le développement de ces E. Coli et l’élevage intensif », nuance Christine Martin. Mais la chercheuse l’admet : l’entassement des animaux est propice à la dissémination de ce type de bactéries. De plus, « on sait que le mode d’alimentation des bovins joue sur les conditions physico-chimiques (acides, nutriments, etc.) de leurs intestins, qui influent sur ces bactéries. Or en intensif, ces herbivores sont nourris à 80% de maïs. A la différence de l’élevage extensif, où ils mangent de l’herbe et du fourrage », ajoute Christine Martin. Une question d’alimentation ? Que se passera-t-il donc, dans l’intestin de nos animaux d’élevage, s’ils mangent de nouveau – puisqu’il est question de les réintroduire -, des farines animales ?

Faites réagir vos proches, diffusez l'info !
Vous aimez Terra eco ? Abonnez-vous à la Newsletter
3 commentaires
TOUS LES COMMENTAIRES
COMMENTAIRES SÉLECTIONNÉS
RÉPONSES DE LA RÉDACTION
Trier par : Plus récents | Plus anciens
Affichage : Voir tout | Réduire les discussions
  • Bonjour,

    A noter, qu’il s’agit de l’Afssa (avec un "f" et deux "s") dans la phrase suivante : "Christine Vernozy-Rozand, alors experte au comité microbiologique de l’Affsa (actuelle Agence nationale de sécurité sanitaire)".

    Depuis juillet 2010, l’Afssa et l’Afsset ont fusionné pour créer l’Anses, l’Agence nationale de sécurité sanitaire.

    Romain

    9.06 à 09h41 - Répondre - Alerter
  • Je me permets de rectifier votre info sur la réintroduction des farines animales ; en effet il est question de les remettre sur le marché, mais pas pour nourrir les bovins !
    Martine

    8.06 à 14h00 - Répondre - Alerter
  • Ce qui me surprend le plus par les contaminations dues aux EC pathogènes, c’est qu’on ne met pas assez en cause les manques ou les défauts de traçabilité de la chaine alimentaire.l’application de la traçabilité existe dans beaucoup d’entreprises agro-alimentaires françaises.En est-il de même en Allemagne ou dans les autres pays de la communauté européenne ?.
    Il est plus facile aux autorités compétentes de soupçonner une origine géographique, un produit qu’il soit d’origine bio ou conventionnelle.Mais ces soupçons ne font qu’affoler les consommateurs avec toutes leurs conséquences économiques.
    Même si l’union europénnne indemnise les producteurs, en final ce sont tous les consommateurs qui paieront "ardoise" indirectement.
    A l’avenir, nous pouvons encore nous attendre à des problèmes indentiques de contaminations.Mais les pouvoirs publics pourront-ils continuer à lancer des suspicions, sans preuve, sur telle ou telle corporation, sans prendre de risques de préjudices financiers ?.
    A mon avis il faut développer et rendre obligatoire les contrôles qualités dans toutes les entreprises agro-alimentaires depuis la production jusque dans la restauration , ce qui permettrait de remonter plus rapidement aux sources du problème.
    De telles dispositions permettraient aux organisations de contrôles sanitaires, et à ou aux entreprises concernées, de localiser rapidement, l’origine de la contamination, et ceci avec des coûts financiers et pertes humaines bien moindres.

    8.06 à 12h10 - Répondre - Alerter
PUBLIER UN COMMENTAIRE

Un message, un commentaire ?

  • Se connecter
  • Créer un compte

publicité
1
publicité
2
    Terra eco
    Terra eco
publicité
3
SPIP | squelette | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
publicité
bas