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29-06-2009
Mots clés
Politique
Société
Transports
Etats-Unis

Arnold Ier, la légende écolo

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A la tête de la Californie, l’ex-star de cinéma s’est taillée un costume de héros de la lutte contre le changement climatique. Inspirateur de la politique environnementale d’Obama, cet amoureux de Hummer et de jets privés a tout appris au contact du clan Kennedy.
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Los Angeles, le 18 novembre 2008, dans un hôtel chic de Beverly Hills. L’ex-Mr Univers arbore une cravate verte. Devant un parterre de 800 dignitaires réunis pour le Governors’ Global Climate Summit, Arnold Schwarzenegger, gouverneur républicain de Californie, fait son cinéma. « En 2006, lorsque nous avons promulgué la loi AB 32 de réduction des émissions de gaz à effet de serre de l’Etat, le gouvernement fédéral a montré autant d’enthousiasme que les spectateurs à la sortie de mon premier film " Hercule à New York ". Un bide monumental ! », lâche-t-il avant de laisser la parole à un invité surprise.

Les lumières s’éteignent, Terminator se tait. Le démocrate Barack Obama, fraîchement élu à la tête du pays, apparaît sur un écran géant. Sous les ovations de l’auditoire, il promet que son Amérique, contrairement à celle de George W. Bush, suivra l’exemple californien. Le futur Président vient de voler la vedette à l’ex-acteur hollywoodien en s’imposant comme le chantre de la lutte contre le réchauffement climatique.

Mis KO

Washington DC, le 19 mai 2009. Sur la pelouse de la roseraie de la Maison Blanche. Le Président Obama, au pouvoir depuis quatre mois, annonce que le gouvernement fédéral va imposer à l’industrie automobile des normes strictes en matière d’émissions de gaz carbonique et de consommation de carburant. Elles sont modelées sur celles de la Californie qui, dès 2002, avait voté une loi obligeant les constructeurs à réduire de 30 % les rejets polluants de leurs véhicules d’ici à 2016. Arnold Schwarzenegger s’affiche aux côtés du Président, tout sourire. Pourtant, dans son Golden State, Monsieur Muscles est sur le point d’être mis KO par les électeurs. Ce même jour, les Californiens rejettent massivement par référendum les hausses d’impôts destinées à réduire le déficit budgétaire colossal – 17 milliards d’euros – de la septième économie au monde. Ingérable, l’Etat le plus peuplé du pays est au bord de la faillite.

Les passions de Mr Hummer

Pour Greg Lucas, ancien journaliste politique au San Francisco Chronicle et auteur de l’influent blog California’s Capitol, la protection de l’environnement est la seule matière dans laquelle Arnold Schwarzenegger, au pouvoir depuis six ans, mérite une note décente. « Quel que soit son bilan politique, il a été un promoteur efficace de la lutte contre le changement climatique. Il a utilisé tout son poids politique, sa célébrité et son charme pour rallier les gens et convaincre, notamment les républicains, qu’écologie et économie n’étaient pas antinomiques. »

Schwarzenegger a compris qu’épouser la cause verte était politiquement correct – bien pour la planète, bon pour la croissance – et constituait une stratégie à moindre risque. « Pour un politique, le changement climatique est un sujet idéal. Lorsqu’on fait un discours sur la nécessité de purifier l’air, de sauvegarder les ressources de la planète, tout en promettant de donner naissance à de nouvelles industries et de créer de nouveaux métiers, le désaccord est presque impossible », résume Greg Lucas.

Les discours actuels d’Obama sur l’environnement sont, pour l’essentiel, calqués sur ceux de Schwarzenegger. Mais Schwarzy est-il vert dans l’âme ou opportuniste politique ? Impossible de ne pas relever les contradictions entre son style de vie et son engagement pour la cause environnementale. Tous les soirs, « Governator » fait la navette en avion privé entre Sacramento (son lieu de travail) et Santa Monica (son domicile), rejetant ainsi des milliers de tonnes de CO2 dans les cieux californiens ; sa passion pour les Hummer est connue de tous. Il se vante même d’avoir convaincu General Motors de commercialiser ce véhicule tout-terrain surdimensionné, autrefois réservé à l’armée. Bien plus qu’un caprice de star, l’engin est le symbole d’une industrie automobile à l’appétit monstrueux. Pour se donner bonne conscience, le gouverneur a converti le sien à l’hydrogène, à grands renforts de publicité.

L’influence des Kennedy

Pour Schwarzenegger, la révolution verte ne passe précisément pas par un changement de comportement des consommateurs. « Protéger l’environnement n’implique pas que tout le monde s’insurge contre les 4X4 ou les camions. Il s’agit au contraire de développer des technologies qui réduiront les émissions de gaz à effet de serre, mais pas la taille des voitures », déclarait-il au magazine allemand Spiegel, fin 2007. Pas question de forcer le Californien moyen à se débarrasser de son pick-up ou la ménagère de son mini-van. Cette philosophie lui vaut d’être critiqué par les défenseurs de l’environnement. D’autant que cette confiance aveugle en la technologie montre ses limites. Alors qu’« Arnie » ambitionnait de développer une « autoroute à l’hydrogène » en Californie en construisant 200 stations-service d’ici à 2010, on en recense aujourd’hui moins d’une trentaine.

Mais d’où lui vient cette conscience verte ? Il aime à évoquer son enfance passée dans la campagne autrichienne. D’autres font valoir que ce thème est à la mode dans le milieu hollywoodien. Pour John White, lobbyiste qui dirige le Center for Energy Efficiency and Renewable Technologies, l’ancien comédien a été incontestablement inspiré par l’entourage de son épouse, la démocrate Maria Shriver, nièce de John F. Kennedy. Or le clan Kennedy a la fibre écolo. Robert F. Kennedy junior, cousin germain de Maria et avocat spécialisé en droit de l’environnement, a exercé une influence indéniable sur son parent par alliance. C’est lui qui l’a mis en contact avec Terry Tamminen, un expert en environnement respecté, qui a bâti le programme de Schwarzenegger. En partant de zéro, car Arnold ne connaît pas grand-chose au sujet. « Lorsqu’il a pris le pouvoir en 2003, les associations pour la défense de l’environnement se sont montrées très sceptiques. Mais quand Terry Tamminen nous a réunis autour d’une table pour nous exposer les ambitions du gouverneur, nous avons été sidérés par l’ampleur des réformes envisagées », admet John White.

De longue haleine

Et Conan le Barbare a frappé fort : Green Building Initiative visant à réduire la consommation énergétique des bâtiments publics de 20 % d’ici à 2015, Ocean Action Plan pour une meilleure gestion des ressources du Pacifique ou Million Solar Roofs ambitionnant un million de toits solaires dans la décennie. La pièce maîtresse de son programme vert ? La ratification de la loi AB 32 qui veut ramener les émissions de l’Etat en 2020 à leur niveau de 1990 (et les réduire de 80 % d’ici à 2050). Fruit du travail de longue haleine de groupes environnementalistes et de parlementaires démocrates, cette réglementation fait de la Californie le premier Etat à s’engager sur des objectifs chiffrés, conformément au protocole de Kyoto. Et donne à Schwarzenegger, qui vise un second mandat en 2006, une occasion rêvée de briller. La cérémonie de signature est d’ailleurs l’objet d’une fête somptueuse sur Treasure Island, au large de San Francisco.

« Pourtant, la loi a été l’objet d’une lutte d’influence entre le gouverneur républicain et les démocrates qui s’est soldée par un compromis de la part de Schwarzenegger », confie John White. Alors que le gouverneur souhaitait instaurer un système cap and trade permettant aux entreprises d’acheter des permis de polluer, les démocrates ont conditionné leur accord à l’instauration de règles très strictes pour les pollueurs.

« Plus grand que nature »

Mais entre le gouverneur et les écolos, la lune de miel touche à sa fin. « Médiocre », tel est le verdict de la California League of Conservation Voters, un lobby vert appelé à évaluer l’action du gouverneur en matière environnementale au moment des élections de 2006. Inébranlable, Schwarzy affiche cependant ses couleurs. Il fait campagne dans un bus vert vif et est facilement réélu (avec 57 % des voix). L’été suivant, scandale : Schwarzenegger décide de renvoyer, sous un prétexte obscur, Robert Sawyer, le très respecté président de l’Air Resources Board, l’agence californienne de contrôle de la pollution de l’air et architecte de la loi AB 32.

Sawyer dénonce alors, dans la presse, l’ingérence du gouverneur dans les travaux d’une organisation censée être indépendante. L’image d’Arnold allié des écolos en prend un coup. Et pourtant, la même année, Schwarzenegger part en guerre contre l’administration Bush. Il dépose plainte contre l’Agence de protection de l’environnement (EPA) qui refuse d’octroyer à la Californie, ainsi qu’à 16 autres Etats, le droit de mettre en œuvre un programme de réduction des émissions de gaz à effet de serre plus contraignant que ce qui est imposé par le gouvernement fédéral.

Crise prétexte

« A chaque cause son champion. » Pour Derek Walker, de l’Environmental Defense Fund, association qui a parrainé le projet de loi AB 32, Schwarzy constitue bien celui du changement climatique. Même si « au cours des derniers mois, nous constatons qu’il recule sur certains points en utilisant le prétexte de la crise économique pour relâcher la pression sur les pollueurs », juge-t-il. Reste que Schwarzy continue de mettre la cause verte au cœur de ses discours. Il a récemment annoncé la création du California Green Corps, la version écolo du Peace Corps, une armada d’un millier de jeunes issus de milieux défavorisés. Leur combat ? Prendre d’assaut les métiers de la révolution verte. Une bataille comme Terminator les aime. 

Photos

Ken James

Monica Almeida - New York Times


SCHWARZY EN 12 DATES

1947 naissance en Autriche

1967 élu Mr Univers

1968 déménage aux Etats-Unis

1970 premier film, Hercule à New York

1977 Arnold le Magnifique, docu sur le culturisme

1982Conan le Barbare

1984Terminator

1986 Mariage avec Maria Shriver, nièce de JFK

1991Terminator II

2003Terminator III

Octobre 2003 devient gouverneur de Californie, suite à la révocation de Gray Davis

Novembre 2006 est réélu gouverneur pour quatre ans

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Correspondante de « Terra eco » en Californie, Anne Sengès est l’auteur de « Eco-Tech : moteurs de la croissance verte en Californie et en France », paru en novembre 2009 aux éditions Autrement.

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