Les médias sont en crise et les journaleux indépendants à la peine, ils tirent la ficelle par les deux bouts. Arnaud Ramsay n’est pas de ceux-là, cet auteur à l’air ingénu et aux joues pouponnes est plus malin qu’il n’y parait. De ses apparitions sur le petit écran dans des émissions spécialisées, il a profité du label « vu à la télé » pour se composer un carnet d’adresses prestigieux qu’il a su faire abondamment fructifier. Après avoir écrit des biographies autorisées (comprendre des livres de commande très bien rémunérés) de Youri Djorkaeff ou de Bixente Lizarazu i ; et des enquêtes-portraits (comprendre des livres de commandes très bien rémunérés, mais chut, il faut faire croire au public que ces ouvrages sont 100% indépendants) de Platini ou de Laurent Blanc. Son dernier livre « Dimitri Rybolovlev, le roman russe du président de l’AS Monaco », publié aux éditions Cherche-Midi entre dans la deuxième catégorie.

Le coup de comm

Lorsque l’on est un personnage public très fortuné et englué dans les affaires, comme l’est le président de l’AS Monaco, avec le scandale de son divorce, l’affaire Bouvier et les mises en examen de son avocate Tetiana Bersheda ; lorsque l’on a un passé trouble, comme Rybolovlev avec sa mise en prison pour meurtre en 1996, et la manière dont il a acquis sa fortune, on embauche un cabinet de communication pour redorer son blason. Dans le plan stratégique, que proposent les grands communicants pour refaire de vous le perdreau de l’année, il y a les faveurs à la presse, les apparitions médiatisées dans les réceptions prestigieuses, les photos « volées » qui sont toujours à votre avantage etc. Il y a également le livre-enquête écrit par un journaliste indépendant censé retracer votre vie en fouillant dans vos poubelles, mais en prenant soin, bien entendu, de laisser de côté les papiers gras… Le nom d’Arnaud Ramsay, qui a déjà montré patte blanche dans le passé, avec des personnalités contestées comme Platini, Anelka ou Boudjella est sorti opportunément du chapeau des conseillers en communication.

Une story telling mal huilée

Dans ce genre d’affaires, la grandeur du journaliste-enquêteur-écrivain ne consiste ni à écrire ni à enquêter puisque les communicants ont transmis des fiches. Non, tout l’art du journaliste-communicant consiste à assurer le service après-vente pour faire croire aux confrères et au public que ce livre est vraiment l’œuvre d’un indépendant, qu’il est le fruit d’un énorme travail et d’une très longue investigation. Et c’est là que le « si gentil Arnaud Ramsay » se plante : il en fait trop ! Ainsi, il lui a fallu deux années de travail pour réaliser cet ouvrageii. Qui peut croire pareille histoire, alors que le le livre ne comporte aucun scoop, rien qui ne pas déjà publié sur internet ? Dans une interview accordée à un journal sportif, le grand enquêteur déclare qu’il a réalisé 50 entretiens avec des proches de Rybolovlev, dans une autre c’est une soixantaine de rendez-vous qu’il aurait eusiii… Mentir et être constant dans ses mensonges est également un art. Il dit également avoir interrogé des proches et des ennemis du président de l’AS Monaco, pourtant aucun passage du livre n’est à charge, à l’image de la dernière de couverture où Arnaud Ramsay écrit : « Ce livre lèvera donc quelques interrogations sur le natif de Perm qui, prédestiné à une carrière de médecin, se retrouve à la tête de l’un des clubs historiques du football hexagonal et d’une fortune colossale obtenue grâce à son flair pour les opportunités. » C’est à se demander qui des deux, de Rybolovlev ou de Ramsay est le plus doué pour flairer au mieux les opportunités !